Christian Velot au salon Marjolaine

Dimanche 9 novembre, j’ai donc présenté trois de mes films au salon bio Marjolaine, qui ferme ses portes demain au Parc Floral.

Christian Vélot, enseignant-chercheur en génétique moléculaire à l’Université Paris Sud , membre du CRIIGEN de Corinne Lepage et de la Fondation pour une science citoyenne du Pr. Jacques Testart, a participé au débat qui a suivi la projection de mon film « Le monde selon Monsanto ».

Je mets en ligne quelques extraits de son intervention.

Trois films au salon Marjolaine

Du 8 au 16 novembre se tiendra le salon Marjolaine du bio et développement durable, au Parc Floral de Paris. 520 exposants, 120 ateliers et un cycle de ciné-conférences auquel je vais largement participer puisque sont programmés trois de mes films.
Ci-joint le programme:

Dimanche 9 novembre
OGM et crise alimentaire

12 h : Blé, chronique d’une mort annoncée (52 mn)
Le blé, cultivé sur les cinq continents et nourriture de base d’un homme sur trois, compte d’innombrables variétés. Cette richesse biologique est aujourd’hui largement menacée par les firmes agroalimentaires qui d’ores et déjà contrôlent les semences. Ce film qui dénonce la logique d’uniformisation des formes de vie est un plaidoyer pour la sauvegarde de la biodiversité cultivée et de l’agriculture vivrière.

Documentaire de Marie-Monique ROBIN, journaliste free-lance, grand reporter lauréate du prix Albert Londres, réalisatrice de nombreux documentaires sur les droits de l’homme et les atteintes à l’environnement et les OGM. Projection suivie d’un débat avec la réalisatrice.

14 h – Argentine, le soja de la faim (22mn)
Pour avoir tout misé sur le soja transgénique, l’Argentine risque de tout perdre, y compris sa sécurité alimentaire. En 1996, Buenos Aires autorise la culture de cet OGM, conçu par la multinationale américaine Monsanto pour résister au Roundup, son puissant herbicide. Les agriculteurs n’avaient pas prévu l’apparition de mauvaises herbes tolérantes au Roundup et donc la nécessité de pulvériser davantage d’herbicide. Ces épandages massifs anéantissent les autres cultures, provoquent des problèmes de peau, de thyroïde et des complications respiratoires. S’y ajoute une catastrophe écologique avec une déforestation massive..

Documentaire de Marie-Monique ROBIN, suivi d’un débat avec la réalisatrice et Fabrice NICOLINO, journaliste, co-auteur de “Pesticides, révélations sur un scandale français“ et auteur de “La faim, la bagnole, le blé et nous“, une dénonciation des biocarburants.

16 h30 – Le monde selon Monsanto (109 mn)
Implantée dans quarante-six pays, Monsanto est devenue le leader mondial des OGM, mais aussi l’une des entreprises les plus controversées de l’histoire industrielle. Depuis sa création en 1901, la firme a accumulé des procès en raison de la toxicité de ses produits, mais se présente aujourd’hui comme une entreprise des sciences de la vie convertie aux vertus du développement durable. A partir de documents inédits, de témoignages de victimes, de scientifiques et d’hommes politiques, ce film reconstitue la genèse d’un empire industriel qui a grand renfort de mensonges, de collusion avec l’administration américaine, de pressions et de tentatives de corruption est devenu le premier semencier du monde, permettant l’extension planétaire des cultures OGM sans aucun contrôle sérieux de leurs effets sur la nature et la santé humaine.

Documentaire de Marie-Monique ROBIN, suivi d’un débat avec la réalisatrice et Christian VELOT, maître de conférences en génétique moléculaire à l’Université Paris Sud et responsable d’une équipe de recherche à l’Institut de Génétique et Microbiologie. Ses prises de position sur les OGM valent à ce chercheur un non-renouvellement de son contrat.

