La mort du général Aussaresses, l’ « exécutant » des basses oeuvres de la République française (1)

Le général Paul Aussaresses est mort le 2 décembre, dans sa maison alsacienne de La Vancelle. C’est là que je l’avais rencontré longuement, pour la dernière fois, en octobre 2003. J’étais venue passer deux jours chez lui et sa seconde épouse Elvier, avec une caméra et une « mission » : celle de lui faire raconter comment Maurice Audin avait disparu, après son arrestation par des paras français à son domicile algérois,  le 11 juin 1957. Père de trois enfants, Maurice Audin avait alors 25 ans, il était assistant de mathématiques à l’Université d’Alger et membre du parti communiste. Comme Henri Alleg, le directeur du quotidien Alger républicain, qui fut arrêté le 12 juin 1957 au domicile des Audin, Maurice soutenait le combat du FLN pour l’indépendance de l’Algérie. J’ai rencontré plusieurs fois Henri Alleg , auteur de La Question (mort en juillet dernier), où il racontait les sévices qu’il avait subis et révélait l’usage massif de la torture par les militaires français ( publié par les Éditions de Minuit, le livre fut interdit en 1958). À plusieurs reprises, Henri m’avait demandé de profiter de ma « relation » avec Aussaresses pour lui extirper tout ce qu’il savait sur la disparition de Maurice Audin, à laquelle le « nettoyeur » fut probablement associé. L’historien Pierre Vidal Naquet (mort en 2006), qui fut l’un des premiers intellectuels français à dénoncer l’usage de la torture pendant la guerre d’Algérie, m’avait fait la même demande, lorsque je lui avais rendu visite à son domicile parisien, au moment où je terminais l’écriture de mon livre Escadrons de la mort : l’école française (il avait accepté de relire les parties de mon livre concernant la guerre d’Indochine et d’Algérie).

J’ai donc passé deux journées dans la maison alsacienne du général Aussaresses, à qui j’ai proposé un « marché » : je filme son récit sur la mort de Maurice Audin, et dépose la bande dans un coffre-fort, en présence  d’un huissier, et je m’engage à ne diffuser le témoignage qu’après sa mort .

Malheureusement, le général Aussaresses a refusé, craignant sans doute qu’il y ait une fuite, qui aurait pu le conduire devant les tribunaux.  En effet, si tous les crimes perpétrés en Algérie sont couverts par l’amnistie, décrétée par le général de Gaulle en 1962, il en est un qui est imprescriptible : celui de la disparition forcée. Or, le corps de Maurice Audin n’ayant jamais été retrouvé, il fait partie des trois mille disparus, enregistrés pendant la guerre d’Algérie.

Quand mardi dernier, alors que je tournais en Angleterre pour mon prochain film Sacrée croissance !, j’ai été contactée par des journalistes qui voulaient m’interviewer sur la mort d’Aussaresses, j’ai ressenti un grand regret : celui d’avoir échoué dans ma « mission »…

Mais, je dois reconnaître que j’ai passé l’année 2003 à côtoyer des généraux tortionnaires – en France, Argentine, États Unis et Chili– et que je n’en pouvais plus de la posture que j’étais contrainte d’adopter : rester polie, souriante, faire des ronds de jambe, afin d’encourager les militaires à parler. J’ai tenu pendant un an, car j’étais convaincue que  l’histoire ne s’écrit pas uniquement avec la voix des victimes, mais aussi avec celle des bourreaux. Pour qu’on n’oublie pas, car la mémoire c’est la vie…

Je mets ici en ligne, un petit extrait de l’interview que m’avait accordée Aussaresses pour mon documentaire Escadrons de la mort : l’école française. Cet extrait ne figure pas dans le film, mais dans les bonus du DVD ainsi que  dans le livre éponyme. Comme on le constatera, j’affiche un grand détachement par rapport aux paroles du général, qui raconte, avec une froideur implacable, la première fois qu’il a torturé un homme à mort.

