Interview avec Carmen Aristegui de CNN

L’interview que j’avais accordée à Carmen Aristegui de CNN espagnol, pendant mon séjour à Mexico a été diffusée sur toute l’Amérique latine, le mardi 11 août:

Par ailleurs, Le Nouvel Observateur de la semaine dernière ( daté 6 août) m’a consacré un portrait dans sa série d’été « Les baroudeurs de l’info ».

Les masques sont tombés!

Je constate que « Capitaine Poltron » et ses compères, spécialistes de la manipulation, sont tombés dans le piège que je leur avais tendu… En révélant « le drôle d’acharnement » sur ma fiche Wikipedia, je voulais vérifier si mes « détracteurs personnels » , qui se présentent comme des défenseurs invétérés des OGM de Monsanto, étaient aussi des spécialistes (!) du trafic d’organes, de la rumeur, et de l’USIA. Et bien oui!

Ils ont enfourché ce nouveau cheval avec la même virulence qu’ils épiaient jusque là le moindre de mes écrits sur les plantes transgéniques pesticides. Le problème c’est que leurs arguments – et là la médaille revient à « Capitaine Poltron » – viennent tout droit du dossier établi, il y a… quinze ans- par Todd Leventhal de l’USIA! Tout y est, y compris la référence à Véronique Campion-Vincent, une ingénieure au service informatique du CNRS, qui a un « dada »: les « légendes urbaines ».

J’ai rencontré cette femme (au demeurant fort sympathique) au moment de mon enquête, qui n’ a jamais fait aucun travail de terrain et se contente pour ses (rares) écrits de consulter des documents établis par d’autres! Dans mon livre Voleurs d’organes. Enquête sur un trafic, je raconte notamment qu’elle a publié un article en 1992 dans Les cahiers internationaux de sociologie, intitulé « Bébés en pièces détachées. une nouvelle légende latino-américaine », où ses seules sources sont l’USIA, la CIA et le FBI!

De son côté, Todd Leventhal, dans le rapport qu’il avait rédigé sur le vol d’organes, qu’il présentait comme une invention des services de propagande du KGB, destinée à discréditer les Etats Unis (!), cite Véronique Campion-Vincent comme une « spécialiste française  » du vol d’organes! La boucle est bouclée!

Par delà l’anecdote, il convient de rappeler ce qu’est l’USIA et dans quelles conditions, cette agence gouvernementale américaine est née.

Voici ce que j’écrivais dans mon livre Voleurs d’organes. Enquête sur un trafic, paru aux Editions Bayard en 1996, où je racontais tous les dessous de cette incroyable affaire.

EXTRAIT

« Les armes de combat sont désormais les mots plus que les bombes ». Ainsi s’exprime Ronald I. Rubin dans son livre Les objectifs de l’Agence d’Information des Etats Unis. À la même époque, Richard Helms, directeur de la Central Intelligence Agency (CIA) a coutume de dire:

« La guerre se mène dans les coins sombres, et pas avec des ranks, des fusils ou des armes nucléaires ».

Le rapprochement n’est pas fortuit, ainsi que l’illustre l’histoire des deux agences américaines, dont l’origine commune atteste qu’elles constituent les deux faces d’une même monnaie: le renseignement au service de la sécurité des Etats Unis d’Amérique, l’une (l’USIA) étant considérée comme une « agence ouverte » (open agency), l’autre (la CIA) comme une « agence secrète » (covert agency).

Les spécialistes du renseignement précisent aussi que l’USIA est chargée de la « propagande blanche » et la CIA de la « propagande noire », des notions que John W. Henderson résume de la manière suivante:

« On appelle propagande noire toute information faussement attribuée à une source; la propagande grise est livrée sans source, quant à la propagande blanche, sa source est clairement attribuée, au moins par induction ».

Ainsi que le souligne Roland Jacquard dans son livre La guerre du mensonge : histoire secrète de la désinformation , il faut attendre 1908 pour que le président Théodore Roosevelt autorise la création d’un Bureau d’investigation américain, qui deviendra le Federal Bureau of Investigation, le FBI, en 1935. Ce service de police judiciaire devient l’instrument de contre-espionnage officiel, son domaine s’ étendant à la répression de la subversion interne, mais aussi externe, en 1939. Mais ce n’est pas à proprement parler un service de renseignement même si, seul sur la place, il a tendance – notamment en Amérique latine – à en remplir la fonction.

À la veille de la seconde guerre mondiale, le président Franklin D. Roosevelt commande un rapport sur la situation du renseignement américain. Son objectif : créer un service « capable non seulement de centraliser et d’analyser les informations éparses parvenant aux différentes administrations, mais également de se livrer à un travail de recherches clandestines et surtout de lutter contre la propagande et l’intoxe allemande ».

C’est ainsi qu’est créé l’Office of War Information (OWI) – le B ureau d’information de la guerre – qui regroupe sous le même toit les services d’information et de renseignement : il comprend notamment la radio Voice of America , qui commence à émettre en allemand le 24 février 1942, et le United States Information Service, le service d’information d’Outre-mer. Au lendemain de la guerre, les agents de l’OWI rejoignent deux structures nouvelles : la CIA, créé en 1947, et l’USIA, en 1953.