500 personnes à Chemillé

Hier soir le Foirail de Chemillé (Maine et Loire) a fait salle comble. Sur les 5OO personnes qui s’étaient déplacées, une quarante n’a pas pu entrer faute de place. J’ai donc dû faire deux conférences!
La soirée fut très émouvante, car de nombreux agriculteurs étaient présents: des producteurs conventionnels qui continuent de suivre le modèle productiviste imposé dans nos campagnes depuis une quarantaine d’années, et des producteurs bio. Comme je le dis et le redis partout où je me déplace, il n’est pas question de jeter la pierre aux paysans, qui sont les premières victimes de l’agriculture industrielle qui a provoqué la fermeture de centaines de milliers d’exploitations agricoles et qui empoisonne leurs champs et leur santé.
Il s’agit désormais, tous ensemble – paysans, consommateurs et élus- de tirer le bilan d’un modèle désastreux et de construire résolument le futur, pour éliminer, petit à petit, les produits toxiques de notre environnement et de nos assiettes. Les agriculteurs ne s’en porteront que mieux, car il n’est pas la peine de discuter longtemps avec eux, pour se rendre compte qu’ils n’en peuvent plus de ce système mortifère qui les conduit tous, et nous avec, dans le mur…
Hier soir, Jean-François Cesbron, le maire de Saint Lézin et président de la Chambre d’agriculture départementale a pris la parole, visiblement touché par le film. Il a expliqué que la chambre d ‘agriculture s’était lancée dans un programme de réduction progressive des pesticides et qu’elle avait créé une cellule de soutien à l’agriculture bio. Il s’est engagé aussi à éliminer l’usage du roundup sur sa commune. À suivre!

Intoxication: un agriculteur victime d’un produit de Monsanto

Alors que je me rendais à une interview à Angers Télé, j’ai été contactée par un confrère de la Charentes Libre à propos d’une affaire dont j’avais été informée lors d’une projection de mon film à Ruffec, au printemps dernier: celle de Paul François, un producteur de maïs victime d’une grave intoxication après avoir épandu du Lasso (en 2004), un pesticide produit par Monsanto, aujourd’hui interdit.
Il est malheureux de voir que c’est toujours la même histoire qui se répète…
Je copie ici l’article publié par mon confrère régional.

Les faits du jour en région
L’INTOXICATION AUX PESTICIDES AVÉRÉE
Le tribunal des affaires de Sécurité sociale établit un lien entre pesticides et la maladie d’un agriculteur du Ruffécois. Une première étape importante
04.11.2008
Jean-François BARRÉ

Paul François, agriculteur à Bernac, vient de gagner une manche judiciaire. Il a aussi intenté une action contre Monsanto, le fabriquant du pesticide Lasso

Le tribunal des affaires de Sécurité sociale (Tass) «dit que la rechute déclarée le 29 novembre 2004 par Monsieur Paul François est directement liée à l’accident du travail dont il a été victime le 27 avril 2004 et qu’elle doit être prise en charge au titre de la législation professionnelle». Paul François, agriculteur près de Ruffec, vient de marquer un point décisif. En rendant sa décision hier matin, le tribunal a considéré qu’il avait bien été victime d’un «accident du travail» sur sa ferme de Bernac, en cet après-midi d’avril 2004. Ce que lui contestait jusqu’alors Aaexa, l’assurance des accidents du travail pour les agriculteurs.

Paul François avait été victime d’une intoxication massive alors qu’il nettoyait sa cuve d’épandage de pesticides. Quasiment un gazage. A l’époque, il utilisait dans ses maïs du Lasso, produit par le géant américain de la chimie Monsanto.

Des comas à répétition, des hospitalisations à la chaîne, des malaises à suivre, un système immunitaire aujourd’hui défaillant…, pendant près de quatre ans, Paul François a mobilisé la communauté scientifique, d’expertise en contre-expertise, des urgences de Ruffec à l’hôpital Lariboisière à Paris. Tout le monde s’est arraché les cheveux pour tenter de comprendre pourquoi, plus d’un an après son intoxication initiale, l’agriculteur rejetait encore des doses de toxines, à des taux plus ou moins variables, alors que son organisme aurait dû éliminer le produit en quelques jours, voire en quelques semaines.

C’est cette interrogation qui avait incité Aaexa a lui refuser la qualification d’accident du travail ou de maladie professionnelle.

Le tribunal des affaires de Sécurité sociale a fondé sa décision sur la base de deux rapports d’experts, celui du docteur Ta Minh, et surtout celui du professeur Jean-François Narbonne, chercheur à l’université de Bordeaux, qui a apporté des éléments d’explication du phénomène.

