Colloque au sénat et appel à soutenir Terre de Liens

Avis aux amateurs !

Lundi 8 avril se tiendra au Palais du Luxembourg un colloque sur l’agro-écologie organisé par le sénateur Joël Labbé (EELV) qui m’a demandé d’en assurer la coordination et la modération. Cette journée est ouverte au public, mais il est impératif de s’inscrire pour pouvoir y participer, car le nombre de places est limité (200).

 

 

 

Le colloque sera ouvert par Stéphane Le Foll, le ministre de l’agriculture, dont on attend avec impatience qu’il prenne des mesures au plus vite pour « faire de la l’agro-écologie une force pour la France ». C’était le titre de la conférence nationale sur l’agriculture que son ministère  a organisée, le 18 décembre 2012, au Conseil économique, social et environnemental (Place d’Iéna, à Paris). Après cette journée « prometteuse » où il était question de « produire autrement », force est de reconnaître qu’aucune mesure concrète n’a été annoncée…

Pour ma part, je vois deux chantiers urgents :

–       aider la conversion des paysans qui sont prêts à changer de système. Et, comme j’ai pu le constater lors de ma tournée française, ils sont très nombreux ;

–       encourager le développement de l’agroforesterie, en aidant les paysans à acheter et replanter des arbres, y compris au milieu de leurs champs de blé !

Pour mon enquête Les moissons du futur, j’ai notamment filmé la ferme expérimentale de l’INRA, sur le domaine de Restinclières, dans l’Héraut, où Christian Dupraz mène un programme d’agro-foresterie unique en Europe, où il fait pousser du blé sous les noyers !

Vous pouvez avoir un aperçu de cette expérience sur le site d’ARTE :

http://www.arte.tv/fr/france/6984730.html

Vous pouvez aussi en savoir plus en lisant le chapitre de mon livre que j’ai consacré à ce programme pilote qui n’attend qu’à être reproduit partout en France !

Lors du colloque au sénat, auquel participera Olivier de Schutter, le rapporteur des Nations Unies pour le droit à l’alimentation, Fabien Liagre, le collègue de Christian Dupraz, présentera les multiples avantages environnementaux et économiques de l’agro-foresterie.

Parmi les intervenants, il y aura aussi Sjored Wartena, le fondateur de Terre de Liens, une association qui fait appel à l’épargne populaire et solidaire pour acheter des fermes et permettre l’installation d’agriculteurs biologiques.

Alors qu’en France, deux cents exploitations agricoles disparaissent, chaque semaine, le rôle de Terre de Liens est capital. Depuis sa création, en 2003, l’association a réussi à lever 30 millions d’Euros de capital (7600 actionnaires) pour acquérir 97 fermes , louées à ce jour à 210 agriculteurs.

http://www.terredeliens.org/spip.php?page=accueil

Les terres acquises ne sont pas destinées à être revendues. L’objectif de Terre de Liens est, en effet, de sanctuariser les terres agricoles, pour les soustraire à la spéculation et à la concentration de la propriété de la terre.

En effet comme cela sera souligné lors du colloque, l’un des plus gros freins au développement de l’agro-écologie c’est l’accès au foncier. La logique agroindustrielle a conduit à un agrandissement considérable de la taille moyenne des fermes et à la concentration toujours plus poussée de la propriété de la terre. Dans tous les départements, on assiste régulièrement au même scénario: une ferme se « libère », à la suite du départ à la retraite ou au décès d’un agriculteur sans successeur. Comme le prévoit la loi d’orientation agricole de … 1960, le terres disponibles ne peuvent être vendues sans l’accord des Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) qui ont un droit de préemption. comme j’ai pu le constater dans de nombreux départements où j’étais en « tournée », bien souvent les SAFER – où siègent les organisations professionnelles agricoles, dont la FNSEA) ont souvent tendance à accorder la ferme disponible à un gros exploitant agricole, qui agrandit ainsi ses surfaces. Récemment, à Avignon, j’ai entendu le témoignage d’un jeune maraîcher bio, qui avait essayé d’acquérir trois hectares pour s’installer, mais la SAFER a préféré attribuer les terres au fils d’un agriculteur qui possédait déjà une très grande ferme.

C’est pour toutes ces raisons que j’ai décidé de « marrainer » un projet d’installation, soutenue par Terre de Liens Normandie.

 

 

Fin janvier, je me suis ainsi rendue sur la ferme des Clos Mignons, à Sainte Marguerite en Ouche , dans l’Eure. J’y ai rencontré Sophie et Vincent Ozeblio qui cherchent à s’installer depuis huit ans ! Grâce à Terre de Liens, qui a déjà réuni  plus de 100 000 Euros (sur les 160 000 Euros requis), le couple va pouvoir s’installer, avec ses deux enfants, sur une exploitation appartenant à Françoise Moraine, une agricultrice qui part à la retraite. En arrivant, j’ai découvert avec bonheur que la ferme comprenait un verger agro-forestier (trois hectares), avec des moutons qui paissent sous les pommiers.

 

Sophie et Vincent envisagent aussi de fabriquer du fromage de chèvres (ils vont récupérer le troupeau de Michel, un voisin qui part aussi à la retraite) et d’élever des poulets fermiers.

Vous pouvez soutenir leur installation à cette adresse:

http://www.terredeliensnormandie.org/index.php?option=com_content&view=category&layout=blog&id=39&Itemid=64

Je mets ici en ligne une petite vidéo que j’ai filmée avec mon portable lors de ma visite sur la ferme le 26 janvier dernier. Le soir, Terre de Liens Normandie avait organisé une projection des Moissons du futur pour continuer à récolter des fonds. Avis aux amateurs !!

 

 

Enfin, je salue l’initiative de Terre de Liens Normandie qui vient de lancer un « convertisseur alimentaire », permettant de calculer combien de paysans et paysannes nous devrions avoir si la France passait massivement à l’agriculture biologique et si les consommateurs relocalisaient leur consommation.

Je vous invite à faire un test sur le site de Terre de Liens Normandie en calculant combien d’emplois agricoles l’agriculture biologique pourrait créer dans votre ville :

http://convertisseur.terredeliensnormandie.org/

 Pour la France, le développement d’une agriculture biologique de proximité nécessiterait 1187 000 paysans (travaillant sur 22 963 759 ha, équivalant à 80% de la Surface Agricole Utile)  , soit deux fois plus qu’aujourd’hui, et donc une création de plus de 400 000 emplois !

Qu’attend le gouvernement pour aller au plus vite dans cette direction ?

« La double face du cardinal »

« Habemus papam ! »

Depuis que la formule rituelle a fait le tour du monde pour annoncer l’élection du successeur de Benoît XVI sur le trône de Saint Pierre , j’ai reçu plusieurs demandes d’interviews. Mes confrères du Soir, de La Vie, France 2 (Le Jour du Seigneur) ou Daniel Mermet (Là-bas si j’y suis) ont cherché à me joindre pour savoir ce que je pensais des accusations portées contre le Pape François, un jésuite argentin, qui avait été nommé cardinal  par Jean-Paul II en février 2001. Je n’ai pas voulu répondre tout de suite à cette question, car elle est grave, et je voulais prendre le temps de vérifier toutes les sources disponibles concernant l’attitude de  Jorge Bergoglio, qui était responsable de la Compagnie des Jésuites en Argentine, pendant les années de la dictature (1976-1983).

