Monsanto veut breveter les gènes d’une race de cochon!

Plusieurs internautes m’ont fait parvenir la pétition de la Fédération nationale d’agriculture d’Allemagne qui s’oppose à la demande de brevet déposée par Monsanto sur un gène d’une race allemande de porcs rustique, associé à une croissance et prise de poids plus rapides, lui permettant de toucher des royalties lors de toute utilisation de cette race dans des croisements.

Cette affaire illustre parfaitement la dérive que constitue le brevetage du vivant qui viole les critères d’obtention d’un brevet. Dans ce cas, Monsanto s’est contenté d’identifier et de décrire la fonction de ce gène , puis a déposé une demande de brevet , alors qu’en aucun cas la multinationale peut prétendre avoir inventé ce gène, qui est un élément du patrimoine génétique de la race porcine!

Si le brevet était accordé, Monsanto pourrait réclamer des royalties sur chaque porc contenant le fameux gène!

Pour les lecteurs qui veulent en savoir plus sur cette dérive du système général des brevets , je rappelle que j’ai consacré un film à cette question, disponible sur ce Blog: « Les pirates du vivant », dans la rubrique « Les films qui m’ont conduite à Monsanto ».

J’encourage donc les internautes à signer la pétition de la Fédération nationale d’agriculture biologique (FNAB) pour relayer le message et mobiliser les citoyens !

Communiqué

Nous ne pouvons pas accepter cette privatisation du vivant. Nous avons, dès la semaine dernière envoyé un courrier d’opposition à ce brevet sur la vie. Nous demandons à tous ceux qui s’opposent à ce type de pratiques monstrueuses de faire de même et d’envoyer par la poste, impérativement avant le 10 avril, sa déclaration de refus à l’association allemande « Kein Patent auf Leben » qui transmettra à l’Office européen des brevets l’ensemble des signatures.

Naturland (association allemande de producteurs bio) nous a récemment alertés d’un brevet sur une race allemande de porcs possédant un gène d’intérêt agronomique, accordé à la firme américaine Monsanto. L’Office Européen des brevets a en effet octroyé, le 16 juillet 2008, un brevet pour l’élevage de porcs (brevet N° EP 165 1777) à la multinationale Monsanto. L’association des paysans bio allemands, qui a déjà fait opposition, souhaite que tous soutiennent cette démarche. La date limite du dépôt est le 15 avril 2009.

Le brevet en question permettrait à Monsanto de toucher des royalties sur tout croisement utilisant cette race de porcs rustique, qui a donc sa place en élevage biologique. La raison principale pour faire opposition est d’ordre éthique : le brevet ne se base pas sur une invention mais vise, au contraire, la maîtrise de la production des denrées alimentaires. Ce brevet aura des conséquences importantes en matière de dépendance des éleveurs et des consommateurs.

La FNAB a la semaine dernière envoyé sa lettre d’opposition. Elle a appelé ses groupements régionaux et départementaux à faire de même, ainsi que tous les producteurs bio et leurs consommateurs. Mais plus largement, nous sommes tous concernés par ces brevets sur le vivant : alors réagissez et manifestez votre refus de telles pratiques avant le 10 avril à l’association allemande qui s’est chargée de collecter les lettres d’opposition.

La lettre d’opposition doit être envoyée auprès de « Kein Patent auf Leben », Frohschammerstr. 14, D-80807 Munich (Allemagne). Pour copier la lettre type :

* En allemand : http://www.keinpatent.de/index.php ?id=90

* En anglais : http://www.no-patents-on-seeds.org/images/documents/opposition_pig_patent_eng.pdf

Révélations en Argentine

Les choses bougent en Argentine! Il y a tout juste un an, au moment où j’étais citée comme témoin lors d’un procès contre les généraux de la dictature à Corrientes (voir ce Blog), je remettais un exemplaire de mon film et livre sur Monsanto , qui venaient tout juste de sortir en France, à Horacio Verbitsky, l’un des journalistes les plus renommés du pays. Il a écrit un premier papier sur les méfaits des cultures roundup ready dans Página 12, qui a déclenché -enfin!- l’intérêt des journalistes argentins anesthésiés par les retombées de la crise financière « et bien d’autres problèmes », comme m’avait dit Horacio. Puis, il a passé le dossier à Darío Aranda, qui, depuis, a mené l’enquête et publié une dizaine d’articles que j’ai cités sur mon Blog.