 

La première fois que j’ai rencontré Aussaresses c’était dans le restaurant parisien de La Coupole. J’avais dû beaucoup batailler pour obtenir cette rencontre, car, à l’époque, son avocat Gilbert Collard lui avait recommandé de ne plus parler. Un an plus tôt, le général avait  publié un livre où il reconnaissait avoir pratiqué la torture et les exécutions sommaires en Algérie. Un témoignage cru, exempt de tout remords, qui lui a valu deux procès : un pour “ complicité d’apologie de crimes de guerre ”, à l’initiative de la Ligue des droits de l’homme ; et un autre, intenté par le Mouvement contre le racisme et l’amitié entre les peuples, qui l’accusait de “ crimes contre l’humanité ”.

Ayant fourbi mes armes, j’avais choisi de jouer cartes sur table, en lui disant ce qui était, au demeurant, le fond exact de ma pensée : “ Quelles que soient les raisons pour lesquelles vous avez agi ainsi, je ne pourrai jamais approuver ce que vous avez fait. C’est une question de morale. En revanche, au nom de la vérité historique, je trouve important que vous parliez. Je ne comprends pas que ceux qui n’ont cessé, avec raison d’ailleurs, de dénoncer le silence de la “Grande Muette” sur la guerre d’Algérie, vous tirent aujourd’hui dessus à boulets rouges… S’il faut vous juger, c’est pour ce que vous avez fait, pas pour ce que vous avez dit

—   Tout a été amnistié par De Gaulle au lendemain de l’indépendance algérienne, m’avait rétorqué le le général bardé de décorations.

—   Certes, lui avais-je répondu, mais ça ne vous gêne qu’on parle de vous comme d’un voyou de la pire espèce ? ”

—    Madame, avait souri Aussaresses , si je suis un voyou, alors je suis un voyou de la République… Toute ma vie, je n’ai été qu’un soldat qui a fait son travail de soldat pour la France parce que la France le lui a demandé… ”

J’ai raconté les suites de cette rencontre dans mon livre Escadrons de la mort : l’école française , dont je reproduis ici un extrait:

En tout cas, mon argument l’a convaincu. Pendant un an, je rencontrerai le général Aussaresses à plusieurs reprises : au siège d’Idéale Audience, le producteur du documentaire que je réalise pour Canal +, où je filmerai trois heures d’interview ; dans son appartement parisien, près de la Tour Montparnasse, et en Alsace, où il vit avec Elvier, sa seconde épouse[1].

À chaque rencontre, une question n’a cessé de me poursuivre : pourquoi parle-t-il ? Pourquoi a-t-il finalement accepté d’aller toujours plus loin dans le récit de sa “ carrière ” ? J’y vois trois raisons. D’abord, il est à la fin de sa vie et, à l’instar de ses collègues argentins qui me parleront également, il ressent, consciemment ou non, le besoin de soulager sa conscience, d’écrire lui-même sa part de l’Histoire, avant que d’autres s’en chargent à sa place. Ensuite, il aime parler aux femmes : avant moi, il y eut Florence Beaugé, du Monde[2]. Enfin, bien qu’il le nie farouchement, il a envie de mouiller les politiques, ceux qui l’ont “ envoyé au casse-pipe ”, pour reprendre l’une de ses expressions favorites. Ceux, en tout cas, qui ont fait du jeune provincial qui préparait Normale Sup, après avoir été premier prix de version latine au concours général, un spécialiste des “ coups tordus ” et des basses œuvres, en reconnaissant constamment ses mérites, puisqu’il a fini bardé de médailles avec le grade de général de brigade.

