L’AFIS attaque (9 et fin! )

Le summum de la mauvaise foi

Concernant l’« argument numéro 5 », où M. Kuntz met en cause les travaux d’Ignacio Chapela sur la présence de maïs OGM au Mexique, je dois dire qu’on atteint là le summum de la mauvaise foi.

Les travaux du Pr. Chapela n’ont pas « été contredits par d’autres », mais bel et bien confirmés, ainsi que je l’explique longuement dans mon livre (Cf chapitre 12).

M. Kuntz ignore aussi superbement la campagne de diffamation lancée contre le chercheur de Berkeley sur Internet par de faux scientifiques créés de toutes pièces par Monsanto, ainsi que je l’ai déjà expliqué dans mon message « appel à la vigilance » (rubrique « les nouvelles de la toile »).
Ce qui prouve, que la « firme n’a aucune envie de convaincre avec des arguments » et qu’« elle est prête à tout pour imposer ses produits partout dans le monde, y compris à détruire la réputation de tous ceux qui peuvent lui faire obstacle… »,comme me l’a dit Jonathan Matthew, qui a découvert les « méthodes très sales de Monsanto ».

Par ailleurs, si le Pr. Chapela a été si vivement attaqué, c’est surtout pour la deuxième découverte que livrait son étude, ainsi qu’il me l’a expliqué, lorsque je l’ai rencontré à San Francisco.

EXTRAIT :

« Le deuxième point de notre étude était beaucoup plus sérieux pour Monsanto et consorts. En effet, en cherchant où étaient localisés les fragments d’ADN transgénique, nous avons constaté qu’ils s’étaient insérés à différents endroits du génome de la plante, de manière complètement aléatoire. Cela signife que, contrairement à ce qu’affirment les fabricants d’OGM, la technique de manipulation génétique n’est pas stable, puisqu’une fois que l’OGM se croise avec une autre plante, le transgène éclate et s’insère de manière incontrôlée. Les critiques les plus virulentes se sont surtout concentrées sur cette partie de l’étude, en dénonçant notre incompétence technique et notre manque d’expertise pour pouvoir évaluer ce genre de phénomène. »

Le fait que les « transgènes soient instables a des « implications graves », commente Science, « étant donné que le comportement d’un gène dépend de sa place dans le génome, l’ADN déplacé pourrait créer des effets absolument imprévisibles ».
« Cela sape la prémisse fondamentale selon laquelle la manipulation génétique est une science sûre et exacte », renchérit le journaliste du East Bay Express…

FIN DE L’EXTRAIT

Je note que la découverte du Pr. Chapela était confirmée, à peu près au même moment, par Marc de Loose, un chercheur belge, qui a découvert un « fragment d’ADN inconnu dans une variété de soja génétiquement modifié de Monsanto », preuve que la manipulation est tout sauf une « science exacte » (Le Monde, 19/8/2001).

Quant au « militant anti-OGM » mexicain qui s’exprime dans mon film, s’il l’est devenu c’est tout à fait par hasard : c’est parce qu’il a été contacté par des paysans indiens, inquiets de voir subitement des « maïs bizarres » dans leurs champs, qu’il a décidé de faire tester les « monstres » : ceux-ci ont révélé qu’ils contenaient un transgène, dû au croisement d’un maïs transgénique avec un maïs traditionnel…

En guise de conclusion :

Les arguments pseudo-scientifiques de M.Kuntz visent à noyer le lecteur pour semer le doute sur ma capacité à comprendre réellement le sujet que je traite. C’est ce que j’appelle de l’arrogance.
Je n’ai certes pas de doctorat en biologie, mais un bac scientifique (série C) qui m’a amplement suffi pour assimiler la matière , de saisir les enjeux et poser les bonnes questions.
Surtout, loin de commenter le film, M. Kuntz botte systématiquement en touche, en ignorant avec une malhonnêteté stupéfiante, ce que disent réellement les interlocteurs de mon film.

Photos:
Aldo Gonzalez, qui accumule les exemples de « maïs monstrueux » dans l’Etat de Oaxaca
Quelques exemples de « maïs monstrueux » sur une banque de 3OO clichés.