Dans un premier temps, il était clair qu’il me fallait distinguer entre le rôle joué, d’une manière générale, par la hiérarchie catholique argentine dans l’une des dictatures les plus sanglantes du XXème siècle (au moins 20 000 disparus), et le rôle joué précisément par celui qui fut désigné Pape la semaine dernière.

Concernant la hiérarchie catholique, je ne peux que répéter ce que j’ai dit dans mon film et  livre Escadrons de la mort : l’école française. [1] : historiquement, l’Eglise d’Argentine est, avec celle de Colombie, l’une des plus conservatrices du continent latino-américain. Dès les années 1930, les prélats intégristes argentins entretinrent des relations privilégiées avec l’Extrême droite française, et notamment avec Charles Maurras. Ces liens se resserrèrent  sous l’entremise de Jean Ousset, qui fut secrétaire personnel du chef de l’Action française et un admirateur zélé du général Pétain et du gouvernement de Vichy, avant de créer la « Cité catholique »[2].

Pendant la guerre d’Algérie, cette organisation intégriste et fasciste – Ousset était fasciné par l’organisation politique prônée par Mussolini – eut une influence importante dans l’armée française, où elle parvint à créer plus de 200 « cellules »  abonnées à sa revue Verbe. Ainsi que je l’ai révélé, plusieurs numéros de Verbe furent consacrés à la torture que Jean Ousset justifiait au nom de la « lutte contre la subversion ». En 1958,  cet anticommuniste viscéral ouvrit une antenne à Buenos Aires, baptisée naturellement La Ciudad Católica, dont il confia la direction au père Georges Grasset.  Très proche de l’OAS, celui que l’on  surnommait le « moine soldat » deviendra le confesseur personnel d’une certain Jorge Videla, le premier chef de la junte militaire qui terrorisa l’Argentine après le coup d’Etat du 24 mars 1976.

Pour mon film, j’ai pu interviewer (en me faisant passer pour une historienne obsédée par la menace du terrorisme islamiste) quatre généraux de la dictature : le général Ramón Diaz Bessone, ex ministre de la planification de la junte et chef du 2ème corps d’armée, le général Albano Harguindéguy, ex ministre de l’Intérieur, le général Alcides Lopez Aufranc, et le général Reynaldo Bignone, qui fut le dernier chef de la junte. Tous m’ont confirmé avoir connu personnellement le père Grasset  et avoir été « inspirés » par les enseignements de la Ciudad Católica. Tous m’ont expliqué aussi l’influence exercée par les militaires français dans leur « formation » : « Quadrillage territorial, rafles, torture, escadrons de la mort, disparitions forcées, nous avons tout appris des Français qui nous ont enseigné les techniques qu’ils avaient développées pendant la guerre d’Algérie » m’ont-ils dit à l’unisson.  Tous, enfin, ont revendiqué leur « foi catholique » pour justifier les méthodes du terrorisme d’État, censées éradiquer « la menace communiste » et défendre » les valeurs chrétiennes de l’Occident ».

Lors de notre rencontre (filmée), le général Reynaldo Bignone ( qui est aujourd’hui en prison comme Diaz Bessone et Harguindéguy)  a évoqué les relations privilégiées qu’entretenait la junte avec plusieurs représentants de l’épiscopat argentin.

Je mets ici en ligne un court extrait de cet entretien, qui fait partie des bonus du DVD (réédité récemment par ARTE).

 

L’interview de Bignone, ainsi que de ses trois comparses tortionnaires, a provoqué une « commotion nationale » en Argentine, pour reprendre les termes de Horacio Verbitsky, considéré comme le « meilleur journaliste d’investigation » du pays. Editorialiste à Página 12, écrivain, et président du Centro de Estudios Legales y Sociales (CELS), une organisation des droits de l’homme très réputée ( http://www.cels.org.ar/home/index.php), Horacio est l’auteur de six ouvrages sur l’Eglise catholique argentine qui indéniablement constituent une référence.

http://www.elortiba.org/verbitsky.html

Je l’ai rencontré il y a tout juste dix ans, en mai 2003, au terme de cette improbable  semaine, où j’avais réussi à « mettre en boîte » les quatre généraux. Je n’oublierai jamais sa réaction : « Ces interviews sont capitales, m’avait-il dit. Elles constituent des aveux et de véritables pièces à conviction dans la lutte contre l’impunité ». C’est ainsi que j’avais accepté de lui confier une copie de mes rushes (avec l’accord de Canal+ et de mon producteur Idéale Audience), afin qu’il puisse exploiter les entretiens dans son journal ainsi que sur la chaîne de télévision Telefe.

L’impact fut considérable : les généraux furent convoqués devant un conseil de guerre pour être destitués, tandis que la conférence épiscopale se fendait d’un communiqué, niant toute implication dans la dictature. « C’est absolument faux et inacceptable de lier l’Eglise avec ce type de crimes », assuraient les évêques. Seul Msg Miguel Hesaye,  évêque de Viedma,  reconnaissait que « pendant qu’on torturait, certains prêtres et évêques donnaient la communion aux tortionnaires ».

La sympathie de certains représentants de l’Eglise  pour les militaires putschistes et adeptes de la « doctrine française de la guerre antisubversive » est très largement documentée. Elle fut impulsée, dès les années 1950,  notamment par l’archevêque Antonio Caggiano, un proche de la Ciudad católica, qui fut longtemps vicaire des armées. C’est lui qui inaugura, le 2 octobre 1961, le cours interaméricain de guerre contrerévolutionnaire, organisée par Alcides Lopez Aufranc (qui étudia de 1957 à 1959 à l’école militaire de Paris) et les militaires français.

Opposant déclaré à Vatican II, comme ses collègues Msg Emilio Teodoro Grasseli, ou Adolfo Servando Tortolo, évêque de Paraná, qui présidait la conférence épiscopale au moment du coup d’Etat, ou Victorio Bonamín, il combattit avec virulence  la théologie de la libération, qu’avaient ralliée de nombreux prêtres argentins.

Il suffit de lire les témoignages réunis par la CONADEP – la Commission nationale des disparus- pour comprendre la complicité qui liait certains curés avec les militaires. Présidée par l’écrivain Ernesto Sábato, la CONADEP a auditionné des centaines de témoins qui ont permis de documenter la disparition de 8960 personnes.  Nombreux sont les survivants des centres de concentration clandestins qui ont rapporté la présence d’hommes en soutane pendant les séances de torture. De même les aumôniers militaires participèrent activement à la « formation » des officiers qui pratiqueront la « question » tout au long de la dictature. C’est, par exemple, ce que m’ont raconté  Julio César Urien  et Anibal Acosta, qui furent promus officiers de la Marine en 1972. Voici un extrait de mon film Escadrons de la mort: l’école française :

 

Voilà pour le contexte général, qui est, encore une fois, très documenté, grâce au travail de la CONADEP, mais aussi aux auditions réalisées lors du procès des chefs de la junte en 1985 [3] , grâce, enfin, à l’enquête très fouillée conduite par Horacio Verbitsky, qui fut le premier  à obtenir le témoignage d’un officier de la marine sur la pratique des « vols de la mort ».