De fait, rien ne préparait Paul Aussaresses, né en 1918 dans le Tarn d’un père historien et directeur de journal, à devenir un spécialiste des “ coups durs et des coups tordus[3] ”. Il a vingt-deux ans quand il refuse de prêter serment au maréchal, parce qu’il “ n’apprécie pas sa politique collaborationniste ”. Quand est signé l’armistice, le 22 juin 1940, il choisit de rester sous les drapeaux et se porte volontaire pour commander une section de tirailleurs algériens au sud de Constantine. Devenu officier de carrière, il intègre l’école de Saint-Maixent qui s’était repliée avec l’école de Saint-Cyr à la caserne Miollis d’Aix-en-Provence, en zone libre. “ C’est à l’automne 1942, raconte-t-il, que je suis devenu agent secret. À vingt-quatre ans, ma famille bourgeoise de province et mon adolescence studieuse, mes convictions religieuses, les principes démocratiques auxquels j’étais attaché m’avaient préparé à devenir tout autre chose qu’une barbouze ou un tonton flingueur[4]. ”

C’est ainsi que le futur “ capitaine Soual ”, son nom de guerre, rejoint la France libre à Madrid, où il est recruté par les gaullistes pour les “ services spéciaux ”. Il est envoyé à Alger où un certain “ capitaine aviateur Delmas ” tente “ d’éprouver sa détermination ”.

L’anecdote vaut la peine d’être rapportée telle qu’Aussaresses la raconte, car elle constitue une justification a posteriori et une tentative de “ rationalisation ” de l’usage de la torture pendant la guerre d’Algérie : “ Je sais exactement ce que je risque, mon capitaine, dit la jeune recrue au “Bordelais” : si je suis pris, je serai fusillé, que je sois en uniforme ou pas. […] Alors Delmas éclata d’un fou rire nerveux : “Ah, mon pauvre garçon ! Quand on vous fusillera, vous serez bien content, car avant on vous aura torturé et la torture — croyez-moi —, c’est bien pire que la mort. C’est à cet instant que je compris un point essentiel : les guerres où l’un des deux camps mène une action clandestine sont d’autant plus impitoyables que la mauvaise foi y est l’arme principale. C’est cette mauvaise foi qui justifie toujours la violence et cette violence n’a jamais d’autre limite — pour paraphraser Clausewitz — que la violence mise en œuvre par l’adversaire. En l’occurrence, du moment que le principe était d’exécuter sommairement un ennemi auquel on refusait a priori toute qualité de combattant, cela supposait implicitement que l’on ait préalablement tiré de cet ennemi tous les renseignements dont il pouvait être porteur[5]. ”

Après cette explication pro domo, suit une note en bas de page encore plus tortueuse : “ C’est ce principe qui fut appliqué plus tard en Algérie. Mais la différence entre les résistants et le FLN, c’est qu’il n’était pas envisageable, dans l’esprit des résistants, de s’en prendre aux populations civiles. Pour cette raison, l’action de la Gestapo, lorsqu’elle torturait ou exécutait sommairement des résistants ou des combattants des forces spéciales — dont les objectifs étaient toujours militaires —, ne saurait être comparée à l’action menée en Algérie quelques années plus tard par l’armée française contre un FLN dont la politique était d’attaquer systématiquement des civils. De ce fait, j’ai souvent considéré que les terroristes sont les fils spirituels de la Gestapo qui s’en prenait, elle aussi, aux otages civils[6]. ”

De l’esprit des “ Jedburgh ” au “ 11e Choc ”

Le 18 novembre 1943, “ Jean Soual ” atterrit sur la “ terre promise ”, très précisément en Écosse. Après avoir subi des “ tests sévères ”, il est envoyé dans un camp d’entraînement des services spéciaux, où trois cent quarante volontaires — britanniques, américains, français, néerlandais, belges et canadiens — s’initient au parachutisme, mais aussi à toutes les techniques des barbouzes : “ J’allais ainsi accomplir, dans l’intérêt de mon pays et dans la clandestinité, des actions réprouvées par la morale ordinaire, tombant sous le coup de la loi et, de ce fait, couvertes par le secret : voler, assassiner, vandaliser, terroriser, écrit Aussaresses dans son livre. On m’a appris à crocheter les serrures, à tuer sans laisser de traces, à mentir, à être indifférent à ma souffrance et à celle des autres, à oublier et à me faire oublier. Tout cela pour la France[7]. ”