Dimanche dernier, Horacio Verbitsky a publié des révélations qui expliquent comment Monsanto a pu introduire son soja roundup ready en Argentine. J’invite les hispanophones à lire ce papier très fouillé.

Pour les non hispanophones, je résume l’essentiel de l’article. Je rappelle, d’abord, qu’au moment où Monsanto essaie de s’introduire en Argentine, le pays est dirigé par Carlos Meném, qui s’est ensuite réfugié au Chili, pour échapper à des poursuites pour corruption et trafic d’armes… Dans mon livre, je raconte comment Clarin, le grand quotidien argentin, qui tire à quelque 800 OOO exemplaires, mène une véritable propagande en faveur des cultures transgéniques, depuis leur lancement en 1996. C’est particulièrement vrai pour son supplément Clarín Rural, dirigé par un certain Héctor Huergo , qui pour la petite histoire, a refusé catégoriquement de me rencontrer lors de mon dernier voyage en Argentine. Et pour cause!

Voici ce que révèle Horacio Verbitsky: agronome de formation, Huergo est entré à Clarín en 1971. De février à novembre 1994 – au moment où Monsanto établit les premiers contacts en Argentine, il a laissé le « journalisme » pour diriger l’Institut national de technologie agricole (INTA) , l’équivalent de l’INRA, qui depuis des décennies conduisait la recherche publique pour le développement de variétés végétales « améliorées ». Un patrimoine national financé avec les deniers des contribuables . Sa mission fut courte, mais efficace, comme le rapporte Alberto Lapollan, agronome et historien, témoin des faits:

« A cette époque, Hurgo était l’homme de Monsanto. Il a déstructuré l’INTA, en livrant le capital génétique stratégique pour le pays aux entreprises privées comme Monsanto et Nidera (NDR: l’entreprise semencière à qui Monsanto vendra une licence pour la vente des semences transgéniques) et en leur permettant l’accès aux , archives secrètes de l’INTA dont les équipes de recherche ont été achetées par ces entreprises. Cela a permis à Monsanto de créer le soja Roundup ready sur la base de variétés de soja développées en Argentine pour les sols du pays. Tous ceux qui n’étaient pas d’accord ont été licenciés ».

Le deuxième homme de Monsanto c’était Felipe Solá, secrétaire à l’agriculture, qui, le 3 avril 1996, a signé l’autorisation de commercialiser les semences transgéniques « tolérante à l’herbicide glyphosate ». Sans aucun débat parlementaire, ni essai , ni loi encadrant les cultures transgéniques!

Entre-temps, Héctor Huergo était retourné à Clarín Rural pour faire la propagande de Monsanto. Réputé pour mener un « grand train de vie » , Huergo est lui même producteur de soja et dirige la fédération des agrocarburants!

Cette histoire rappelle étrangement ce qui s’est passé récemment en Indonésie où, comme je le révèle dans mon livre, Monsanto a été condamné pour corruption: la multinationale avait arrosé une centaine de hauts fonctionnaires pour introduire son coton BT…

Par ailleurs, lorsque j’étais en Argentine, j’ai été contactée par Eugenia Lagone, journaliste au journal Capital de Rosario (Rosario est la capitale de l’empire transgénique). Elle m’avait entendue sur Radio nacional parler de l’étude publiée par l’hôpital italien de Rosario sur les multiples maladies et malformations congénitales , enregistrées par l’équipe du Docteur Alejandro Oliva, qui dirige l’Unité de médecine environnementale et de santé reproductive de l’hôpital. Curieusement, la journaliste n’était pas informée de l’étude, publiée l’année dernière (que j’ai citée sur mon Blog). N’ayant pas le temps de répondre à ses questions (j’étais sur le point de m’envoler pour le Chili), je lui ai conseillé de contacter le Dr. Oliva. Ce qu’elle a fait. Voici son article très détaillé, ainsi que la réaction du ministre de la Santé de la province, Miguel Capiello qui cite mon livre:

www.lacapital.com.ar//contenidos/2009/04/05/noticia_0001.html

www.lacapital.com.ar/ed_impresa/2009/4/edicion_166/contenidos/noticia_5491.html

www.pagina12.com.ar/imprimir/diario/suplementos/rosario/10-18026-2009-04-07.html

Pour les lecteurs non hispanophones, je synthétise (de nouveau!) l’essentiel de l’étude, qui met en cause les PCB de Monsanto et le roundup ( à savoir le glyphosate, et surtout les surfactants qui composent le produit final). Il est intéressant de noter que les habitants des quartiers concernés par l’étude ont la malchance d’être exposés à un « cocktail » hautement toxique: les PCB, accumulés dans des décharges et les épandages aériens de roundup sur les champs de soja transgénique tout proches.