L’hormone de croissance laitière

L’hormone de croissance bovine recombinante (rbGH) : un produit très controversé

« Aucune différence significative n’a été démontrée entre le lait provenant de vaches traitées à l’hormone de croissance et les vaches non traitées »…

(site de Monsanto)

Fabriquée au début des années 80, la rbGH est une hormone transgénique qui, injectée aux vaches, deux fois par mois, permet d’augmenter la production laitière de 15 à 20% (à un moment où aux Etats Unis comme en Europe on abat des vaches et impose des quotas laitiers pour réduire la production de lait!).

Il aura fallu quatorze ans à Monsanto pour convaincre la FDA d’en autoriser la vente (1994).

L’agence s’est basée sur les seules conclusions d’une étude réalisée par Monsanto où la rbGH a été testée pendant 9O jours sur trente rats, mais cette étude n’a jamais été publiée et est classée « secret commercial » …

En 2000, le Canada a refusé la mise sur le marché de l’hormone après qu’une commission sénatoriale a conclu, après audition de scientifiques de l’agence Health Canada, que le dossier d’approbation de la FDA ignorait les dangers de l’hormone pour la santé des animaux et des hommes. Cette commission a aussi révélé que Monsanto ava

it proposé « un à deux millions de dollars » à des agents de Health Canada pour qu’ils homologuent le produit, en dépit de ses effets secondaires.

De fait, l’injection de rbGH provoque des mammites chez les vaches (infection des pis), des fragilités osseuses et des malformations chez les veaux, ce qui entraîne une consommation accrue d’antibiotiques ( ingérés ensuite par l’homme, d’où la crainte d’une résistance aux antibiotiques).

D’après une étude réalisée par le Syndicat des agriculteurs du Wisconsin, de nombreux éleveurs chevronnés ont dû renouveler une partie de leur cheptel, décimé par les effets secondaires de la drogue ( sur les emballages de Posilac, le nom commercial de l’hormone, Monsanto signale vingt et un effets secondaires).

De plus, la rbGH stimule la fabrication d’une hormone appelée IGF1 (Insulin like growth factor), qui ne disparaît pas avec la digestion, dont de nombreuses études ont prouvé son lien avec les cancers de sein, de la prostate ou du colon.

Profitant du soutien sans faille de la FDA (les responsables du dossier rbGH ont travaillé pour Monsanto), la compagnie poursuit en justice les producteurs ou transformateurs de produits laitiers qui osent faire de la publicité pour un « lait sans hormone artificielle ».

Et ceux qui osent rompre l’omerta s’exposent à de graves problèmes : c’est ainsi que Jane Akre et Steve Wilson ont été licenciés de Fox News, sous pression de Monsanto, pour avoir enquêté sur les dessous de la rbGH. Cependant, les preuves des effets nocifs de cette hormone sur la santé animale et humaine continuent de s’accumuler et la Communauté européenne a interdit définitivement son utilisation en 2000, un an après le Canada.

Pour mon enquête, j’ai rencontré le docteur. Richard Burroughs, vétérinaire, qui a été licencié de la FDA pour son opposition à la mise sur le marché de la rBGH ; le professeur Samuel Epstein président de la Coalition pour la prévention du cancer, et le journaliste Pete Hardin, qui ont eu accès à des données secrètes de Monsanto, envoyées par un agent anonyme de la FDA; le Dr. Shi Chopra qui Health Canada, qui a dénoncé les dangers de l’hormone devant la commission sénatoriale, avant d’être licencié. ; Jane Akre, licenciée de Fox News pour un reportage sur la rbGH qui n’est jamais passé ; Michael Taylor, ex avocat de Monsanto, recruté par la FDA pour rédiger le processus d’approbation de la rbGH, qui sera nommé ensuite vice-président de Monsanto ; Michael Hansen, expert du Consumer Police Institute qui dénonce le conflit d’intérêt entre la FDA et Monsanto.

Photo :

Pete Hardin me montre les documents secrets que Monsanto avait remis à la FDA concernant les essais de l’hormone de croissance transgénique sur les vaches.

Avec le Dr. Michael Hansen, expert de l’Union des consommateurs des Etats Unis, qui me photocopie son dossier sur la rBGH.