Les consignes sont simples : “ Taper très vite, sans jamais se poser de questions, pour tuer l’adversaire le plus vite possible. ” Ou encore : “ S’affranchir de tout élan moral, ne jamais chercher à être loyal, mais être simplement efficace et décidé à sauver sa vie par n’importe quel moyen. ” Et Aussaresses de commenter : “ Je suis sûr que c’est cet état d’esprit très particulier […] qui m’aida à tenir le coup lorsque, onze ans plus tard, je fus envoyé en Algérie. ”

En fait, le jeune Français est entré dans la famille des “ Jedburgh ”[8], la fine fleur des forces spéciales aériennes interalliées, où il fait la connaissance de l’avocat américain William Colby, futur patron de la CIA, au moment de la guerre du Viêt-nam, version US. La mission des “ tontons flingueurs ” est plus que risquée : s’infiltrer derrière les lignes ennemies, par équipes de trois — un Américain ou un Britannique, un officier du pays où se déroule l’opération et un opérateur radio —, pour soutenir les maquis de la Résistance, en prévision du débarquement des Alliés. C’est ainsi qu’Aussaresses est parachuté dans le maquis de l’Ariège, commandé provisoirement par un certain… Marcel Bigeard. Et puis, le 25 avril 1945 — “ Et là, disent ses anciens camarades, il fallait vraiment en avoir… ” —, il saute de nouveau, mais cette fois en uniforme allemand, entre Berlin et Magdebourg, pour prendre contact avec les prisonniers du camp 11A d’Altengrabow.

Repéré pour sa témérité à toute épreuve, il est affecté, à la fin de la guerre, à la DGER, la Direction générale des services spéciaux, bientôt rebaptisé SDECE, le Service de documentation extérieure et de contre-espionnage[9]. En clair : les services secrets, surnommés dans le jargon la “ Piscine ”, dont le siège est situé dans la caserne Mortier, à l’angle du boulevard Mortier et de la rue des Tourelles, dans le XXe arrondissement parisien.

À la différence de la Direction de la sécurité du territoire (DST), le SDECE n’est pas un service de police, mais un organisme militaire qui dépend directement du Premier ministre. Officiellement, sa mission est “ de rechercher hors du territoire national tous les renseignements et la documentation susceptibles d’informer le gouvernement, pour signaler aux administrations intéressées les agents des puissances étrangères qui nuiraient à la défense nationale ou à la sûreté de l’État[10] ”. Il dispose d’une structure éminemment clandestine, le “ Service Action ”, dont les agents sont habilités à mener toutes sortes d’“ opérations spéciales ” : “ L’élimination physique fait partie de la routine quotidienne des hommes du “Service Action” du SDECE, raconte Thyraud de Vosjoli, un ancien de la “Piscine” qui dirigea l’antenne du SDECE à Washington au début des années 1950. Ces hommes font leur devoir et sont fiers de leur professionnalisme, conscients de rien avoir à envier au savoir-faire de la Gestapo ou du KGB[11]. ”

C’est précisément dans le Service Action qu’est intégré le capitaine Aussaresses, en 1946. Jacques Morlane, son patron, lui demande de créer une “ unité spéciale ”, le 11e “ bataillon parachutiste de choc ”, dit “ 11e Choc ”, véritable bras armé des services secrets[12]. Nommé commandant, il est affecté à la citadelle de Mont-Louis, à 80 km à l’est de Perpignan, où il entraîne quelque 850 hommes, dont un certain Philippe Castille (qui mènera l’attentat contre le général Salan en 1957, avant de devenir le chef des plastiqueurs de l’OAS). L’insigne de ce bataillon spécial, c’est “ Bagheera ”, une tête de panthère noire choisie “ pour honorer la mémoire des membres du service Action en Extrême-Orient ”. C’est pour avoir créé le 11e Choc que Paul Aussaresses est décoré de la Légion d’honneur, à vingt-neuf ans.

“ Quelle était la mission du 11e Choc ?

— Eh bien, il devait mener ce qu’on appelait alors la “guerre psychologique”, partout où c’était nécessaire, et notamment en Indochine.

— Concrètement ?