Dans le livre El vuelo [4], l’ancien capitaine de corvette Francisco Scilingo raconte le rôle des prêtres, chargés du soutien psychologique des militaires, qui, chaque mercredi, à l’École mécanique de la marine (ESMA) participaient à l’assassinat d’une trentaine de (jeunes) « subversifs », en les balançant vivants à la mer, après les avoir préalablement endormis par une piqûre de penthotal.

C’est précisément parce que l’officier de la marine, aujourd’hui incarcéré, évoqua le rôle des hommes de l’Église dans la dictature qu’Horacio décida d’entreprendre une vaste enquête sur l’histoire de l’Église catholique argentine depuis la fin du du XIXème siècle, qu’il publia en cinq livres.

Pour écrire ce qui suit, j’ai relu El silencio[5], dont le sous-titre comprend le nom du nouveau pape : « De ¨Paul VI à Bergoglio : les relations secrètes de l’Église avec l’ESMA ». Horacio s’est basé sur les témoignages enregistrés par le tribunal fédéral qui jugea les responsables de la junte en 1985, sur les documents de la CONADEP, mais aussi les archives de l’Église, ainsi que sur les entretiens qu’il a lui-même conduits. C’est ainsi qu’il a interviewé Jorge Bergoglio, le 7 mai 1999, deux ans avant qu’il soit nommé cardinal par Jean-Paul II, dans les locaux de l’archevêché de Buenos Aires, situé face à la … Place de Mai. Autant dire que les prélats ne pouvaient ignorer le drame terrible vécu par des milliers de familles argentines, puisque c’est sur la place désormais légendaire que tous les jeudis se réunissaient les « mères de la place de mai » pour tourner désespérément sous les fenêtres de la Casa Rosada (le siège du gouvernement) afin de protester contre la disparition de leurs enfants.

La première partie du livre est proprement révoltante : elle met en scène Msg Emilio Teodoro Grasseli, qui fut longtemps le secrétaire du sinistre Antonio Caggiano, avant d’être nommé vicaire des armées.   Pendant la dictature, il était chargé des relations avec les familles, qui naturellement – l’Argentine est un pays très catholique- s’adressaient à l’Église, quand elles essayaient de retrouver la trace de leurs proches disparus. Pour accéder au prélat, les familles devaient passer par un poste de contrôle tenu par des militaires, à qui elles devaient présenter leurs papiers. Dans son livre, Horacio Verbitsky cite une vingtaine de témoignages qui rapportent unanimement la même séquence : lors de la rencontre, Grasseli consulte une liste établie par les militaires avec les noms des personnes séquestrées  : « Les personnes dont le nom est précédé d’une croix doivent être considérées comme mortes », explique-t-il avec une froideur qui tétanise les familles. Le prélat consulte la liste, pour finalement déclarer : « Je vous conseille malheureusement de ne plus chercher votre fils », ainsi qu’il l’a dit, par exemple, à la mère de Claudio Norberto Braverman , un lycéen de 17 ans, enlevé par un commando dans l’appartement familial.

La deuxième moitié du livre concerne  directement le pape François, alias Jorge Bergoglio, qui dirigeait alors l’ordre des jésuitesSan Miguel). C’est de lui que dépendait la Villa Belén du Bajo Flores où officiaient plusieurs prêtres de la Compagnie, dont Orlando Virgilio Yorio et Francisco Jalics, dans le cadre d’une communauté de base, se revendiquant de la théologie de la libération, très active dans les bidonvilles de Buenos Aires. Manifestement cette orientation au service des pauvres n’était pas du goût de l’archevêque Juan Carlos Aramburu qui au début du mois de mai de 1976 – soit six semaines après le coup d’Etat militaire- décida d’interdire le père Yorio de dire la messe.

Déjà en 1975, le prêtre avait été frappé d’une interdiction d’enseigner la théologie à l’université des jésuites de San Miguel,  à cause de son appartenance revendiquée  à la théologie de la libération. « Depuis le siège de la Compagnie à San Miguel, des  rumeurs couraient que j’étais communiste, subversif et guérillero et que je sortais avec des femmes » a-t-il rapporté à Horacio Verbitsky. [6]La rumeur n’était pas anodine : deux ans plus tôt, trois jésuites avaient été assassinés par les tueurs de la Triple A, une organisation paramilitaire dont les membres intégreront les escadrons de la mort de la junte militaire après le coup d’État.

Le 13 mai 1976, des officiers de la marine séquestrent à leur domicile ou sur leur lieu de travail cinq jeunes femmes catéchistes à la Villa Belén et les maris de deux d’entre elles. Parmi les victimes, il y a :

–       María Ester Lorusso ;

–       Mónica Quinteiro, une ex religieuse de 34 ans ;

–       María Marta Vásquez Ocampo, enceinte, et son mari César Amadeo Lugones ;

–       Mónica Candelaria, 24 ans, la fille de Emilio Fermín Mignone, un ancien militant de l’Action catholique, ancien ministre de l’Education, fondateur du CELS.

–       Beatriz Carbonell, et son mari, Horacio Pérez Weiss.

Les séquestrés sont conduits à l’ESMA encagoulés, avant d’être relâchés, quelques jours plus tard, sur le bord d’une autoroute, grâce à l’intervention de leurs proches (la plupart sont parents de militaires ).

Dix jours plus tard, très exactement le dimanche 23 mai 1976, un commando de … cent militaires débarque à la Villa Belén juste après la messe. Huit catéchistes sont « arrêtés » ainsi que Orlando Virgilio Yorio et Francisco Jalics.  « Vous n’êtes pas un guérillero, mais en vivant dans la Villa, vous unissez les pauvres, et ça c’est subversif » dit l’un des tortionnaires de l’ESMA au père Yorio, qui restera enfermé pendant six mois avec son collègue Jalics dans le camp de concentration où disparurent plus de quatre mille personnes (la plupart furent jetées à la mer).

La polémique qui entoure aujourd’hui le nouveau pape concerne très précisément son attitude face au sort des deux prêtres de la Villa Belén. Et là les témoignages recueillis par Horacio Verbitsky divergent. D’un côté, il y a celui de Alicia Oliveira, une ex avocate du CELS, ami de Jorge Bergoglio, qui affirme que le responsable jésuite a remué ciel et terre pour faire libérer les deux prêtres.  De son côté, le futur cardinal argentin, affirma à Horacio qu’il avait « agi dès le premier jour » et qu’il avait rencontré , « deux fois Videla et deux fois Massera, bien qu’il fût difficile d’obtenir une audience à cette époque. » [7]

Cette version est  contestée par la majorité des témoins, consultés par le journaliste-écrivain, dont un jésuite qui souligne que la « compagnie n’a jamais fait de dénonciation publique des enlèvements de prêtres ». Ce membre de la Compagnie qui parle sous couvert de l’anonymat donne pour exemple Juan Luis Moyano Llerena, un séminariste, torturé à l’ESMA, qui fut sauvé grâce à l’intervention de son père, un ex ministre de l’Economie.

Finalement, tout indique que les pères Yorio et Jalics furent libérés, après six mois de détention à l’ESMA, grâce à l’intervention du Vatican, alerté par Emilio Fermín Mignone et des jésuites européens : le premier se réfugiera à Rome, puis en Uruguay ; le second dans un monastère de Munich. 