Définie comme un « Programme officiel américain d’information étrangère », l’USIA affiche clairement ses objectifs, ainsi que le souligne Elmer David, l’ancien directeur de l’OWI :

« Abolir toutes les barrières qui empêchent la liberté internationale de la presse et de la communication en général. Fournir une image correcte des Etats Unis et de la politique américaine. Contrer la propagande communiste et montrer la vraie nature du communisme totalitaire. Soutenir la politique étrangère des Etats Unis en persuadant les peuples de son mérite. Promouvoir l’entente et la compréhension mutuelle entre les Etats Unis et les autres pays ».

Le moteur de l’agence ? La guerre froide , qui bat alors son plein, comme l’explique Théodor Stribert, son directeur en 1953 :

 » À l’étranger, on connaît mal les Etats Unis. Les communistes en profitent pour nous calomnier. Aujourd’hui les Etats Unis sont garants de la paix. Nos responsabilités sont immenses. Si nous voulons les assumer, nous devons expliquer au monde entier notre nature, nos convictions, nos aspirations comme nation, pour contrer la propagande communiste. C’est la tâche de l’USIA. C’est notre affaire à tous, car notre sécurité en dépend ».

D’après la charte qui entérine sa naissance, l’USIA entretient des relations très étroites avec le Département d’Etat et est tenue d’en référer au président à travers le Conseil national de sécurité, qui représente le plus haut comité dans la branche exécutive de l’Etat américain. Créé en 1947, pour définir et veiller à la sécurité nationale, cet organisme est constitué de membres statutaires et d’observateurs , dont le directeur de la CIA.
La naissance du Conseil national de sécurité est concomitante à celle de la CIA, qui voit le jour, le 18 septembre 1947, au terme d’un vote unanime du Congrès en faveur du National security Act, considéré comme la charte de la « compagnie ». Un vote unanime des sénateurs et représentants américains est suffisamment rare pour être souligné : il est emblématique d’une époque où l’éclatement de la sainte alliance contre le nazisme génère un nouveau front commun : la lutte contre le communisme. L’objectif de la CIA est donc de développer , par tous les moyens, un cordon sanitaire qui protège « le monde libre » du « péril rouge ».

C’est dans ce contexte que s’inscrit la première action illégale de la CIA : le contrôle du courrier échangé entre les citoyens américains et soviétiques. Bien d ‘autres suivront, qui jetteront , à terme, un discrédit indélébile sur la « compagnie » : propagande noire, actions clandestines allant jusqu’à l’assassinat, renversements de gouvernements, le tout au nom de la lutte contre le communisme et son puissant rival, le KGB, qui, dans le domaine de la désinformation, jouit indéniablement d’une bonne longueur d’avance…

C’est en effet aux bolcheviks de la première heure que l’on doit la notion de « désinformation », en russe desinformatsia : le terme apparaît, pour la première fois, en Occident, dans la bouche des Russes blancs qui fuient la révolution d’Octobre. Selon eux, c’est une invention de la police politique du nouveau régime, qui désigne ainsi « les actions menées à l’intérieur et à l’extérieur du pays pour entraver l’installation du pouvoir bolchevique ». Le mot apparaît dans le dictionnaire de la langue russe de S. Ojegov, dès 1949 : « Action d’induire en erreur, au moyen d’informations mensongères ».

Pour Roland Jacquard, la desinformatsia représente l’ « ensemble des techniques utilisées pour manipuler l’information, tout en lui conservant un caractère de crédibilité , afin d’exercer une influence sur le jugement et les réactions d ‘autrui ». Souvent traduite par « intoxe » en français ou « deception » an anglais, c’est une manière de « mentir vrai » en empruntant les canaux traditionnels de l’information : presse écrite, orale ou audiovisuelle .

Très vite, le puissant KGB – qui est chargé des opérations de renseignement à l’intérieur comme à l’extérieur de l’ex-Union soviétique, mais aussi de la propagande du régime – devient l’un des maîtres incontestées de la désinformation, en s’appuyant notamment sur la diffusion de fausses rumeurs ou la mise en circulation de documents falsifiés pour discréditer l’Occident, et tout particulièrement les Etats Unis.

De son côté, la CIA invente son propre terme pour désigner ses campagnes d’intoxication ou de désinformation contre l’ennemi communiste : forgery (falsification). Décrit par ses ex consorts comme un « professionnel de la falsification », Richard Helms, ex-patron de la CIA, est ainsi l’auteur de la plus grande forgery de l’histoire de la « compagnie » : la version made in CIA du discours prononcé, le 24 février 1956, devant le XXème Congrès du parti communiste de l’Union soviétique, et entré dans l’histoire sous le nom de « rapport Khrouchtchev ». Les hommes de Richard Helms parvinrent à réaliser un total de trente-deux ajouts insérés dans le texte original, et publiés dans The New York Times !

Autre exemple plus récent , de forgery : l’attribution de la responsabilité de la tentative d’assassinat du pape Jean-Paul II, le 13 mai 1981, au KGB, via une « filière bulgare », qui n’a existé que dans l’imagination des agents de la « compagnie ».