«Monsanto n’est pas le seul

petit vilain»

Pour Paul François, c’est un soulagement. «J’avais peur que l’on reparte avec un énième expert. Mais le tribunal s’est donné les moyens de juger avec les avis de plusieurs d’entre eux, et non des moindres», estime-t-il. Son dernier souci, c’est que Aaexa fasse appel. Mais «moralement, c’est réconfortant. On m’avait même accusé d’avoir inhalé volontairement le produit. C’est aussi une reconnaissance. Ma maladie, je ne l’ai pas inventée.»

Hier soir, Patrick Blanchon, le représentant régional d’Aaexa à Poitiers, indiquait seulement que le dossier allait vraisemblablement être soumis aux médecins conseils de la Mutualité sociale agricole (MSA) pour qu’ils se prononcent sur l’opportunité d’un appel.

Ce jugement, c’est surtout un élément de plus apporté au dossier que l’agriculteur compte opposer, vraisemblablement à l’été, à Monsanto, le fabriquant du Lasso aujourd’hui interdit à la vente en France. Une procédure en responsabilité a été engagée devant le tribunal de grande instance (TGI) de Lyon où est implanté le siège français de Monsanto. «Ce qui est fondamental dans ce jugement du Tass, commente François Lafforgue, l’avocat parisien de l’agriculteur, c’est qu’il reconnaît qu’il y a bien un lien de cause à effet entre le produit utilisé par Paul François et l’affection contractée depuis lors. C’est l’une des premières fois que ce lien est reconnu, après expertises, par le Tass.»

Dès lors, le dossier prend une autre dimension. C’est Paul François contre Monsanto. Une première, là aussi, de la part d’un particulier contre la firme. «On sait que ça va être le pot de terre contre le pot de fer», envisage l’agriculteur qui a choisi d’aller au bout de sa démarche. «Je le fais pour moi. Je le fais aussi pour les autres agriculteurs. Pour déculpabiliser ceux qui ont été montrés du doigt alors qu’ils n’ont utilisé en pleine confiance que des produits homologués.» L’affaire risque de faire du bruit. «Mais si cela permet à des agriculteurs de prendre conscience…, espère Paul François. Mais Monsanto n’est pas le seul petit vilain. D’autres firmes sont dans la même logique. Elles ne valent pas mieux.»

Pendant ses quatre années de maladie, Paul François s’est beaucoup intéressé à la question. «Pourquoi, dans certains services de néphrologie, huit patients sur dix sont des agriculteurs chez qui il y a davantage de cancers de la prostate, du pancréas, des problèmes de fécondité», s’interroge-t-il.

S’arranger ou le procès

Hier encore, il avait le soutient de Marie-Monique Robin, l’auteur du livre et du documentaire «Le monde selon Monsanto». «Je suis ravie. Et la question, maintenant, c’est celle de tous ces agriculteurs qui ont Parkinson, Alzheimer. Et l’épidémie ne fait que commencer. Aujourd’hui, c’est un premier pas . Pour ceux qui ont été exposés aux produits aujourd’hui interdits mais utilisés depuis vingt ans, de manière chronique tout au long d’une carrière, ce sera peut-être plus difficile.»

Pourtant, Paul François dit qu’il commence à prendre la mesure du phénomène. «J’ai reçu des mails, des courriers, des coups de fil. Des gens qui s’interrogent sur les produits. L’un m’a dit que son médecin pensait que c’était la cause de sa maladie. Mais que les revendeurs lui avaient laissé entendre qu’il vaudrait mieux s’arranger que d’aller au procès. Un agriculteur aujourd’hui retraité, dans le centre de la France, m’a raconté comment on lui avait proposé tout un lot de produits gratuits pour arranger les choses. Il y a aussi cette femme qui regrette de ne pas s’être battue avant le décès de son mari. La maladie a été reconnue par voie de justice. Après sa mort.»

Pour toutes ces raisons, Paul François a décidé de ne pas baisser les bras. Ne serait-ce que pour les chercheurs, comme Henri Pézerat, 78 ans, chercheur honoraire au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) qui a contribué à lancer la machine. «Hier, c’est premier que j’ai appelé», indique Paul François. Les travaux de ses confrères ont ensuite donné corps au dossier que François Lafforgue s’apprête à aller défendre devant le TGI.