Je traduis ici un long extrait de l’interview que le père Yorio a accordée à Horacio Verbitsky peu avant sa mort :

« Nous étions allés à la villa Belén avec l’accord et l’ordre de Bergoglio. Cela signifiait un engagement très fort avec de nombreuses personnes. Je travaillais avec trente catéchistes, dont certains sont aujourd’hui disparus, tous collaboraient avec le groupe de prêtres résidant dans la Villa ; dans notre maison passaient de nombreux religieux, prêtres et laïcs engagés avec les pauvres ; Jalics organisait des retraites spirituelles auxquelles participaient plus de cinq cents personnes par an. Quelques mois après notre installation dans la Villa, Bergoglio a commencé à nous dire qu’il subissait des pressions très fortes de Rome et d’Argentine pour que nous dissolvions notre communauté de base et que nous abandonnions la villa. En tant que directeur de l’ordre , il aurait pu nous ordonner de partir de là-bas, mais il ne voulait pas assumer une telle responsabilité. Il voulait que nous renoncions à nos engagements de manière volontaire , que nous assumions nous-mêmes d’abandonner les pauvres, alors que c’est lui qui nous avait confié cette mission. « Je ne peux pas vous défendre », nous disait-il. Il savait que je pouvais être tué, si l’Église cessait de nous protéger, comme il était arrivé à Mugica ou à l’évêque Angelelli. Finalement, Bergoglio est revenu de Rome avec une lettre du général des jésuites, Pedro Arrupe, qui nous ordonna de quitter la Villa dans les quinze jours. C’était à la fin de février 1976, le mercredi des cendres, juste avant le début du carême, après deux ans de pressions(…) J’ai fait remarquer à Bergoglio que c’était scandaleux et pas très courageux d’arrêter de manière aussi brutale tout le travail qui avait été mis en place. Il m’a répondu que la seule solution c’était que nous demandions à quitter la Compagnie. Si nous le faisions, il s’arrangerait pour nous laisser deux mois de plus dans la Villa, afin que nous puissions préparer notre départ correctement. C’est pourquoi nous avons demandé au général des Jésuites de quitter la Compagnie, mais nous n’avons jamais reçu de réponse. Pour pouvoir sortir de l’ordre, nous avions besoin qu’un évêque nous reçoive et nous protège. Nous avons passé deux mois à chercher un évêque volontaire. Plusieurs évêques nous ont reçus, mais finalement arrivait toujours une information les avisant de charges graves secrètes contre nous et ils renonçaient à nous accueillir dans leur diocèse. Quand nous demandions à connaître les motifs, ils nous répondaient qu’il fallait que nous nous adressions au supérieur de l’ordre. Quand j’ai dit à Bergoglio que le cardinal Juan Carlos Arumburu avait décidé de m’interdire de dire la messe, il m’a dit que c’était des bêtises et que je pouvais continuer à célébrer la messe en privé. Le vendredi,  l’évêque de Morón , Miguel Respanti, a accueilli dans son diocèse un autre prêtre jésuite du groupe, Louis Dourrón, mais il a refusé de me recevoir. Le dimanche suivant, le commando de la Marine nous a séquestrés. Des années plus tard, j’ai reçu un message de Arumburu me disant qu’il ne m’avait pas livré. Je n’ai aucun indice me permettant de penser que Bergoglio soit intervenu pour notre libération. Bien au contraire. Il a annoncé personnellement à mes frères que j’avais été fusillé pour qu’ils préparent ma mère à cette nouvelle. De son côté, Grasselli a dit aux prêtres de la Villa que Jalics et moi-même étions morts. Il y a eu plusieurs messes mortuaires qui ont été dites en ma mémoire. Le New York Times a publié la nouvelle de notre mort, ainsi que la Croix Rouge Internationale ; la famille de Jalics a célébré ses funérailles. Après mon arrivée à Rome,  le secrétaire du général des jésuites m’a ouvert les yeux. Le père Gavigna, qui était colombien comme le successeur de Bergoglio, Alvaro Restrepo, avait séjourné en Argentine, où il fut responsable des novices, il me connaissait bien. Il m’a informé que j’avais été expulsé de l’ordre. De plus, il m’a raconté que l’ambassadeur argentin auprès du Vatican lui avait dit que le gouvernement prétendait que nous avions été capturés par les forces armées, parce que nos supérieurs hiérarchiques l’avait informé qu’au moins l’un d’entre nous était guerillero. Gavigna lui demanda d’écrire cela par écrit, ce que l’ambassadeur fit ».

Horacio Verbitsky écrit qu’il n’a pas retrouvé la trace de ce document dans les archives. En revanche, il a découvert trois documents troublants qui expliquent le titre du chapitre où il raconte l’histoire des deux prêtres jésuites : « La double face du cardinal ».

Daté du 4 décembre 1979, et signé de Bergoglio, le premier est plutôt en faveur du futur pape. Dans ce courrier adressé au « directeur national du culte » (un membre de la junte militaire) le chef des jésuites explique que Francisco Jalics « travaille actuellement dans le sud de l’Allemagne » et qu’il a « renouvelé son passeport le 27 février 1978 ». Or, pour prolonger son visa, le prêtre aurait dû revenir en Argentine. « Pour éviter un voyage aussi cher », Jorge Bergoglio suggère que le renouvellement soit effectué depuis Buenos Aires. En lisant ce texte, on se dit que le responsable jésuite veut ainsi protéger le prêtre d’un retour en Argentine qui pourrait s’avérer dangereux…


 

Dans les archives de l’archevêché, Horacio Verbitsky a retrouvé deux documents qui jettent une ombre sur l’attitude du responsable jésuite. Deux semaines après la lettre de Bergoglio, Anselmo Orcoyen, le directeur du culte au sein du ministère des affaires étrangères, rédige une note intitulée « Padre Francisco Jalics », dans laquelle on peut lire :

« –  Activité dissolue dans des congrégations religieuses féminines (conflits d’obéissance)

–       Détenu à l’École mécanique de la marine du 24 mai 1976 à novembre 1976 (six mois), accusé avec le père Yorio de contacts suspects avec des guérilleros.

–       Vivaient dans une petite communauté que le supérieur jésuite a dissoute en février 1976 mais ont refusé d’obéir en demandant leur sortie de la Compagnie (…) Aucun évêque de Buenos Aires n’a accepté de les accueillir ».

Puis suit un Nota Bene : « Ces informations ont été communiquées à Mr. Orcoyen par le propre père Bergoglio qui a signé la note en recommandant spécialement que ne soit pas donné suite à sa demande »…

Dans la même boîte d’archives, Horacio Verbitsky a retrouvé un rapport rédigé par un membre des services de renseignement. Intitulé « Le nouveau comportement des jésuites argentins« , il dit:

« Malgré les efforts du père Bergoglio, la Compagnie en Argentine n’a pas été nettoyée. Les jésuites de gauche se sont calmés pendant quelque temps. Mais maintenant, avec le soutien conséquent de l’extérieur et de certains évêques tiers-mondistes ils ont commencé une nouvelle étape ».

 

[1] J’invite les internautes à consulter mon Blog (rubrique « Escadrons de la mort : l’école française ») ou mon site personnel  :

http://wp.arte.tv/robin/

http://www.mariemoniquerobin.com/crbst_21.html

Mon livre a été édité par les Editions La Découverte qui a publié une version poche.

