Je suis de nouveau invitée au Canada

La décision de Monsanto d’arrêter la production de l’hormone de croissance laitière a provoqué beaucoup de remous au Canada où je suis invitée pour trois nouvelles journées marathon les 16, 17 et 18 septembre.
Ma nouvelle visite est coordonnée par les sociologues Louise Vandelac, chercheuse au Cinbiose (Centre de recherche interdisciplinaire sur la biologie, la santé, la société et l’environnement de l’Université de Québec) qui a préfacé l ‘édition canadienne de mon livre et Pierre Beaudet (Université d’Ottawa) , en collaboration avec Greenpeace, l’Office national du film canadien (ONF) et Stanké, mon éditeur canadien.
Je rappelle que j’avais déjà été au Québec en mai dernier pour lancer le film en salle (10 000 entrées à ce jour, ce qui est un très bon résultat pour un documentaire au Québec) et le livre (6500 exemplaires vendus, également un très bon résultat).

Voici comment Louise Vandelac présente à ses partenaires l’objectif de ma nouvelle visite qui coïncidera avec le lancement du DVD en français et anglais au Canada:

« Cela tournera autour d’une demande de révision en profondeur de tout le processus réglementaire des OGM au Canada. Le livre et le film de Marie-Monique Robin montrent en effet avec éloquence qu’il n’y a jamais eu d’évaluation rigoureuse des OGM et quand on voit l’ancien ministre américain de l’agriculture avouer qu’on a procédé trop rapidement sans toutes les études nécessaires et qu’il a lui-même été soumis à de très nombreuses pressions, un telle demande s’impose d’elle-même…

On soulignera aussi sans doute que c’est grâce au travail attentif de 3 chercheurs de Santé Canada, par ailleurs congédiés pour ce fait d’arme…( on n’en est pas à un paradoxe près…) que le Canada a pu éviter de doper les vaches à la STbr (somatotrophine bovine recombinante) et que l’Europe a refusé la BST. Il est vrai que le film et le livre de Marie-Monique Robin qui consacre un brillant chapitre à ces questions a sans doute joué également dans le tout récent retrait du marché américain de la BST par Monsanto après 10 ans de diffusion approuvée par la FDA. »

Pour ces trois journées marathon, sont prévues de projections débats devant le Congrès d’Ottawa, les chercheurs et étudiants de l’université d’Ottawa et de Montréal, une rencontre avec des chefs d’entreprises, des émissions de radio et télé (dont à Tout le monde en parle).

Des internautes m’ont demandé ce qui avait bien pu justifier l’ incroyable décision de Monsanto d’arrêter la production de l’hormone transgénique. Parmi les raisons invoquées, il y a la pression des actionnaires, l’existence possible d’une étude montrant les effets néfastes du lait provenant des vaches piquées à l’hormone, l’annonce récente par Starbucks, la grande chaîne de distribution des Etats Unis de n’utiliser dans ses cafés que du lait naturel, et, bien sûr, les campagnes réalisées par les associations de consommateurs.

Je joins le communiqué de Greenpeace Canada annonçant cette victoire dont on n’a pas fini de parler: je rappelle que d’après des estimations concordantes, la moitié des vaches américaines sont actuellement piquées à l’hormone et que le jour où elles cesseront de l’être, les malheureuses bêtes seront victimes de ce qu’on appelle « le crack de la vache »: en manque de la drogue, elles s’effondreront comme des loques et devront être envoyées à l’abattoiroù elles finiront en hamburgers (à moins que la Food and Drug Administration décide que leur viande n’est pas consommable, ce qui d’un point de vue sanitaire serait tout à fait logique …)

Montréal, le 08 août 2008.
Les pressions provenant de partout dans le monde ont forcé Monsanto d’annoncer qu’elle se retirait de la fabrication de l’hormone somatotrophine bovine recombinante (STbr), une substance génétiquement modifiée destinée à rendre les vaches laitières plus productives.