—   Je préparais mes hommes à des opérations clandestines, aéroportées ou non, qui pouvaient être le plasticage de bâtiments, des actions de sabotage ou l’élimination d’ennemis… Un peu dans l’esprit de ce que j’avais appris en Angleterre[13]. ”

Si j’ai tenu à rappeler le parcours d’Aussaresses avant la guerre d’Algérie, c’est parce que je voulais qu’on comprenne bien une chose : l’homme n’entrait pas dans la catégorie simplificatrice – et somme toute, plus rassurante- des « grandes brutes fachos », aveuglées par leur bêtise ; il n’était pas non plus un « électron libre », torturant tout seul dans son coin.

Non ! Il était un « exécutant », pour reprendre la terrible expression de Pierre Messmer (décédé en 2007), lorsque je l’ai interviewé pour mon film. L’ancien para d’Indochine, qui fut ministre des Armées de 1960 à 1969, m’avait expliqué qu’il avait été sollicité par Robert McNamara, le secrétaire de la Défense du président Kennedy, qui voulait que la France envoient des « spécialistes » former les militaires américains aux techniques de la « guerre antisubversive ». Il avait choisi des militaires ayant une « expérience en Algérie », comme Aussaresses, qui, m’avait-il dit « n’était pas un penseur, mais un exécutant ».

Les « exécutants » obéissent aux ordres des « penseurs », en l’occurrence ici les politiques (le gouvernement et les députés) qui ont donné les pleins pouvoirs aux paras du général Massu pour mâter la rébellion indépendantiste.

Et les politiques, comme Pierre Messmer, qui n’a jamais été inquiété (ses obsèques ont été célébrées en grande pompe aux Invalides), n’ont jamais eu de compte à rendre, ni devant les tribunaux, ni devant l’histoire officielle qui continue de les encenser.

Voilà pourquoi je dis qu’il est facile de tirer à boulets rouges sur celui qui se vantait d’avoir créé et dirigé un « escadron de la mort », dont le modèle sera ensuite exporté vers l’Amérique du Nord et du Sud ; même si cela ne l’exonère en rien de sa responsabilité individuelle, n’oublions pas que Aussaresses n’était qu’une « petite main » , certes pleine de sang, dont les forfaits furent encouragés par une politique d’État, celle de la France. Or, à ce jour, les dirigeants de la France, qui furent impliqués dans la guerre sale algérienne, n’ont jamais été publiquement condamnés.

Comme l’a dit Bernard Stasi, le 10 mars 2004, au moment de me remettre le prix du Meilleur Documentaire Politique au … Sénat, « nous ne sommes pas encore au bout du chemin », si nous voulons que « notre pays mérite effectivement d’être considéré comme le pays des droits de l’Homme »...


[1]  La première femme d’Aussaresses était aussi membre des services spéciaux. Elle est décédée peu après la publication du livre de son ex-mari sur l’Algérie. Celui-ci dit qu’elle n’a pas supporté les révélations qu’il y faisait…

[2]  Florence Beaugé, “ Le secret du général Aussaresses ”, Le Monde, 20-21 mai 2001.

[3]  Paul Aussaresses, Services spéciaux, Algérie 1955-1957, op. cit., p. 18.

[4]  Paul Aussaresses, Pour la France. Services spéciaux 1942-1954, Le Rocher, Monaco, 2001, p. 7.

[5]  Ibid., p. 83.

[6]  Ibid., p. 84.

[7]  Paul Aussaresses, Services spéciaux, Algérie 1955-1957, op. cit., p. 15.

[8]  Du nom de l’abbaye écossaise en ruines.

[9]  Le SDECE deviendra l’actuelle DGSE, en 1981.

[10]  Cité par Roger Faligot et Pascal Krop, DST, police secrète, Flammarion, Paris, 1999.

[11]  Cité par Douglas Porch, Histoire des services secrets français, Albin Michel, Paris, 1995, tome 2, p. 130.

[12]  Il sera dissous en décembre 1963, sur ordre du général De Gaulle, à cause de l’attitude de ses cadres, majoritairement favorables à l’OAS.

[13]  Entretien avec l’auteur, 21 octobre 2003.

Sofia Gatica en danger!