« La CIA, de façon générale, a été l’inspiratrice d’une longue série de campagnes de diffamation et d’intoxe sur tous les terrains de confrontation du monde, écrit Andreas Freund, ex-chef des informations du bureau parisien du New York Times, dans son livre Journalisme et mésinformation . Ses campagnes sont servies par un dispositif médiatique impressionnant : l’agence dispose de l’accès au réseau de diffusion officiel des Etats Unis, dont les mégaphones les plus importants sont Voice of America, sur les ondes, qui dépend de l’USIA, et à terre, des 202 succursales de cette agence d’information installée dans 124 pays du monde ».

L’USIA, dont la collaboration étroite avec la CIA est un secret de polichinelle.
Première obsession commune : la presse que les deux agences analysent, épluchent, pour mieux l’infiltrer et l’influencer, ainsi que l’explique Harry Rositzke, vétéran de la « compagnie » dans son livre CIA, 25 ans au sein de l’agence américaine d’espionnage :

« À Washington, la communauté du renseignement est devenue surabondante et tentaculaire. Vingt-quatre heures par jour, et sept jours par semaine, le cerveau du policier universel contrôle les paroles du monde entier, sonde et photographie chaque parcelle du globe. La communauté du renseignement enregistre et traduit des milliers d’émissions de radios étrangères, lit quelque dix mille journaux et périodiques, sélectionne et commente des milliers de noms et de lieux ».

Sur le terrain même des médias officiels, la concurrence entre les deux agences est parfois très rude : à l’Est, Voice of America la radio de l’USIA, rivalise avec Radio Free Europe, implantée dans les pays européens satellites de l’URSS, et Radio Liberty, qui émet à Moscou, deux puissantes stations créées par Allen Dulles, le premier patron de la CIA. La concurrence est telle que Leo Boggart, un spécialiste de l’USIA, soucieux de résoudre le conflit, suggère d’octroyer la zone communiste aux émetteurs de la CIA et la zone non communiste à celui de l’USIA !

Si, en théorie, l’USIA est censée ne faire que de la « propagande blanche et légitime », selon le mot d’Allen C. Hansen, il n’en reste pas moins vrai que son champ d’action est délimité en concertation avec la « compagnie » :

« La tâche de l’USIA peut être distinguée de la propagande pure, note Leo Boggart. Elle joue un rôle limité comme une agence officielle gouvernementale, tandis que certaines des rough things (mot à mot « affaires corsées ») peuvent être faites par d’autres agences, comme la CIA ».
Dans ses mémoires The Night Watch : 25 years inside the CIA, , David Atlee Phillips, ex-officier de la CIA où il travailla un quart de siècle, note à propos de Howard Hunt, un autre vétéran, réputé pour son anticommunisme viscéral :

« Pour ce qui est de la propagande, on considère généralement qu’il ne faut la faire clandestinement que quand on ne peut la faire ouvertement ; mais Howard lui, avait tendance à considérer que l’éventualité de passer par le département d’Etat ou l’USIA ne devait être envisagée que si l’affaire s’avérait impossible par les moyens détournés de la CIA ».

Considérée comme une « agence ouverte », l’USIA n’en cultive pas moins le secret, comme sa consoeur de la famille du renseignement : « Bien sûr, certaines catégories limitées d’informations sont cachées pour des raisons de sécurité », avoue John W. Henderson, ce que confirme Ronald I. Rubin : « Certains objectifs de l’agence sont classés secrets ».

Le penchant naturel de l’USIA pour la désinformation est si fermement ancré qu’à peine arrivé au pouvoir, le président Jimmy Carter décide de taper dans la fourmilière du renseignement.

« L’USIA n’entretiendra pas d’activités secrètes, manipulatrices ou propagandistes », déclare-t-il, tandis qu’au même moment il demande une enquête sur la CIA, pour en restreindre les possibilités d’action. Le 1er avril 1978, il va même jusqu’à changer le nom de l’agence d’information, rebaptisée International Communication Agency (ICA), dont le sigle ne fait que renforcer la confusion avec la CIA ! D’où un retour à la case départ, décidé par le président Ronald Reagan, qui, en 1982, nomme son vieil ami Charles Z. Wick à la tête de l’USIA. Comme aux temps forts de la guerre froide, le directeur lance un programme, le « Projet vérité », dont le but est de contrer la propagande soviétique…

C’est dans ce contexte qu’intervient la publication d’un premier document de l’USIA sur « l’histoire des bébés en pièces détachées », dans un rapport intitulé Soviet Active Measures in the Era of Glasnost, dont le rédacteur est un certain Todd Leventhal…

FIN DE L’EXTRAIT

Dans un prochain post, je raconterai ma visite à Washington dans le bureau de Todd Leventhal, qui a essayé de me convaincre que le trafic d’organes est une « légende urbaine » inventée par le KGB pour discréditer les Etats Unis ! Je rappelle que cette interview a eu lieu en 1993 et que l’Union soviétique n’existait plus!! Plus tard, dérangé par le succès international de mon film « Voleurs d’organes », l’agent secret insinuera qu’en tant que journaliste spécialiste de Cuba, je travaillais très certainement pour ledit KGB! Devant l’incrédulité de ses interlocuteurs, il changera de « forgery » (intoxe), en insinuant que j’avais payé la mère du petit Jaison pour obtenir un faux témoignage, provoquant la même incrédulité, comme je le raconte en détails dans mon livre.