La décision de Monsanto d’abandonner l’hormone STbr aux États-Unis survient après que les consommateurs de nombreux pays et les marchés internationaux eurent exprimé leur opposition au lait produit avec une hormone de croissance génétiquement modifiée. Des entreprises comme Safeway, Starbucks et Kraft ont récemment annoncé qu’elles retiraient le lait produit avec l’hormone STbr aux États-Unis. Le lait et les fromages faits avec l’hormone SBbr ont été interdits au Canada et en Europe depuis une dizaine d’années. Cette décision par Monsanto réduira les importations d’aliments transformés contenant des produits laitiers STbr, comme la crème glacée et les aliments pour bébé que les consommateurs d’ici achètent.

« C’est une grande victoire pour les consommateurs des États-Unis, du Canada et au Québec », constate Éric Darier, le directeur de Greenpeace au Québec. « Le rejet soutenu et massif du lait à la STbr souligne encore davantage la nécessité d’instaurer l’étiquetage pour tous les aliments OGM. »

C’est une deuxième défaite de Monsanto sur l’hormone STbr cette année. L’entreprise n’a pas réussi à contrecarrer le rejet des consommateurs et a perdu la bataille dans plusieurs États américains qui ont approuvé l’étiquetage du lait sans hormone STbr.

La STbr a été bannie au Canada en 1998 après que des scientifiques eurent publiquement fait part des inquiétudes que soulevait l’hormone concernant la santé publique et la sécurité alimentaire. Parmi les préoccupations sanitaires soulevées, mentionnons : l’apparition de phénomènes de toxicité chez les vaches comme la mastite, une contamination accrue du lait par le pus et les antibiotiques, et des concentrations plus élevées d’un agent cancérigène, l’IGF-1. Les autorités américaines ont autorisé la STbr en 1993.

« Si ce genre d’aliments était sécuritaire, Monsato poserait des étiquettes “fait avec des OGM” sur chacun de ses produits. Au lieu de cela, l’entreprise fait tout ce qu’elle peut pour empêcher le consommateur de savoir ce qu’il mange. Mais la stratégie de Monsanto va finir par se retourner contre elle lorsque les consommateurs commenceront à mettre en doute l’innocuité des aliments OGM pour la santé et l’environnement » soutient Éric Darier.

Précision!

Je dois corriger une erreur qui s’est glissée dans le texte que j’ai écrit hier soir tard: d’après des estimations concordantes c’est la moitié des grands troupeaux laitiers américains (ceux qui comptent plus de 5OO têtes et sont situés principalement en Californie), très exactement 54% de ces usines à lait, qui piquent leurs vaches à l’hormone. Et pas la moitié des vaches comme je l’ai écrit! En conséquence, on estime que 23% des vaches sont piquées à l’hormone: ces chiffres sont ceux fournis par l’USDA (ministère de l’agriculture) en 2003:

Les chiffres fournis par l’article du New York Times datent de 1994, c’est à dire six mois après l’introduction de Posilac.

Pour le consommateur, cela ne fait d’ailleurs pas de différence: l’étiquetage du lait étant interdit, il n’y a pas de ségrégation des filières, et le lait issu de l’hormone transgénique est donc mélangé au lait naturel dans les circuits de distribution. Le seul moyen d’échapper au lait POSILAC, c’est donc d’acheter du lait bio , qui jouit d’un label autorisé … En d’autres termes: on n’a pas le droit d’écrire « lait sans rBGH » (lire mon livre), mais on peut écrire « lait bio » (à condition de respecter tout le carnet des charges lié à la production du lait bio, qui concerne notamment l’élevage des vaches).

Par ailleurs, à moins d’être payé pour faire de la propagande comme certains de mes détracteurs attitrés (Anton décidément me fait trop d’ honneur!), personne n ‘est dupe: certes, la firme Monsanto a annoncé qu’elle recherchait un repreneur pour son activité POSILAC, mais c’est bien sûr une manoeuvre de diversion: quelle entreprise va se risquer à racheter une activité tellement controversée que même le géant Starbuck (après bien d’autres) a décidé de rejeter le lait issu des troupeaux piqué?