Inde

Le vendredi 15 février, Le Monde publiait un article intitulé “Les surfaces cultivées en OGM ont augmenté de 12% en 2007”. Très justement le quotidien du soir notait que cette affirmation était fondée sur les chiffres fournis par l’International Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications (ISAAA), un “institut basé aux Etats-Unis et financé par des organisations comme la Fondation Rockfeller ou la société Monsanto”.

Chaque année, l’ISAAA publie un rapport triomphaliste où elle constate immanquablement l’augmentation des cultures transgéniques dans le monde. Le problème c’est que les chiffres qu’elle avance sont invérifiables, et parfois en contradiction avec ceux fournis par les pays concernés. C’est le cas notamment de l’Inde , où “l’institut annonce pour 2006 une surface cultivée en OGM supérieure de 400 000 hectares à la statistique gouvernementale”, commentait Le Monde.

Je suis allée en Inde, et la réalité est beaucoup moins reluisante que ne le laisse entendre l’ISAAA. Dans l’Etat de l’Andhra Pradesh, qui autorisa les cultures de coton BT dès 2002, la récolte fut si catastrophique que le ministre de l’agriculture , Raghuveera Reddy , a décidé de bannir les trois variétés transgéniques de Monsanto à l’origine du désastre et a porté plainte contre Mahyco-Monsanto, la filiale indienne de la multinationale, pour que les paysans soient indemnisés.

Dans l’Etat du Maharashtra, où le coton transgénique fut introduit en 2005, les performances dans les champs furent si mauvaises, que dans le secteur de Vidharba – le centre cotonnier de l’Etat- un paysan se suicide toutes les huit heures.

J’ai pu filmer l’inhumation d’un jeune producteur de coton BT de vingt-cinq ans qui s’était suicidé en buvant du …pesticide. Les raisons de son geste désespéré était la « récolte nulle » et l‘ « endettement ».

En effet, en Inde, il est toujours (jusqu’à quand ?) interdit de breveter les semences. Pour se « rattraper », Monsanto vend ses semences transgéniques quatre fois plus chères que les semences conventionnelles.

Pour se les procurer, les petits paysans doivent emprunter à des taux usuriers. Si l’on ajoute à cela le coût des engrais et des pesticides, c’est un engrenage infernal qui a conduit à la mort 2500 paysans de juin 2005 à décembre 2007, dans le seul secteur de Vidharba.

Car, contrairement aux promesses de la firme de Saint Louis, le coton BT, qui a été manipulé pour repousser les attaques du ver américain, ne permet pas de réduire la consommation d’insecticides. « C’est un mensonge », m’ont affirmé le docteur Abdul Qayum et Kiran Sakkhari, deux agronomes, qui suivent depuis 2002, les performances du coton BT dans le district de Warangal, dans l’Etat de l’Andhra Pradesh. D’abord, le coton BT ne protège pas contre les insectes suceurs très nombreux, ni contre le ver américain : immanquablement, à partir du soixantième jour, il faut également traiter contre le ver américain. De plus, les plants de coton transgénique sont terrassés par une maladie qui ne cesse de progresser dans les champs transgéniques, d’année en année. C’est la rhizoctonia qui entraîne la mort de la plante. Les paysans n’avaient jamais vu cela. Nous pensons que cela est dû à une mauvaise interaction entre le gène BT qui a été introduit et la plante réceptrice que la manipulation génétique a fragilisée. C’est un échec total ».

« Le problème, poursuivent les agronomes indiens, c’est que les paysans peuvent difficilement revenir en arrière : après le rachat de Mahyco, Monsanto contrôle la quasi totalité du marché des semences de coton en Inde, et les semences non transgéniques ont pratiquement disparu… »

Photo :

Les funérailles d’un jeune paysan de 25 ans qui s’est suicidé en buvant du pesticide, parce que sa récolte de coton BT était « nulle ».

Une veuve qui exhibe la photo de son mari, une autre victime du coton BT.

Dans les bureaux du Vidharba Jan Andolan Samiti, un mouvement paysan qui enregistre les suicides dans ce secteur cotonnier du Maharashtra.