Il est amusant de constater que « Capitaine Poltron » ressort les mêmes arguments que Todd Leventhal il y a presque quinze ans!

En fait, tout indique que Me William Bourdon , mon avocat dans les trois procès que j’ai gagnés à la suite de la polémique qui a suivi la diffusion de mon enquête sur le vol d’organes, avait vu juste. Peu de temps avant la sortie de mon film et livre sur Monsanto, il m’avait prévenue:  » Attends-toi à ce que les services de communication de Monsanto ou à ce que des défenseurs inconditionnels des OGM, proches de la firme, ressortent le dossier « Voleurs d’organes » pour te discréditer et jeter le trouble sur ton enquête ».

Cet avertissement n’était pas dû à un excès de paranoïa, étant données les pratiques de manipulation de l’information auxquelles a déjà eu recours la multinationale de Saint Louis, ainsi que le prouve notamment l’affaire d’Ignacio Chapela (voir mon film, livre et sur ce Blog).

Voilà pourquoi, Me Bourdon avait rédigé un communiqué mettant en garde tous ceux qui essaieraient de me diffamer en présentant une version tronquée de l’affaire « Voleurs d’organes » (voir sur ce Blog), basée sur le dossier réalisé par Todd Leventhal, qui est un spécialiste de la désinformation et de la propagande .

Manifestement c’est sur ce « dossier » que se base « Capitaine Poltron » pour rédiger ses « commentaires ». Comment l’a-t-il récupéré? Mystère. Ce qui est sûr c’est qu’il est impossible d’avoir accès à ce dossier, en plein mois d’août, sans avoir été sérieusement « briefé »…

En attendant, « Capitaine Poltron » n’a pas peur du ridicule, puisqu’il continue de nier , aujourd’hui, l’existence du trafic d’organes, qui a été maintes fois prouvée, depuis mon enquête pionnière, comme le montre, par exemple, ce document de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe de juin 2003:

Drôle d’acharnement sur Wikipedia

Un drôle de combat se mène actuellement sur ma fiche … Wikipedia !

Un ami m’a alertée il y a quelques jours que ma fiche Wikipedia avait été entièrement remaniée par un inconnu, passablement bien informé, qui avait réalisé un gros travail de compilation pour rédiger un texte répondant aux critères de l’encyclopédie en ligne : factuel, sourcé, et objectif.

Ce texte essayait de rendre compte des quelque 2OO reportages que j’ai réalisés pour la télévision en vingt-cinq ans de carrière (une quarantaine de documentaires de 26 à 90 minutes, auxquels s’ajoutent cent modules de six minutes pour la série Les 100 photos du siècle, diffusés sur ARTE, le reste étant des reportages courts diffusés dans des magazines d’information comme La marche du siècle, Zone interdite, ou Thalassa).

Il se trouve que depuis la sortie de mon film et livre sur Monsanto, ma fiche était squattée par des détracteurs, qui, à l’instar de l’AFIS (voir sur ce Blog) , s’évertuaient à me discréditer en manipulant l’affaire qu’avait provoquée la diffusion, en 1994, de mon film Voleurs d’organes , puis de Voleurs d’yeux (une version raccourcie du premier) couronnée par six prix, dont le Prix Albert Londres.

Comme je l’ai écrit sur ce Blog, le Prix Albert Londres avait été provisoirement suspendu, après une campagne digne d’un vrai polar (Cf : mon livre Voleurs d’organes : enquête sur un trafic ), menée par un certain Todd Leventhal de l’ United States Information Agency (une agence de propagande américaine, créée avec la CIA au lendemain de la seconde guerre mondiale) avec l’ambassade de Colombie et le Pr. José Ignacio Barraquer – un catalan installé à Bogota où il avait ouvert l’une des cliniques d’ophtalmologie les plus réputées du monde .

Accusée d’avoir payé les témoins du film, dont la mère du petit Jaison, un enfant colombien énucléé, j’avais attaqué en diffamation Me Pernet, l’avocat de l’ambassade de Colombie et un journaliste colombien, recruté par celle-ci, et avais gagné mes procès.

Dans son jugement du 11 janvier 1996, publié dans trois journaux dont Le Monde, le tribunal d’instance de Versailles condamne Me Pernet à me verser un franc symbolique pour diffamation, en constatant la « mauvaise foi » de l’avocat (qui m’avait diffamée dans une réunion publique à Versailles à laquelle était présent le Pr. Barraquer, venu spécialement de Bogota!) et le déclare « irrecevable à rapporter la preuve de la vérité des faits », alors même que l’avocat a produit , pour sa défense, la pseudo expertise réalisée sur l’enfant par trois médecins français, à la demande de l’ambassade de Colombie et du Pr. Barraquer. Cette « expertise », dont l’opacité n’a pas échappé au tribunal, a été contestée par un groupe de huit médecins, dont le Dr. Pham Chau, un chirurgien, expert auprès des tribunaux, ayant fait une spécialisation en « ophtalmologie médico-légale », et le Dr. Georges lagier, professeur à l’Université de Paris-VII, qui, dans leur rapport, concluent:

« Le rapport du professeur G. Renard est critiquable dans la forme comme dans le fond. Douze ans après les événements, il est hasardeux d’avancer une conclusion ophtalmologique définitive et tranchée, lors même que différentes hypothèses restent recevables. Si la vérité peut éclater au travers d’une expertise officielle, encore faudrait-il que cette dernière soit conduite sous conditions parfaitement contradictoires par désignation des représentants médicaux respectifs des parties en cause et sous vérification préalable de l’authenticité des éléments du dossier médical fourni ».