L’étude montre que l’incidence des malformatiosn congénitales chez les enfants est dix fois supérieure à celle enregistrée dans le reste de l’Amérique latine. Parmi elles: la criptorquidie (absence des testicules dans le scrotum, empêchant celles-ci de descendre) et l’hipospadias (malformation de l’urètre qui ne se prolonge pas jusqu’à la fin du pénis). Un phénomène déjà constaté par le Dr. Darío Gianfelici dans la province d’Entre Rios, aussi très exposée aux épandages du poison de Monsanto (voir mon livre).

Les scientifiques de l’hôpital de Rosario ont aussi constaté une explosion des cancers hormono-dépendants (cancer des testicules et des ovaires).

Je rappelle que les PCB et le roundup sont des perturbateurs endocriniens qui perturbent les systèmes hormonaux, ainsi que le prouvent de nombreuses études.

Ma visite au Chili et au Paraguay (suite)

Photos:

– 1 et 2: Avant la projection à Guayaibi, dans le département de San Pedro, les participants chantent l’hymne national, après avoir rappelé la crise politique que traverse le pays, menacé par l’intervention du secteur agroexportateur. A gauche (lunettes et moustache), le ministre Camilo Soares.

– 3 et 4: projection du film devant 3OO étudiants en agronomie à Cironel Oviedo.

A ma droite Jorge Galeano, président du Movimiento Agrario Popular qui est dans mon film. Le MAS fut l’un des soutiens très actifs à l’élection du président Lugo.

– 5: un élu de Guayaibi me remet la « clé de la ville » qui me consacre « citoyenne d’honneur de la ville ».

Monsanto crée un Blog pour contrer l’impact de mon enquête!

Monsanto vient de lancer un « Blog » intitulé « Monsanto according to Monsanto« !

Lorsqu’on clique sur « Why a Monsanto Blog? », on apprend que ce blog est un « spoof », un plagiat censé contrer mon film et livre « Le monde selon Monsanto »!!

Voici ce que l’on peut lire:

This blog will address issues related to Monsanto, our business, and technology in agriculture.

The title Monsanto According to Monsanto is a spoof of The World According to Monsanto, a horribly biased documentary which portrays Monsanto in a very negative light. Aside from the shoddy journalism, we at Monsanto found it incredibly arrogant that the filmmaker would present her own twisted view of Monsanto as the company’s view of the world.

If anyone should speak to Monsanto’s vision of the world, it’s those of us who come to work here every day and collectively make this company what it is. This is the main reason for this blog.

Quel honneur!

Cela n’empêche pas la chaîne canadienne Canal D de rediffuser mon film ce soir même!

Ma visite au Chili et au Paraguay

Je termine, aujourd’hui, ma tournée dans le cône sud où mon film et livre sur Monsanto remportent un énorme succès, à tel point que le livre est en rupture de stock dans les librairies!

Les demandes pour le DVD sont nombreuses, et je remercie ARTE d’avoir décidé de produire cette version espagnole, qui sera disponible en mai. En attendant, nombreuses sont les personnes que j’ai rencontrées au cours des conférences et projections qui avaient déjà vu (et téléchargé) la version piratée sur Internet!

Après l’Argentine, j’ai passé une journée et demie au Chili où j’ai donné une série d’interviews et présenté mon enquête à la Biblioteca nacional (voir photo).

J’invite les hispanophones à regarder cette ITW diffusée sur CNN Chili.

Au Chili, les cultures d’OGM sont interdites. En revanche, le pays reproduit des semences transgéniques sur environ 22 OOO hectares , exportées vers les Etats Unis. Cette production de semences a lieu dans des endroits maintenus secrets, ce qui inquiète les agriculteurs biologiques qui craignent la contamination de leurs cultures (notamment de maïs).

Par ailleurs, le réseau RAP-AL, la branche latino-américaine de Pesticides Action Network, qui a coordonnée ma visite, mène un travail de sensibilisation considérable sur l’utilisation massive de pesticides pour les cultures de fruits, légumes et fleurs destinées à l’exportation. Chaque année, des centaines de travailleurs agricoles sont intoxiqués par les « agrotóxicos » qui polluent l’environnement et la chaîne alimentaire.