[2] Aujourd’hui, la Cité catholique s’appelle le Centre de formation à l’action civique et culturelle selon le droit naturel et chrétien, qui est considéré comme l’antenne française de l’Opus Dei. Christine Boutin, deputée UDF des Yvelines, en est une membre assidue.

[5] Horacio Verbitsky, El silencio. De Paulo VI a Bergoglio, les relaciones secretas de la Iglesia con la ESMA, Editorial Sudamericane, Buenos Aires, 2005.

[6] L’entretien a eu lieu le 6 mai 1999 . Yorio est mort un an plus tard en Uruguay où il s’était réfugié.

[7] Eduardo Massera était le chef de la Marine et patron de l’ESMA.


Notre poison quotidien sort en poche

Pour ceux et celles qui n’auraient pas lu Notre poison quotidien, il est encore temps de se rattraper!

Le livre sort effectivement en poche dans les jours qui viennent. Je mets en ligne la postface que mon éditeur La Découverte m’a demandé de rédiger. Bonne lecture!

Postface à l’édition de 2013

 

« Il y a quelque chose de profondément malsain dans la manière dont nous vivons aujourd’hui. Nous sommes assaillis de pathologies mortifères provoquées par les inégalités d’accès à un environnement sûr, à la santé ou à l’eau potable. Elles sont aggravées par les actions politiques de court terme et un discours de division sociale fondé sur l’adoration de la richesse. » Ces mots sont ceux de Jacqueline McGlade, directrice exécutive de l’Agence européenne de l’environnement (AEE), dans la préface d’un rapport qui a fait l’effet d’une bombe lors de sa publication le 23 janvier 2013[1], tant son ton tranche avec le langage poli et lisse caractérisant habituellement ce genre de document. Intitulé Signaux précoces et leçons tardives. Science, précaution, innovation, ce « rapport choc » de 750 pages, « pointe les failles béantes du système de régulation sanitaire et environnementale en vigueur, en Europe comme ailleurs », ainsi que l’écrit Le Monde[2].

Pour étayer leur réquisitoire, les experts de l’AEE ont décortiqué l’histoire de quinze produits chimiques, qui constituent précisément la matière de Notre poison quotidien : Bisphénol A, DDT, essence au plomb ou insecticides. Et, à chaque fois, ils dressent le même constat : « Des risques importants pour la santé des populations ou l’environnement ont été ignorés, cachés ou relativisés, et se révèlent finalement coûteux pour la collectivité[3]. » La publication de ce rapport a été plusieurs fois repoussée, en raison des pressions exercées par les industriels – dont Bayer, fâché que l’on mette en cause ses poisons agricoles, comme le Gaucho ou le Cruiser (deux insecticides suspectés notamment d’exterminer les abeilles).

Paul François gagne son procès contre Monsanto

Deux ans après la sortie de Notre poison quotidien, les choses bougent enfin, lentement mais sûrement… Mon livre (et film) a-t-il contribué à cette évolution ? En tout cas, mon enquête a fait la une de cinq magazines – L’Express, Télérama, Le Nouvel Observateur, Témoignage chrétien et… L’Usine nouvelle, qui avait placé sur la couverture de son édition du 7-13 avril 2011 une photo de mon livre, avec ce titre : « Le livre qui empoisonne l’industrie chimique. »

Trois semaines plus tôt, la diffusion du documentaire avait décroché un record d’audience sur Arte (1 250 000 téléspectateurs et 4,8 % de parts de marché), tandis que dans mon bureau s’accumulait une revue de presse exceptionnelle : elle pèse plus de quatre kilos ! Il faut dire que, motivés par la « cause » qu’incarne mon investigation, les services de presse d’Arte et de La Découverte n’ont pas lésiné sur les moyens. Le 17 janvier 2011, était organisée au Club de l’Étoile, à Paris, une avant-première du documentaire, à laquelle ont participé quelque quatre-vingts journalistes. Avant la projection, j’avais rendu hommage à Yannick Chenet (voir supra, chapitre 4), décédé deux jours plus tôt des suites de sa leucémie, et j’avais présenté Paul François (voir supra, chapitre 1), qui avait ainsi pu entrer en contact avec les principaux médias français. Le 19 mars, l’agriculteur charentais était élu président de l’association Phyto-Victimes, créée à Ruffec par une soixantaine d’agriculteurs malades. Une première mondiale. Comptant aujourd’hui plus de deux cents membres, cette association vise à rassembler les agriculteurs qui, partout en France, souffrent de pathologies liées à l’utilisation des pesticides, pour mener des actions collectives – y compris judiciaires – à destination des pouvoirs publics et des fabricants de poisons agricoles. Et puis, le 28 février 2012, la nouvelle défrayait la chronique nationale et internationale : le tribunal de grande instance de Lyon condamnait Monsanto à indemniser Paul François pour les graves troubles neurologiques causés par son intoxication au Lasso.

Quelques mois plus tôt, le 1er juin 2011, la Commission supérieure des maladies professionnelles en agriculture (COSMAP) avait elle aussi pris une décision historique en approuvant l’intégration de la maladie de Parkinson dans le tableau des maladies professionnelles de la Sécurité sociale. Confirmé par un décret publié le 4 mai 2012 au Journal officiel, ce vote n’avait pourtant pas fait l’unanimité : sur les vingt-quatre membres de la COSMAP, il y eut dix-neuf voix pour, une abstention et quatre voix contre, dont celles de la FNSEA et de Coop de France (voir supra, chapitre 4) ! Pourquoi le principal syndicat agricole s’est-il opposé à ce que la maladie de Parkinson soit officiellement reconnue comme une maladie professionnelle des agriculteurs ? Sans doute – mais ce n’est qu’une hypothèse – parce que la FNSEA est très liée aux coopératives agricoles qui gagnent énormément d’argent avec la vente des poisons chimiques. Et peut-être aussi parce que les promoteurs invétérés du modèle agroindustriel craignent que les paysans malades se retournent contre les fabricants et les vendeurs d’« élixirs de mort », ainsi que leurs relais syndicaux qui continuent de pratiquer la politique de l’autruche.

Il serait pourtant temps que ceux-ci se réveillent, car la roue tourne et continuer dans le déni pourrait leur coûter très cher. Le temps où l’on pouvait affirmer, la main sur le cœur, que « les dangers des pesticides ne sont pas prouvés » est bel et bien révolu. Depuis que j’ai écrit ce livre, de nouvelles études ont confirmé que des doses infimes de pesticides, telles qu’on les retrouve dans les aliments, peuvent constituer une véritable bombe chimique, en raison de l’« effet cocktail » (voir supra, chapitre 19).