Je viens de recevoir des nouvelles très inquiétantes d’Argentine. Il y a une semaine , Sofia Gatica, la militante anti-OGM, lauréate du Prix Goldman (voir sur ce blog) a été menacée par un individu avec un pistolet, alors qu’elle se rendait au travail. Quelques jours plus tard, elle a été tabassée par deux sbires de l’agro-business, au moment où elle montait dans un bus:

http://www.lavoz.com.ar/ciudadanos/atacaron-sofia-gatica-una-de-las-madres-de-ituzaingo

http://www.youtube.com/watch?v=lLxj79swGFM&feature=youtu.be

Hier, l’infanterie est intervenue sur le site de Las Malvinas, près de Córdoba, où Monsanto veut installer la deuxième plus grande usine de semences du monde. À l’instar de Notre Dame des Landes, le site est occupé depuis plusieurs semaines, ainsi que je l’ai raconté aussi sur mon Blog. D’après les informations que j’ai reçues, il y a plusieurs blessés, dont Sofia, qui souffre d’un traumatisme crânien.

Je mets ici en ligne l’interview que m’a accordée Sofia (en deux parties), en juin dernier, lorsqu’elle est venue témoigner à l’UNESCO de son combat. Je l’avais reçue à mon domicile, après la première marche mondiale contre Monsanto et avant l’occupation du site de Las Malvinas. Faites circulez!

Sofia, combattante anti-OGM / Première partie from M2R Films on Vimeo.

Sofia, combattante anti-OGM / Deuxième partie from M2R Films on Vimeo.

Pourquoi je soutiens Nouvelle Donne

J’ai participé aujourd’hui au lancement de Nouvelle Donne, le parti créé par des acteurs de la société civile et les fondateurs du Collectif Roosevelt, comme Edgar Morin, Stéphane Hessel, Pierre Larrouturou, Dominique Méda, Bruno Gaccio ou Susan George :

http://www.roosevelt2012.fr/

photoND

J’ai suivi de très près les travaux et propositions du collectif qui avait le courage de dire que la crise sociale et économique, dans laquelle nous nous enfonçons jour après jour, n’était pas une fatalité, mais bien le résultat d’un système financier dérégulé et d’une machine capitaliste qui mène la planète à sa perte.

Je rappelle, par exemple, que l’explosion de la dette publique est principalement due «  aux plans de sauvetage de la finance et surtout à la récession provoquée par la crise bancaire et financière qui a commencé en 2008 », ainsi que l’explique le manifeste des Économistes atterrés :

http://www.atterres.org/page/manifeste-d%C3%A9conomistes-atterr%C3%A9s

Il y a deux semaines, j’ai été contactée par Dominique Méda et Pierre Larrouturou qui m’ont annoncé la création de Nouvelle Donne. Ils m’ont demandé si je voulais soutenir le nouveau parti, qui entend présenter des candidats aux élections européennes de 2014. À dire vrai, j’ai beaucoup hésité, car jusqu’à présent j’avais tenu à rester à l’écart des formations politiques, pour préserver mon indépendance et aussi parce que je suis très occupée par mon travail de journaliste.

J’ai finalement accepté, car j’estime que nous sommes actuellement dans une impasse politique d’autant plus inquiétante que la « crise » , loin de s’estomper, va perdurer.

Rien d’étonnant à cela  : il ne s’agit pas d’une « crise », mais bel et bien d’un effondrement systémique qu’on ne saura arrêter tant qu’on ne sortira pas des rails, qui nous conduisent droit dans le mur. En attendant, les effets dévastateurs de l’ « effondrement » (en anglais, on parle de « collapse »)  sont de plus en plus évidents : chômage massif, pauvreté, inégalités, insécurité, angoisse pour l’avenir, bouleversements climatiques, extinction de la biodiversité, explosion des maladies chroniques, etc.

Nous vivons une époque difficile qui demande des décisions politiques courageuses et innovantes, pour enclencher la transition dont nous avons besoin de toute urgence.

Or, force est de constater que le gouvernement est complètement à côté de la plaque. Empêtré dans le pilotage improbable du Titanic, il navigue à vue, provoquant un énorme désarroi dans tout le pays.