Dans le même temps, le Professeur José Ignacio Barraquer était débouté de son action en diffamation, assortie d’une demande de dommages-intérêts de huit millions de francs pour « préjudice commercial » ( !) en première instance, en appel, puis en cour de cassation.

La réaction de l’illustre professeur était d’ailleurs curieuse car je n’ai jamais accusé sa clinique d’être impliquée dans l’affaire Jaison. Dans le film, je notais simplement que le Pr. Barraquer , après plus d’une vingtaine de demandes d’ITW, avait refusé de me recevoir, ce qui était dommage vu qu’il était considéré comme le « pape de l’ophtalmologie » et vue la rumeur tenace sur le vol de cornées en Colombie.

Dans son jugement de janvier 1996, le tribunal de grande instance de Paris déboute Barraquer de son action en diffamation en disant dans ses attendus:

« le trafic d’organes est une réalité reconnue par les instances internationales et le milieu médical français »… « Mme Robin disposait d’éléments sérieux pour suspecter la régularité des pratiques en Colombie » … « en refusant de recevoir les reporters, les responsables de la clinique ont favorisé des soupçons qu’ils auraient pu lever en faisant connaître leurs activités » .

Finalement, après une enquête de six mois sur mon travail, le Prix Albert Londres m’était définitivement rendu.

Cela faisait plusieurs mois que des proches me sommaient d’intervenir sur ma fiche Wikipedia pour corriger les informations erronées ou partielles que des « rédacteurs » peu objectifs avaient rédigées. Débordée , je n’avais pas le temps de ressortir les trois cartons d’archives où j’ai soigneusement conservé depuis bientôt quinze ans ( !) coupures de presse (plus de cinq kilos !) , décisions de justice (les deux procès en diffamation que j’ai intentés et le procès qu’ a perdu le Pr. Barraquer) , témoignages sur les interventions de Todd Leventhal à Paris (auprès de William Bourdon, alors secrétaire général de la Fédération internationale des droits de l’homme , de Henri Amouroux, président du Prix Albert Londres ou ce fax que l’agent de l’USIA avait envoyé à Patrick de Carolis, un dimanche, pour lui demander de déprogrammer Voleurs d’Yeux de Zone interdite !) , à Strasbourg ou à Genève, expertise et contre-expertise médicales, etc. Tous ces documents sont bien sûr exploités dans mon livre que semble avoir lu soigneusement l’inconnu qui a rédigé la nouvelle version de la fiche mise récemment en ligne.

Or, curieusement, en plein mois d’août, des « rédacteurs » s’acharnent sur la partie consacrée à cette affaire au point d’intervenir trois à quatre fois par jour ! Qui sont-ils et pour qui roulent-ils ? Il suffit de cliquer sur « voir la discussion », pour se rendre compte que l’un, au demeurant très courtois, se présente comme un « docteur en biologie cellulaire » et l’autre est un certain « Apollon »…

À dire vrai, j’observe ce petit jeu avec beaucoup d’amusement et j’espère seulement que les dirigeants de Wikipedia , une encyclopédie interactive que j’ai, pour ma part, toujours soutenue, au point d’y faire référence dans mon film sur Monsanto –j’aime l’idée d’un savoir partagé, vérifié et validé par un consensus citoyen rigoureux – saura y mettre un terme sans être victime de « rédacteurs » qui ont manifestement une dent contre moi…

Au-delà de cette anecdote, j’informe mes lecteurs que je travaille actuellement à la création d’un site internet qui me permettra de mettre en ligne un certain nombre de mes reportages et documentaires , de mes livres, mais aussi des documents ou textes de réflexion sur le journalisme d’investigation.
J’y consacrerai , bien sûr, une large part à l’affaire de Voleurs d’organes, en communiquant tous les documents que j’ai précédemment évoqués, car j’estime qu’elle est exemplaire des difficultés rencontrées par les « descendants d’Albert Londres « (titre d’une oeuvre collective à laquelle j’ai participé).

Faire de l’investigation c’est révéler des choses que certains aimeraient maintenir cachées, et c’est donc forcément déranger. On risque des coups, et dans certains pays, on risque même la mort , – comme en Colombie où en 1988 j’avais réalisé un reportage pour le magazine Résistances sur les 26 journalistes assassinés au cours des trois années précédentes. Au printemps 1994, au moment où Voleurs d’organes était diffusé dans le monde entier et y compris aux Nations Unies, Amnesty International publiait un rapport spécial sur les violations des droits de l’homme en Colombie , où les responsabilités gouvernementales étaient clairement stigmatisées : pendant les quatre ans de la présidence de César Gaviria (1990-1994), 14 856 personnes avaient été assassinées, torturées ou portées disparues, et 5034 arrêtées pour des raisons politiques. Relayées par les médias nationaux, les autorités de Bogota menaient une véritable campagne contre l’organisation des droits de l’homme , qui, de guerre lasse, avait publié un sévère rappel à l’ordre, le 28 mai 1994 : « Exhortation au gouvernement colombien pour qu’il fasse passer le respect des droits de l’homme avant son image internationale ».