L’une d’entre elles, publiée le 3 août 2012 par PloS One, a été conduite par le toxicologue Michael Coleman, de l’université d’Aston (Angleterre), comme l’expliquait Le Monde : « Son équipe a comparé l’effet isolé et l’impact combiné, sur des cellules de notre système nerveux central, de trois fongicides fréquemment rencontrés sur les étals des primeurs, le pyriméthanil, le cyprodinil et le fludioxonil ». Résultat : les dommages infligés aux cellules sont jusqu’à vingt ou trente fois plus sévères lorsque les pesticides sont associés.Des substances réputées sans effet pour la reproduction humaine, non neurotoxiques et non cancérigènes ont, en combinaison, des effets insoupçonnés”, résume l’un des auteurs de l’étude, le biologiste moléculaire Claude Reiss, ancien directeur de recherche au CNRS et président de l’association Antidote Europe. “On observe l’aggravation de trois types d’impacts”, détaille le chercheur français : “La viabilité des cellules est dégradée ; les mitochondries, véritables “batteries” des cellules, ne parviennent plus à les alimenter en énergie, ce qui déclenche l’apoptose, c’est-à-dire l’autodestruction des cellules ; enfin, les cellules sont soumises à un stress oxydatif très puissant, possiblement cancérigène et susceptible d’entraîner une cascade d’effets”[4]. » Les auteurs de l’étude citent « parmi les conséquences possibles de telles agressions sur les cellules », « le risque d’une vulnérabilité accrue à des maladies neurodégénératives comme Alzheimer, Parkinson ou la sclérose en plaques ». Cela est d’autant plus inquiétant qu’une autre étude, publiée en juillet 2012 par la revue Environmental Health Perspectives, a montré que l’on retrouvait les molécules actives des pesticides, en petites doses, dans les moquettes et tapis de maisons situées à près d’un kilomètre et demi des zones d’épandage[5]

Pesticides et perturbateurs endocriniens : les avancées des rapports du Sénat français

Ce que j’ai écrit dans ce livre sur la dangerosité des pesticides a été largement repris en France par la Mission d’information du Sénat sur les pesticides et leur impact sur la santé et l’environnement, qui a publié un rapport exemplaire en octobre 2012[6]. À l’origine de cette initiative : Nicole Bonnefoy, une députée socialiste de Charente que j’avais rencontrée lors d’une projection de mon film Notre poison quotidien dans son département, avec la participation de Paul François.

Présidée par Sophie Primas (UMP), la mission sénatoriale a procédé à quatre-vingt-quinze auditions et entendu deux cent cinq personnes. Pour ma part, j’ai été auditionnée en juin 2012. Consultable sur le site du Sénat, le rapport extrêmement fouillé fait quatre constats dûment étayés : « Les dangers et les risques des pesticides pour la santé sont sous-évalués ; le suivi des produits après leur mise sur le marché n’est qu’imparfaitement assuré au regard de leurs impacts sanitaires réels et les effets des perturbateurs endocriniens sont mal pris en compte ; les protections contre les pesticides ne sont pas à la hauteur des dangers et des risques ;  les pratiques industrielles, agricoles et commerciales actuelles n’intègrent pas toujours suffisamment la préoccupation de l’innocuité pour la santé lors du recours aux pesticides. »

D’aucuns argueront que ce rapport ne changera pas la face du monde, car les sénateurs ont peu de pouvoir… Certes. Mais il faut mesurer le chemin parcouru : au moment où j’écrivais ce livre, les élus se contentaient généralement de répéter la propagande martelée par les industriels : « Les pesticides sont très bien testés. » Ce rapport doit être pris pour ce qu’il est : la synthèse étayée d’une prise de conscience des politiques, dont on peut espérer qu’elle débouchera tôt ou tard sur des mesures concrètes. Il en est de même pour les perturbateurs endocriniens, dont les élus ignoraient jusqu’à l’existence il y a peu encore. Or, en juillet 2011, le sénateur Gilbert Barbier (apparenté UMP) rendait public un rapport intitulé Les Perturbateurs endocriniens, le temps de la précaution[7].

Agissant à la demande de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, le chirurgien de Franche-Comté et vice-président de la commission des affaires sociales du Sénat m’avait auditionnée le 7 juin 2012, en présence de son assistant parlementaire. « Nous vous remercions pour l’énorme travail que vous avez fourni, m’avait-il dit, en désignant mon livre, dont il avait marqué de nombreuses pages avec des stickers jaunes. Nous sommes convaincus que les perturbateurs endocriniens représentent un énorme enjeu de santé publique. »

De fait, dans son rapport, le sénateur Barbier retrace brillamment tout ce qui constitue la matière de ce livre, en plantant d’emblée le décor : « La question d’une recrudescence, voire d’une “épidémie”, de maladies environnementales est clairement posée aujourd’hui », écrit-il dans son introduction, où il précise qu’il « s’intéressera à deux groupes principaux de pathologies : les cancers et les problèmes de fertilité ». Concernant le cancer de la prostate, il note « une très forte augmentation de 5,3 % par an entre 1975 et 2000, soit une quasi-multiplication par quatre du nombre de cas ». De même, il constate que « le cancer du sein est le plus fréquent chez la femme au niveau mondial (22 %). Il s’agit d’un cancer des pays développés, puisque le rapport est de 1 à 5 entre les pays occidentaux et les pays d’Afrique et d’Asie, à l’exception du Japon. […] En France, le nombre de cancers du sein a plus que doublé depuis 1980, passant de 21 000 à près de 50 000. Il représente 36 % des nouveaux cancers féminins. En éliminant l’effet de l’âge, l’incidence a doublé en France, passant de 56,8 à 101,5 pour 100 000, soit une hausse de 2,4 % par an. Le risque de développer un cancer du sein est passé de 4,9 % pour une femme née en 1910 à 12,1 % pour une femme née en 1950 ».

Le sénateur Barbier souligne aussi que, contrairement à ce qu’affirme la doxa industrielle, l’épidémie d’obésité qui frappe les nations riches et émergentes n’est pas due exclusivement à la « malbouffe » et au manque d’exercice, mais beaucoup aussi à la pollution chimique : « Depuis le début des années 1980, constate-t-il, les données relatives à la fréquence de l’obésité paraissent littéralement s’envoler. Cette évolution très rapide et générale exclut les explications génétiques et paraît induire une causalité environnementale. » Après avoir rappelé l’affaire du distilbène (voir supra, chapitre 17), puis décrit l’origine et le mode de fonctionnement des hormones de synthèse, le rapporteur dresse le bilan de leurs effets dévastateurs sur le système de reproduction, notamment des sujets mâles : baisse de la quantité et de la qualité du sperme, malformations congénitales (cryptorchidie, hypospadias) et cancer des testicules (voir supra, chapitre 16)[8]. Enfin, après avoir cité Rachel Carson et Theo Colborn (voir supra, chapitres 3 et 16), Gilbert Barbier s’interroge sur la nécessité d’une « révolution toxicologique », en retraçant l’histoire de la dose journalière acceptable (DJA) – où il s’appuie largement sur mon livre – et en évoquant longuement le rôle des « faibles doses » et de l’« effet cocktail » qui nécessitent un « changement de paradigme ».