J’ai vu ce désarroi au cours de la « tournée » qui m’a conduite dans quatre-vingt dix villes et villages de France, pour participer à des projections de mon film Les moissons du futur. Un peu partout, j’ai rencontré des élus ou militants socialistes, écologistes, centristes, associatifs,  désabusés et démobilisés, finissant par avouer qu’ils n’iraient pas voter aux prochaines élections. Dans le même temps, ils avouaient leur inquiétude face à la montée du Front National, en train d’occuper le terrain de la désillusion et du désespoir.

C’est mathématique : les résultats du parti de Marine Le Pen seront d’autant plus élevés que sera élevé le taux d’abstention.

Si j’ai décidé de soutenir Nouvelle Donne c’est précisément parce que je ne veux pas que les abstentionnistes, dont je comprends pourtant le désarroi, fassent le lit du Font National.

Je veux leur dire qu’un autre monde est possible et qu’il reste à construire :

http://www.nouvelledonne.fr/

 Contrairement à ce qu’ont affirmé certains médias, comme Le Nouvel Observateur, il ne s’agit pas , pour moi en tout cas, de « concurrencer le PS », ni Europe Écologie Les Verts ou le Front de Gauche, mais de taper sur la table, pour qu’on entende, enfin, la voix de tous ceux et celles qui n’en peuvent plus de l’inertie des politiques, et de leur incapacité à voir plus loin que le bout de leur mandat.

Je précise, pour finir, que je ne veux pas être députée européenne, car j’entends continuer mon métier de journaliste, tant que j’aurai la conviction que les films et livres peuvent servir à quelque chose…

moissons de médailles en Argentine!

Je rentre du Brésil et de l’Argentine où j’étais en tournage pour mon prochain film Sacrée croissance !

À Fortaleza, j’ai rencontré l’équipe de Joaquim Melo, un ancien séminariste qui a créé une banque communautaire et une monnaie sociale dans un ancien bidonville , le Conjunto Palmas. Le Palmas est devenu un modèle dans tout le Brésil : on compte, aujourd’hui, plus de cent banques communautaires et monnaies locales dans tout le pays ! Mais je n’en dirai pas plus !

À Rosario, j’ai filmé un programme exemplaire d’agriculture urbaine, soutenu activement par la municipalité, qui a créé un département comptant vingt-cinq techniciens et ingénieurs agronomes. J’y ai notamment rencontré Monica Fein, la maire de cette ville de plus d’un million d’habitants, qui mène une politique très active pour développer l’économie sociale et solidaire.

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Mon séjour à Rosario a été très mouvementé, car il coïncidait avec la sortie en librairie de mon livre Les moissons du futur. Du coup, j’ai été poursuivie par une vingtaine de journalistes, qui connaissaient mes films et mon livre  Le monde selon Monsanto, et Argentine : le soja de la faim.

Il faut dire que Rosario est la capitale du soja transgénique, qui a envahi tous les champs de la province de Santa Fe. Du coup, j’ai été reçue par Antonio Bonfatti, le gouverneur, à qui j’ai remis un exemplaire de mon livre.  Dans l’interview filmée qu’il m’a accordée, il m’a dit que le modèle transgénique n’était pas durable et qu’il mettait en danger la santé des habitants et la souveraineté alimentaire de l’Argentine.

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J’ai senti très nettement que les lignes étaient entrain de bouger dans l’enfer du soja…

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J’ai aussi été sollicitée par Ruben Chababo, le directeur du tout nouveau Musée de la mémoire, dédié aux années noires de la dictature et qui m’a beaucoup touchée. Au printemps dernier, j’avais été citée comme témoin protégé dans un procès qui s’est déroulé à Rosario, contre le général Diaz Bessone, que j’avais réussi à faire parler dans Escadrons de la mort : l’école française, et qui est aujourd’hui en prison, en partie grâce à mon film (voir sur ce blog).

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Et puis, surprise ! J’apprends que l’Université de Rosario, la mairie et le parlement régional ont décidé, chacun de leur côté de me nommer « visiteur illustre » !