Voleurs d’organes dérangeait aussi l’USIA, dont la mission est de défendre l’image des Etats Unis, par ce que les statuts de l’agence appelle la « white propaganda » , la « propagande blanche » (censée être plus propre que la « black propaganda », la « propagande noire » – de la CIA) car je révélais les trafics d’êtres humains à la frontière mexicaine, et notamment à Tijuana, où les cliniques illégales spécialisées dans la greffe de reins pullulaient, avec la complicité tacite des pouvoirs publics .

Voleurs d’organes dérangeait, enfin, les mandarins, plus prompts à défendre leur image, coûte que coûte, plutôt que de dénoncer les brebis galeuses en leur sein. Avec en tête, le Pr. Barraquer, le « pape de l’ophtalmologie » qui avait reconnu devant la 17 ème chambre de Paris, que 30 % de l’activité de sa clinique concernait le « tourisme médical », à savoir des clients étrangers qui venaient notamment se faire greffer des cornées à Bogota.

À noter que, dans cette coalition du silence, l’Argentine faisait exception puisque que c’était le ministre de la santé qui avait confié à un juge, Victor Heredia, une instruction sur un vaste trafic d’organes opéré sur des malades mentaux d’un hôpital psychiatrique public, où j’avais pu filmer.

Je me souviens qu’au plus fort de la tourmente, j’avais relu le livre de Pierre Assouline Albert Londres, Vie et mort d’un grand reporter, où il citait ce mot de l’homme au chapeau noir, qui s’est attaqué à tous les tabous de son temps – le bagne de Cayenne, la traite des blanches, des noirs, les hôpitaux psychiatriques, les trafics de drogues et d’armes :
« J’ai voulu descendre dans les fosses où la société se débarrasse de ce qui la menace ou ce qu’elle ne peut nourrir. Regarder ce que personne ne veut plus regarder. Juger la chose jugée ».

Et Assouline d’ajouter :

« Persuadé que ses reportages sont un coup de pouce donné aux événements afin que les hommes souffrent moins, Albert Londres prête sa voix à ceux qui n’en ont pas (…) Il se sent plus proche, solidaire et complice, des héros et marginaux que des pouvoirs et notables. Les officiels, il les expédie en quelques paragraphes sur un air d’enterrement »….

Albert Londres qui définissait ainsi le métier de journaliste:

« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, c’est de mettre la plume dans la plaie ».

S’il avait vécu aujourd’hui, Albert Londres aurait très certainement porté sa plume dans l’univers des marchands de corps humains mais aussi dans celui des manipulateurs du génie génétique, considérant que les citoyens ont le droit d’être informés sur la manière dont les produits issus de l’activité scientifique sont mis sur le marché, surtout lorsqu’ils engagent la société tout entière, au risque de se faire quelques nouveaux ennemis acharnés…

la recherche indépendante interdite par les fabricants d’OGM

Avant de partir au Mexique, je n’avais pas eu le temps de commenter la décision récente de l’EFSA (European Food and Safety Authority) d’approuver le renouvellement de l’autorisation décennale du maïs MON 810 , un « feu vert controversé pour l’OGM de Monsanto » , selon le mot de Libération du 1er juillet 2009.

Je le fais, aujourd’hui, à la lumière d’un éditorial publié dans le magazine Scientific American à paraître en août, mais déjà en ligne.

Cet article confirme ce que j’ai écrit récemment sur mon Blog, après la publication dans le Washington Post d’une pétition adressée à l’Agence de protection de l’environnement des Etats Unis (EPA) par vingt-deux spécialistes américains des insectes ravageurs du maïs: il est impossible de conduire des études indépendantes pour évaluer l’effet éventuel des OGM sur l’environnement et la santé, tout simplement parce que les leaders de la biotechnologie, avec en tête Monsanto, bloquent l’accès de leurs semences aux chercheurs qui échappent à leur tutelle,sous prétexte que celles-ci sont brevetées.

La conclusion des pétitionnaires était alors sans appel: « en raison de cet accès limité, aucune recherche véritablement indépendante ne peut être légalement conduite sur de nombreuses questions critiques concernant cette technologie ».

L’article du Scientific American (dont j’ai tradit la partie principale) décrit précisément les mécanismes de la censure qui permettent à Monsanto et consorts d’empêcher toute recherche indépendante sur leurs produits, en contrôlant les études publiées, et donc d’entretenir l’illusion qu’ils ont été testés :

EXTRAIT ARTICLE:

« Lorsqu’il achète des semences génétiquement modifiées , le client doit signer un contrat qui limite l’usage qu’il peut en faire (si vous avez récemment installé un software, vous avez eu affaire au concept de Contrat de licence d’utilisateur final). Ces contrats sont considérés comme nécessaires pour protéger la propriété intelectuelle des entreprises et ils empêchent à juste titre titre que soit reproduite l’amélioration génétique qui rend la semence unique. Mais les compagnies de la biotechnologie comme Monsanto, Pioneer et Syngenta vont plus loin. Depuis une décennie leur contrat d’utilisateur interdisent explicitement l’utilisation de leurs semences pour la recherche indépendante. Sous la menace de poursuites judiciaires, les scientifiques ne peuvent pas tester les semences pour étudier les différentes conditions dans lesquelles elles se développent ou échouent. Ils ne peuvent pas comparer les semences d’une compagnie avec celles d’une autre. Et peut être encore plus important, ils ne peuvent pas examiner si les cultures génétiquement modifiées conduisent à des effets non désirés sur l’environnement.