Le 2 avril, je suis arrivée au Paraguay, à un moment de grandes tensions politiques. D’après mes informations, le nouveau président Fernando Lugo, l’ex « évêque des pauvres », élu en avril dernier grâce au soutien des secteurs populaires, subit des pressions « preputschistes », selon les termes employés par l’un de mes interlocuteurs, de la part des grands producteurs de soja et des entreprises liées à l’agroexportation pour renoncer à ses engagements en faveur de l’agriculture familiale. Le conflit concerne un décret que le président s’apprêtait à signer qui permettra aux petits paysans, producteurs de sésame, de vendre leurs récoltes sans passer par les multinationales de l’agrobusiness, comme Cargill, dont je rappelle que la division internationale a été rachetée par … Monsanto.

Je rappelle qu’au Paraguay, 2% de la population détiennent 70% des terres, avec des latifundias qui dépassent les 50 000 hectares, Ces grands propriétaires terriens, dont une majorité d’origine brésilienne, cultivent du soja transgénique de Monsanto qui couvre, aujourd’hui, 2,5 millions d’hectares.

Pour étendre leur empire transgénique, destiné à nourrir les poules, les vaches et les cochons des élevages intensifs d’Europe, ils n’hésitent pas à recourir à des milices privées, liées à l’ancien dictateur Stroessner, pour chasser les petits paysans de leurs lopins de terre. Des dizaines de paysans ont été assassinés au cours des dernières années.

Comme dans l’Argentine voisine, le processus de « sojisation » s’accompagne d’une déforestation dramatique, qui met en péril la biodiversité et la sécurité alimentaire du pays (voir mon film et livre).

Vendredi matin, j’ai présenté la partie de mon film tournée au Paraguay au Congrès devant quelque deux cents personnes (voir photo). Etait présente la Dr. Gaciela Camarra, du ministère de la santé, dont je parle dans mon livre, qui a exposé les nombreuses intoxications que provoquent les épandages de roundup dans tout le pays. Le ministère de la santé a créé un registre spécial qui comprend déjà plusieurs centaines de cas.

Puis, j’ai rencontré Oscar Rodríguez, vice-ministre des Affaires étrangères, et Henry Moriya, vice-ministre de l’agriculture, avec qui je me suis entretenue pendant une heure, après leur avoir remis une copie de mon livre. Malheureusement, en raison de la crise politique, le président Lugo a annulé le rendez-vous prévu.

Les soir, le film a été présenté devant plus de 3OO personnes dans un cinéma d’Assunción.

Samedi, j’ai rejoint Guayaibi le département de San Pedro, où j’ai présenté mon film, en présence du ministre de « Emergencia nacional », Camilo Soares , venu soutenir la résistance paysanne aux tentatives de déstabilisation dirigées par le secteur de l’agro-exportation. Au même moment, le gouverneur de San Pedro, – le seul gouverneur du pays qui dénonce les méfaits des cultures transgéniques pour l’agriculture familiale et l’environnement -, et qui devait ouvrir l’événement, était en route pour Asunción pour voir en urgence le président Lugo… C’est lui qui devait me remettre la « clé de Guayaibi » (voir photo) qui fait que je suis désormais « citoyenne d’honneur » de la ville…

Enfin, dans l’après-midi, j’ai présenté mon film à dans la ville de Coronel Oviedo, dans une salle de la pastorale catholique qui avait invité 3OO étudiants en agronomie. A la fin du débat qui a duré deux heures, plusieurs d’entre eux sont venus me voir très émus: fils de « sojeros », ils ont décidé d’acheter le DVD (qu’ils ont commandé) pour organiser des projections un peu partout dans la région où les épandages de roundup provoquent un désastre sanitaire.

Photos:

– 1 et 2 :Conférence à la Bibliothèque nationale de Santiago du Chili. La banderole dit « Monsanto sème la mort ». A la tribune, Marco Enríquez-Ominami, député.

– 3: L’interview à CNN Chile

– 4: présentation de mon enquête au Congrès d’Asunción.

– 5: ma rencontre avec Oscar Rodríguez, vice-ministre des Affaires étrangères et Henry Moriya, vice-ministre de l’agriculture