J’étais encore hier aux Etats Unis où la campagne contre l’hormone de croissance bat son plein:

Gageons que les repreneurs vont effectivement se bousculer au portillon!!

J’informe Anton que dorénavant je supprimerai les messages où il m’accuse de mensonges, car c’est tout simplement diffamatoire. Pour le reste, je le laisse volontiers écrire sa prose qui eût réjoui l’auteur des « Précieuses ridicules »!

Les faucheurs fauchent du … Maïs interdit

Je transmets une dépêche AFP concernant la destruction par des faucheurs volontaires de champs de maïs 810 dont la culture est interdite depuis février 2008. Je rappelle que c’est grâce à la contamination clandestine organisée que Monsanto a pu imposer ses OGM au Paraguay et Brésil…

©AFP / 15 août 2008 16h47

POITIERS – Une centaine de faucheurs volontaires, emmenés par José Bové, ontdétruit vendredi dans la Vienne deux parcelles de maïs OGM présentées comme
du MON810, dont la culture est officiellement interdite en France, aconstaté un correspondant de l’AFP.
Cette opération s’est déroulée sans incidents en milieu de journée àproximité de la centrale nucléaire de Civaux, à une trentaine de km ausud-est de Poitiers, sous la surveillance d’une dizaine de gendarmes qui ne
sont pas intervenus, se bornant à prendre des photos.
Les militants anti-OGM ont d’abord fauché un champ de 3.000 m2 sur lacommune de Civaux, à proximité immédiate de la centrale, « une des parcelles les plus sécurisées de France », a affirmé M. Bové. Ils ont ensuite détruit
une parcelle de 2.000 m2 sur la commune voisine de Valdivienne.Selon les faucheurs, le maïs détruit était de type MON810, une espèce dont
la culture est officiellement interdite en France depuis février 2008.
M. Bové a affirmé que les militants anti-OGM étaient « plus que jamais à l’heure de la mobilisation et de la poursuite du combat contre toutes les formes d’OGM, et pour le droit des citoyens à la biodiversité ».

Eli Lilly rachète l’activité Posilac: pour en faire quoi?

La société Elanco, filiale d’Eli Lilly, a racheté l’activité Posilac de Monsanto pour 3OO millions de dollars. L’hormone reste donc officiellement au sein de la famille. Comme je l’explique dans mon livre, dans les années 1970, trois sociétés, autres que Monsanto, sont parvenues à fabriquer l’hormone de croissance laitière: Elanco, Upjohn et American Cyanamid. Finalement, seule la firme de Saint Louis était restée en ligne, même si Elanco/ Eli Lilly avait obtenu le droit de distribuer le produit grâce à une licence.
L’affaire reste à suivre, car comme l’indiquent les observateurs « les termes de la transaction n’ont pas été révélés ».
Cette histoire ressemble étrangement à une autre survenue une dizaine d’années plus tôt: lorsque, pour se refaire une virginité et échapper aux procès annoncés, Monsanto a « cédé » sa division chimique à Solutia qui a hérité du « paquet » empoisonné des PCB. Cela dit, cela n’a pas empêché Monsanto d’être lourdement condamné lors du procès d’Anniston (cf mon film et livre). Quant à Solutia, elle a fait faillite…

A suivre donc!

La pollution intérieure des maisons

Le Dr. Marco Paya, spécialiste des maladies provoquées par la pollution environnementale vient de m’adresser cet article concernant la présence de perturbateurs endocriniens dans les intérieurs des maisons. Je rappelle que les PCB et le … roundup sont considérés comme des perturbateurs endocriniens dont l’exposition peut entraîner cancers, maladies neurologiques et des dysfonctionnements du système de la reproduction. L’un des perturbateurs endocriniens le plus (tristement) « célèbre » fut le distilbène administré à des femmes enceintes pour éviter des fausses couches et qui provoqua les drames que l’on sait.

Je recommande la lecture de l’excellent publié par la Documentation française.

Voici l’article:

Poussières de maison : les perturbateurs endocriniens font carton plein !