Evidemment des études sur les semences modifiées génétiquement ont déjà été publiées. Mais ce sont exclusivement des études qui ont été préalablement approuvées par les firmes avant leur publication dans les revues scientifiques à comité de lecture. Dans plusieurs cas, des études qui avaient reçu l’accord implicite des compagnies semencières ont finalement été bloquées avant publication, parce que les résultats n’étaient pas flatteurs.

« Il est important de comprendre qu’il ne s’agit pas seulement d’ un refus systématique de toute demande de recherche, ce qui est déjà très grave » a écrit Elson J. Schields, un entomologue de l’Université de Cornell, dans une lettre à un officiel de l’Agence de protection de l’environnement (l’agence chargée de réglementer les conséquences environnementales des cultures transgéniques). Les refus sont sélectifs et les autorisations accordées en fonction du jugement porté par les industriels sur les chercheurs, selon qu’ils sont considérés comme « bienveillants » ou « hostiles » aux biotechnologies ».

FIN EXTRAIT ARTICLE

On comprend mieux comment l’EFSA, cette « institution contestée » parce que « génétiquement pro- OGM » (Le Monde du 30 juin 2009) a pu déclarer sans sourciller que le maïs MON 810 est  » sans risque pour la santé animale et humaine et ne constitue pas une menace pour l’environnement « .

Pour rendre son avis « éclairé », le comité scientifique européen, installé à Parme (Italie) , qui, depuis sa création en 2002 a rendu 42 avis sur les OGM – tous positifs , adoptés à l’unanimité , selon une procédure à main levée! – s’est basé sur une étude fournie par Monsanto , où des rats ont été nourris pendant 90 jours avec le maïs insecticide, dont les données brutes sont couvertes par le « secret commercial »! Cette étude a été réalisée par le même laboratoire (Hammond) qui avait conduit l’étude ridicule de 28 jours pour tester le soja roundup ready (voir mon livre et blog)!

S’ajoute à cela le profil des experts de l’EFSA dont les compétences sont très limitées, ainsi que l’explique le Pr. Pierre-Henri Gouyon, dans l’article du Monde du 30 juin:

« Nous avons affaire à des spécialistes de la biologie moléculaire, qui connaissent bien les problèmes de contamination aigüe, beaucoup moins les effets à long terme sur la santé et l’environnement. tester des OGM sur des rats pendant 90 jours, même à fortes doses, c’est très insuffisant. Certaines pathologies ont une lactence beaucoup plus longue ».

Sans oublier, bien sûr, le conflit d’intérêt, qui caractérise la majorité des experts de l’EFSA, ainsi que je le révélais dans mon livre et que Le Monde souligne également. Certes, comme le dit à mon confrère Catherine Geslain-Lanéelle, la directrice de l’EFSA, « s’il fallait disqualifier définitivement tous ceux qui ont travaillé avec l’industrie, on ne trouverait personne ».

Si le constat est recevable, on attend dans ce cas des « experts » qu’ils soient moins péremptoires, en précisant que leur avis est basé sur la seule étude existant sur le MON 810, à savoir celle de Monsanto!

Et que s’il n’existe pas de preuve de la toxicité du maïs MON 810, il n’existe pas non plus de preuve de l’absence de toxicité à long terme du maïs insecticide, car toutes les études qui auraient pu éventuellement le démontrer ont été INTERDITES!

Avec, en prime, une dernière question: si les OGM ne présentent aucun danger pour la santé et l’environnement, pourquoi les fabricants bloquent-ils la recherche indépendante? Auraient-ils peur de quelque chose???

bonjour du Chiapas

Il suffit que je prenne quelques jours de vacances sous le soleil mexicain pour que mes détracteurs personnels se déchaînent, révélant du même coup quelles sont les priorités actuelles de Monsanto: avec le cône sud (Argentine, Brésil, Paraguay), le Mexique représente indubitablement l’un des principaux champs de bataille de la multinationale de Saint Louis.

Normal: le Mexique est le centre d’origine du maïs et des millions de paysans cultivent la céréale depuis la nuit des temps du nord au sud du pays. Dans les régions de Oaxaca ou du Chiapas, où je suis actuellement, on compte des centaines de variétés traditionnelles (« criollas ») adaptées aux terroirs, climats ou pratiques alimentaires (voir photo).

C’est précisément pour protéger cette extraordinaire biodiversité que le gouvernement mexicain a déclaré un moratoire sur les cultures de maïs transgénique qui ne présentent, de surcroît, aucun intérêt pour les petits paysans , qui savent parfaitement cultiver la céréale de leurs ancêtres mayas ou aztèques sans engrais chimiques ni pesticides.

Or, sans intrants chimiques, les OGM pesticides de Monsanto ne donnent rien.