Si la lecture du rapport m’a évidemment réjouie, en constatant que les élus prenaient enfin la mesure de l’urgence sanitaire actuelle, les solutions préconisées pour y remédier m’ont en revanche laissée perplexe. « Votre rapporteur propose de s’inspirer de ce qui a été fait pour le tabac ou pour l’alcool », écrit ainsi le chirurgien franc-comtois, qui recommande d’apposer un pictogramme – une femme enceinte de profil barrée d’une croix rouge – sur tous les produits contenant des perturbateurs endocriniens : « Ce pictogramme devrait avoir pour effet d’inciter les femmes concernées à éviter ces produits et les industriels à proposer des produits de substitution. », explique-t-il. Passablement énervée par ces conclusions, j’avais rédigé ce commentaire sur mon blog : « C’est ce que j’appelle une “demi-mesure” ou, pour être plus triviale, une “mesure de poule mouillée”… »

Lors de mon audition, j’avais fait remarquer que s’en tenir à l’étiquetage mettant en garde les femmes enceintes contre des produits hautement toxiques – au lieu de les interdire totalement – pour leur bébé était une « mauvaise mesure », car elle instituerait une discrimination dans la protection. En effet, nombreuses sont les femmes qui savent à peine lire ou qui ne prennent pas la peine de lire les étiquettes, car leur préoccupation est d’abord de nourrir leur famille au moindre coût. Le devoir des élus est de prendre des mesures qui protègent toute la population : maintenir sur le marché des substances qui ont tous les effets terribles décrits dans le rapport est donc tout simplement irresponsable. L’objectif de cette « manœuvre » semble bien de laisser le temps aux industriels de s’organiser pour trouver des substances de substitution, afin de préserver leurs profits. Mais que les élus le sachent : attendre, c’est aussi courir le risque de devoir rendre des comptes, en creusant davantage encore la méfiance qui prévaut entre les citoyens et leurs représentants.

Depuis, une nouvelle étude (publiée par la revue Human Reproduction en décembre 2012[9]) a confirmé qu’il fallait agir de toute ugence : portant sur 26 000 hommes français ayant participé à un Programme d’assistance à la procréation (AMP) entre 1989 et 2005, elle a révélé qu’en dix-sept ans, la concentration des éjaculats – qui se mesure en millions de spermatozoïdes par millilitre de sperme – avait diminué de 32,2 %, soit une réduction continue de 1,9 % par an.

Le Bisphénol A interdit dans les récipients alimentaires

Comme on l’a vu dans ce livre, la perte de fertilité des mâles occidentaux est largement due à l’exposition à de faibles doses de perturbateurs endocriniens, parmi lesquels les phtalates (utilisés dans les plastiques et les parfums), les alkyphénols (détergents, parfums, retardateurs de flammes) et les parabènes (produits cosmétiques et pharmaceutiques). Et là, il y a – enfin ! – une bonne nouvelle en France. En mai 2011, à la surprise générale, une proposition de loi du centriste Yvan Lachaud, visant l’interdiction de ces trois substances, a été adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale à une courte majorité (236 voix pour et 222 contre, grâce à quelques « voix égarées » de l’UMP). Quatre mois plus tard, le 28 septembre 2011, la même Assemblée votait à une large majorité une autre proposition de loi interdisant à partir du 1er janvier 2014 la fabrication et la commercialisation de récipients alimentaires (comme les boîtes de conserves) comprenant du Bisphénol A (BPA), l’un des principaux perturbateurs endocriniens (voir supra chapitre 18).

Malheureusement, après avoir fait la navette entre les deux chambres, la loi a été revue à la baisse. En décembre 2012, le Sénat a confirmé l’interdiction, mais en repoussant son délai d’application : le BPA sera banni des contenants alimentaires à destination des enfants de 0 à 3 ans dès la promulgation du texte en 2013 et à tous les autres contenants au… 1er janvier 2015. « Cette limite de la loi ne doit pas masquer le fait que cette décision fait de la France le premier pays au monde à prendre une telle mesure, a alors commenté le Réseau environnement santé (RES). Il reste à agir sur les autres sources de contamination au BPA : revêtement des canalisations d’eau, ciments dentaires, dispositifs médicaux. […] Malgré ses limites, c’est donc un signal fort qui est envoyé aux industriels pour que la question des perturbateurs endocriniens soit prise au sérieux et que leur substitution soit recherchée de façon systématique[10]. »

De fait, certains industriels ont déjà anticipé, en faisant de l’absence de BPA dans leurs produits un argument publicitaire. C’est ainsi que les magasins U ont annoncé qu’ils avaient banni le BPA du papier de leurs tickets de caisse, mais aussi de tous les récipients alimentaires commercialisés par la chaîne : « Les magasins U sont plus que jamais certains de faire aujourd’hui ce que tout le monde fera demain, clamait ainsi un encart publicitaire publié sur une pleine page dans plusieurs quotidiens. N’attendons pas que la loi nous impose de le supprimer. »

Notons au passage le changement d’attitude de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’environnement et du travail (ANSES), qui, dans un rapport publié le 27 septembre 2011, reconnaissait – enfin ! – que le BPA avait des effets « avérés » sur l’animal de laboratoire, parmi lesquels « l’altération de la production spermatique, la survenue accrue de kystes ovariens et de lésions des glandes mammaires ou encore l’avancement de l’âge de la puberté chez les femelles ». Ayant provoqué un véritable « coup de tonnerre »[11], le rapport de l’agence française a placé dans l’embarras son homologue européenne – l’EFSA, dont j’ai longuement parlé dans ce livre –, qui, pour l’heure, continue de nier le danger des faibles doses de BPA. Il en est de même de l’Académie de médecine, dont j’ai souligné les liens avec l’industrie (voir supra, chapitre 10). Dans un rapport rendu public le 10 novembre 2011, la vénérable institution a jugé l’interdiction du BPA et des phtalates « prématurée », mais n’en pas moins fait toute une série de mises en garde destinées aux « personnes à risques », comme les « jeunes enfants, les personnes atteintes d’un cancer hormono-dépendant, les femmes enceintes ou allaitantes ». Parmi ces recommandations, qui ne sont guère rassurantes, on peut lire : « Interdire de chauffer directement les aliments dans les emballages plastiques » ; « interdire de stocker longtemps et à température élevée des eaux minérales dans les bouteilles plastiques libérant des phtalates » ; « conseiller aux caissières manipulant des tickets de caisse thermiques de porter des gants, surtout si elles sont enceintes »…

Haro sur les conflits d’intérêts : les errements de l’EFSA

« Seriez-vous disposée à venir témoigner devant le Parlement européen ? » Cette question m’a été posée par Corinne Lepage, députée européenne et vice-présidente du Parlement européen, qui m’a contactée le lendemain de la diffusion de Notre poison quotidien sur la RTBF. En vertu d’un accord de coproduction, la télévision publique belge avait été autorisée à diffuser le film six semaines avant Arte. Interpellée par le contenu de mon enquête, la fondatrice du CRIIGEN (Comité de recherche et d’information indépendante sur le génie génétique) avait décidé de s’attaquer au dossier de l’aspartame. C’est ainsi qu’elle a organisé une audition au Parlement européen, qui s’est tenue à Bruxelles le 16 mars 2011, le jour de la diffusion du film sur Arte.

Étant très prise par les nombreuses interviews suscitées par mon investigation, je n’ai malheureusement pas pu participer à cette audition, qui fut très instructive. Parmi les personnes auditionnées, il y eut notamment Hugues Kenigswald, le chef de l’Unité des additifs alimentaires de l’EFSA (voir supra, chapitre 15), qui a reconnu devant les députés de l’Union que la DJA européenne de l’aspartame était fondée sur les études hautement controversées (et jamais publiées) de Searle. Conséquence : le Parlement européen a demandé à la Commission européenne de saisir l’EFSA pour qu’elle effectue une réévaluation de la sécurité de l’aspartame. Normalement, cette « réévaluation » était prévue en… 2020, mais l’agence européenne a dû obtempérer, en avançant le processus.