Publié le 11/08/2008

Nombre d’études ont montré que l’environnement intérieur peut être une source d’exposition à de multiples contaminants, la plupart d’entre elles ont porté sur le plomb, les composés organiques volatils, les pesticides, la fumée de tabac. Mais peu d’études se sont intéressées aux perturbateurs endocriniens, pourtant source de préoccupation sanitaire, en milieu intérieur. Cherchant à pallier cette lacune, des auteurs américains ont évalué la présence de perturbateurs endocriniens de différentes classes dans la poussière de maison.

Ils ont mesuré, à l’automne 2004, dans des échantillons de poussières de maison recueillis dans les sacs d’aspirateurs de 10 appartements californiens et d’un hall public, les concentrations de PBDE*, de PCB**, de phtalates, de pyréthroïdes, de DDT***, et de chlordanes.

Les concentrations de perturbateurs endocriniens dans les échantillons prélevés étaient très variables, et n’étaient pas significativement corrélées les unes avec les autres.
Les résultats montrent que tous les échantillons de poussières de maison étaient significativement contaminés par les perturbateurs endocriniens soumis à analyse.
Chlordanes et insecticides pyréthroïdes, PBDE et phtalates ont été retrouvés au-dessus des limites de détection dans tous les échantillons,
Les concentrations des insecticides pyréthroïdes et celles de chlordanes témoignaient d’une large application de pesticides insecticides dans ou autour des appartements. Pourtant l’utilisation des chlordanes, en raison de leur persistance dans l’environnement, des risques potentiels de cancers, et d’autres effets indésirables pour l’homme et pour la faune, a été restreinte aux États-Unis, en 1978, jusqu’au bannissement de toute utilisation de ces agents chimiques en 1988. L’US Environmental Protection Agency a en effet classé les chlordanes comme cancérogènes probables pour l’homme.

Le di-(2-éthylhexyl) phtalate (plastifiant largement utilisé comme dans les revêtements de sol et de murs, les tapis et moquettes, les rideaux de douche, les cuirs synthétiques, mais aussi les parfums, vernis à ongles, les produits cosmétiques, les emballages alimentaires, les peintures, les jouets d’enfants…) était le contaminant le plus abondant dans tous les échantillons recueillis, présent à des concentrations allant de 104 à 7 630 µg/g.

Les PBDE (largement utilisés comme retardateurs de flamme, dans de nombreuses installations domestiques électriques et électroniques, dont les télévisions, ordinateurs, dans la mousse de polyuréthane des canapés, des matelas…) étaient eux aussi retrouvés à de fortes concentrations, allant de 1 780 à 25 200 ng/g.

Les PCB étaient présents dans certains échantillons de poussières, à des concentrations considérées comme préoccupantes pour la santé de l’homme (associations observées à des effets sanitaires indésirables : neurotoxiques, immunitaires, endocriniens, cancers, lymphomes non hodgkiniens). Pourtant l’utilisation des PCB a été interdite aux États-Unis en 1977. Les PCB, entre autres ceux ajoutés dans les matériaux de construction, notamment dans les joints de mastic, les peintures, les plâtres, fabriqués entre les années 1940 et 1970, pour améliorer l’efficacité et la résistance de ces matériaux, qui contenaient de très fortes concentrations de PCB, sont cependant stables dans l’environnement, avec des demi-vies de 10 à 20 ans. Et ces demi-vies, pour des raisons d’humidité, d’ensoleillement et d’activité bactérienne, pourraient peut-être être plus longues encore à l’intérieur des immeubles.

Cette étude, préliminaire, attire sérieusement l’attention sur la contamination de la poussière de l’air intérieur par des agents chimiques, perturbateurs endocriniens, persistant longtemps dans les habitations.

* DDT : dichlorodiphényltrichloroéthane ; **PBDE : éthers de polybromodiphényléthers ; ***PCB : polychlorobiphényles.

Dr Claudine Goldgewicht

Hwang H-M et coll. : Occurrence of endocrine-disrupting chemicals in indoor dust. Sc Total Environ 2008. Publication en ligne le 14 juillet 2008.