J’ai passé la journée dans une communauté indienne située à une trentaine de kilomètres de San Cristobal de las Casas: ici, comme dans les trois quarts du pays – à l’exception des Etats du Nord, où de grands producteurs blancs pratiquent une agriculture industrielle identique à celle des Etats Unis – les pratiques agricoles sont immuables, parce qu’elles ont fait la preuve de leur efficacité tant en termes de production qu’en termes de protection des ressources environnementales.

Le symbole de ce savoir faire c’est la « milpa » décrite par H. Garrison Wilkes, un spécialiste du maïs de l’Université du Massachusetts, comme « l’une des inventions les plus réussies que l’homme n’ait jamais créée ».

Le principe: les paysans cultivent en même temps une douzaine de plantes sur le même lopin de terre: du maïs, bien sûr, qui constitue la base de l’alimentation, mais aussi des haricots ( qui s’accrochent sur les pieds de maïs comme sur un tuteur: voir photo), des tomates, melons, chilis, avocats ou citrouilles qui nourrissent le sol, soit en vitamines , en aminoacides ou graisses.

Il est fréquent que les paysans sément également dans leur milpa de … l’amarante, cette « mauvaise herbe » qui est devenue le cauchemar des agriculteurs du sud des Etats unis, puisqu’ après dix ans d’épandages massifs de glyphosate sur les cultures roundup ready, elle est devenue résistante au roundup!

Proliférant sans retenue dans des sols laminés, elle est à l’origine d’un retournement de milliers d’agriculteurs nord-américains qui réclament à cor et à cri des semences non transgéniques (voir mon Blog).

Or, au Mexique, l’amarante, qui est une plante très riche en protéines, sert à fabriquer de délicieux gâteaux, appelés « alegria » que j’ai eu le plaisir de déguster (voir photo).

En attendant, le système de la milpa ne fait pas l’affaire des grands semenciers comme Monsanto qui exercent une pression permanente sur le gouvernement mexicain pour qu’il fasse disparaître les semences traditionnelles et impose dans tout le pays les semences hybrides de maïs et les OGM pesticides.

Depuis la présidence de Vicente Fox (l’ancien patron de Coca Cola pour l’Amérique centrale!), plusieurs lois ont été votées qui servent précisément ce but. La dernière en date est un texte, intitulé « ley de semillas » (loi des semences) qui vise à interdire la vente et l’échange de semences qui ne soient pas certifiées dans un catalogue validé par le ministère de l’agriculture (voir mon film » Blé: chronique d’une mort annoncée »).

Dans le même temps, le gouvernement promouvait un programme , intitulé « maïs solidario » (!) Celui-ci consiste à proposer aux petits paysans des « paquets « , comprenant des semences de maïs hybride, des engrais chimiques et herbicides.

Gratuits la première année, ces « paquets » sont payés, pour moitié par le gouvernement , avec le soutien de la banque mondiale, et pour moitié par Monsanto et consorts. A charge pour les paysans de racheter des semences, la deuxième année, car les hybrides de maïs sont quasiment stériles à la seconde génération…

Enfin, récemment, une loi a été votée, destinée à encadrer les cultures transgéniques, en contradiction totale avec le moratoire toujours en vigueur!

Mais le Mexique n’est pas à une contradiction près: depuis la signature de l’Accord de libre échange nord-américain (ALENA) en 1994, avec les Etats Unis et le Canada, le gouvernement a laissé entrer dans le pays des millions de tonnes de maïs en provenance du grand voisin du nord.

Grassement subventionné par Washington, le maïs américain a poussé dans les bidonvilles des dizaines de milliers de petits paysans mexicains, car il est vendu trois fois moins cher que le maïs local, qui ne bénéficie, lui, d’aucune subvention.

Evidemment, le gouvernement américain n’a de cesse d’exiger de son homologue mexicain qu’il « libéralise » son économie, en démantelant les services publics ou les systèmes d’aide notamment à l’agriculture…

Lors de la présentation de mon film et livre à Mexico, Mérida, et hier à San Cristobal de las Casas, j’ai apporté mon soutien à la campagne « Sin maïs, no hay pais », conduite par une vaste coalition d’associations, qui dénoncent, à juste titre, le processus d’accaparement des semences du pays par les multinationales comme Monsanto.

Voici quelques liens qui rendent compte de ma visite dans le pays:

www.otrosmundoschiapas.org/index.php

www.jornada.unam.mx/2009/07/12/index.php

www.elpoderdelconsumidor.org/multimedia.html

Photos de Solène Charrasse:

1: la biodiversité du maïs traditionnel
2: communauté indienne
3: milpa
4: le haricot accroché au pied de maïs
5: dégustant une « alegria » ( gâteau d’amarante)

Le moratoire est toujours en vigueur au Mexique

J’écris sur un clavier espagnol, faute de mieux! Quelques mots seulement pour répéter que, contrairement a ce qu’affirment Anton et autres GFP qui feraient bien de voyager un peu, le moratoire sur les cultures transgéniques est toujours en vigueur au Mexique, même si récemment un cadre légal a été mis en place permettant de les autoriser.

Monsanto et Syngenta ont dépose des demandes d’autorisation pour des essais en plein champ de maïs BT et roundup ready mais le gouvernement n’a toujours pas pris de décision, en raison même du moratoire.

D’où l’importance de ma visite, comme l’explique Greenpeace sur son site.