« En mai 2011, la Commission européenne a invité l’EFSA à anticiper la réévaluation complète de la sécurité de l’aspartame (E 951), écrit ainsi l’agence sur son site <www.efsa.europa.eu>. Il était prévu à l’origine que cette réévaluation soit achevée en 2020. L’examen de cet édulcorant individuel est programmé dans le cadre de la réévaluation systématique de tous les additifs alimentaires ayant été autorisés dans l’UE avant le 20 janvier 2009, comme prévu par le règlement (UE) n° 257/2010. L’EFSA a accepté ce mandat et elle a organisé un appel public destiné à recueillir des données scientifiques, ainsi qu’un examen approfondi de la littérature scientifique disponible. L’EFSA a pu accéder à un grand nombre d’études scientifiques et d’ensembles de données, publiées ou non, à la suite de cet appel de données qui s’est clôturé le 30 septembre 2011. Dans un souci réitéré d’ouverture et de transparence, l’EFSA a publié la liste complète de ces études scientifiques et elle a également rendu publiques des données scientifiques non publiées à ce jour, notamment les 112 documents originaux sur l’aspartame qui avaient été soumis en tant qu’éléments justificatifs dans le cadre du processus de demande d’autorisation de l’aspartame en Europe au début des années 1980. » Au moment où j’écris ces lignes, j’apprends que l’« échéance pour la réévaluation de l’aspartame » a été fixée à… mai 2013.

On aura remarqué le ton quelque peu embarrassé de l’agence européenne, qui souligne son « souci réitéré d’ouverture et de transparence ». Il faut dire que, depuis la sortie de ce livre où j’ai longuement épinglé les conflits d’intérêts qui caractérisent de nombreux « experts » des agences de réglementation, l’EFSA a été régulièrement montrée du doigt.

Début 2012, José Bové, député européen d’Europe Écologie-Les Verts, a ainsi rapporté dans une conférence de presse que Diana Banati, la présidente du conseil d’administration de l’EFSA, avait « oublié » de mentionner dans sa déclaration de conflit d’intérêts qu’elle siégeait au conseil de direction scientifique de la branche européenne de l’International Life Sciences Institute (ILSI), le lobby de l’industrie agroalimentaire dont j’ai révélé l’histoire et les méthodes (voir supra, chapitres 12 et 15).

En mai 2012, devant l’émoi suscité par cette affaire largement médiatisée, « l’EFSA a demandé à Mme Banati de partir », selon un communiqué de la Commission européenne[12]. Pas de problème ! La scientifique hongroise a été aussitôt embauchée comme directrice exécutive de la branche européenne de l’ILSI (un « choix de carrière », selon elle) ! Dans le même communiqué, la Commission précisait « regretter que Mme Banati passe directement de l’EFSA à l’ILSI »… Si Diana Banati a bien été contrainte de démissionner, six autres membres du conseil d’administration de l’EFSA ont, en revanche, été épargnés, malgré leurs liens avérés avec l’ILSI. C’est ce qu’a montré un rapport de la Cour des comptes européenne d’octobre 2012, qui, du coup, s’interrogeait sur cette « différence de traitement »…

En janvier 2012, l’EFSA s’était déjà retrouvée sur la sellette en raison de sa tendance à ignorer la trop grande proximité de ses membres avec… l’ILSI. On découvrait que l’Institut créé par la firme américaine Coca-Cola au début des années 1980 (supra chapitres 12, 13 et 15) promouvait une nouvelle méthode d’évaluation de la toxicité des molécules contaminant la chaîne alimentaire (résidus de pesticides, d’additifs et d’emballages alimentaires). Baptisée « seuil de préoccupation toxicologique » (threshold of toxicological concern, ou TTC), cette méthode serait du pain bénit pour les industriels. Elle propose en effet de ne rendre les tests toxicologiques obligatoires qu’au-delà d’un seuil que les industriels définiraient en s’appuyant sur les ressemblances chimiques des molécules. Cette « méthode » avait déjà été avancée par l’AFSSA pour justifier l’absence d’études des effets du BPA sur le fœtus, en arguant que celles-ci n’étaient pas nécessaires, puisque la molécule était proche de celle du paracétamol (voir supra, chapitre 18) ! Devant l’insistance de l’ILSI pour imposer cette nouvelle « méthode », l’EFSA avait décidé de constituer un groupe de travail confié à Susan Barlow, une consultante de… l’ILSI, qui a aussi travaillé pour PepsiCo, Pfizer, Rio Tinto, Plastics Europe ou Philipp Morris ! Cette « experte » de l’agence européenne a donc constitué un « comité », comprenant treize experts, dont dix avaient participé à l’élaboration du TTC pour l’ILSI et huit travaillaient directement pour le fameux institut !

On le voit : depuis la première publication de ce livre, des avancées indéniables ont été réalisées et, petit à petit, les agences de réglementation sont poussées à rendre des comptes sur leurs pratiques et décisions. Quant aux responsables politiques, ils commencent à prendre conscience que si l’on veut stopper l’épidémie de maladies chroniques qui frappe la population et plombe les comptes de la Sécurité sociale, il faut s’attaquer à ses vraies causes, en revoyant de fond en comble le système de réglementation des produits chimiques et en activant le principe de précaution, dès qu’un doute raisonnable existe sur la toxicité d’une molécule. Et, faut-il le rappeler : en matière de sécurité sanitaire, le doute devrait toujours bénéficier aux citoyens et non aux industriels, comme c’est le cas aujourd’hui…

Pour finir, je voudrais rendre hommage à l’énorme travail réalisé par le Réseau environnement santé (RES) animé par André Cicollela, qui, à l’instar du Mouvement pour les générations futures de François Veillerette, ne baisse jamais la garde, en poursuivant sans relâche un seul objectif : la protection des citoyens et de la vie...


[1] European Environment Agency, Late Lessons from Early Warnings. Science, Precaution, Innovation, <www.eea.europa.eu>, 23 janvier 2013.

[2] Paul Benkimoun et Stéphane Foucart, « Bisphénol A, pesticides… L’Europe admet les failles de sa sécurité sanitaire », Le Monde, 24 janvier 2013.

[3] Ibid.

[4] Grégoire Allix, « L’inquiétant effet cocktail des pesticides sur nos molécules », Le Monde, 8 août 2012.

[5]

[6] Nicole Bonnefoy, Pesticides : vers le risque zéro. Rapport d’information n° 42 (2012-2013) fait au nom de la Mission commune d’information sur les pesticides, <www.senat.fr>,  10 octobre 2012.

[7] Gilbert Barbier, Perturbateurs endocriniens, le temps de la précaution. Rapport d’information n° 765 (2010-2011) fait au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, <www.senat.fr>, 12 juillet 2011. Pour établir son rapport, le sénateur a auditionné soixante personnes.

[8] Le sénateur Barbier cite longuement, à ce sujet, le rapport Reproduction et Environnement de l’Inserm du 14 avril 2011, publié peu après la première édition de ce livre.

[9]

[10] Réseau environnement santé, « Interdiction du Bisphénol A dans les contenants alimentaires : le RES salue une avancée historique », <http://reseau-environnement-sante.fr>, 13 décembre 2012.

[11] Stéphane Foucart, « Bisphénol A, les dessous d’un scandale sanitaire », Le Monde, 29 octobre 2011.

[12] « La présidente de l’EFSA pas limogée ? », Le Figaro.fr (avec l’AFP), 11 mai 2012.