Je suis donc allée au conseil municipal recevoir ma décoration !

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Les deux autres m’ont été remises lors de la projection des Moissons du futur qui a réuni plus de huit cents personnes ! Une soirée inoubliable où on a vu un grand producteur de soja transgénique annoncer publiquement qu’il avait décidé de passer à l’agriculture biologique ! J’y reviendrai ultérieurement…

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C’est le doyen de l’Université de Rosario, le Dr.Miguel Angel Farroni, qui m’a remis la décoration, proposée par la faculté de médecine, où mon livre et film Notre poison quotidien font partie de la bibliographie obligatoire des étudiants. Le soir de la projection, plusieurs étudiants en médecine sont venus me saluer pour me remercier…

Pour finir, j’ai décidé de soutenir publiquement l’occupation du site de Las Malvinas, où Monsanto veut installer la deuxième plus grande usine de production de semences transgéniques du monde. J’y reviendrai aussi ultérieurement…

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Quatre représentants du collectif qui occupe le site étaient venus spécialement de Córdoba pour me rencontrer.

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Merci à Sergio Goya, pour les photos.

Arrêtons le crime d’écocide!

Comme je l’ai écrit dans mon précédent post, j’invite tous les internautes à signer la pétition européenne citoyenne  pour que le crime d’écocide soit reconnu juridiquement. Cette pétition est importante, car si un million de signatures sont réunies en Europe avant le 21 janvier 2014, dans au moins sept pays de l’Union, la Commission européenne devra examiner la demande pour éventuellement émettre une directive. Pour signer, il suffit de consacrer quelques minutes sur ce site:

http://www.endecocide.eu/?lang=fr

 Par ailleurs, le site « Arrêtons l’écocide en Europe » vient de mettre en ligne la vidéo où j’explique pourquoi il est important de signer cette pétition:

 http://www.youtube.com/watch?v=zi5iFm2DP84

Faites la circuler sans réserve!!

 

L’Associated Press confirme le désastre provoqué par les OGM en Argentine

 

Monsanto encore et toujours !

Je vous écris de Fortaleza (Brésil) où je suis en tournage pour mon prochain film Sacrée croissance !

Mardi prochain, l’Université du Ceara organise une projection du Monde selon Monsanto, qui est sorti en DVD au Brésil, il y a quatre ans. Je viens de passer la journée dans Le Conjunto Palmeiras, une favela, située à vingt kilomètres de Fortaleza,  qui a été transformée grâce à la création d’une banque communautaire et d’une monnaie sociale.

À peine rentrée dans ma chambre d’hôtel, j’ai dû répondre à une demande d’interview d’une journaliste argentine. Pour annoncer ma visite prochaine à Rosario, où je filmerai un programme exemplaire d’agriculture urbaine, elle voulait que je commente un article publié par l’Associated Press sur le désastre sanitaire et environnemental provoqué par les OGM de Monsanto.

Tout ce que rapportent les deux journalistes de l’agence américaine confirment ce que j’ai dénoncé en … 2005 dans mon reportage Argentine : le soja de la faim, diffusé sur ARTE et que vous pouvez consulter sur mon site :

http://www.mariemoniquerobin.com/argentineextrait.html

Les Anglophones peuvent consulter l’article de AP à ce lien :

http://www.concordmonitor.com/home/8991746-95/argentines-link-health-problems-to-monsanto-agrochemicals

 Pour les autres, vous pouvez lire la traduction française, réalisée par Benjamin Sourice pour Combat Monsanto :

http://www.combat-monsanto.org/spip.php?article1040

 La semaine prochaine, je rencontrerai le professeur Damián Verzeñassi (le chercheur dont parle l’article de AP) qui organise , avec Antonio Lattuca, en charge du programme d’agriculture urbaine de Rosario, une projection des Moissons du futur, dans une salle de 500 personnes.

Le même jour, le doyen de l’Université de Rosario me remettra une décoration qui me va droit au cœur : celle d’ « invitée d’honneur ».