Appel à la solidarité pour les faucheurs volontaires

Récemment les tribunaux de Toulouse et de Carcassonne ont rendu leur jugement concernant les faucheurs volontaires.

En ce qui concerne le procès qui s’était tenu à Toulouse, les 5 et 6 juin, où j’avais été citée comme « témoin sachant », pour reprendre l’expression du juge, le tribunal a condamné les faucheurs à des peines très sévères, ainsi que le résume le bulletin d’Univers Nature du 4 septembre, dont je cite un extrait:

« Le tribunal correctionnel de Toulouse a rendu aujourd’hui son jugement dans le dossier de la destruction, fin juillet 2006, de 2 parcelles de maïs OGM en Haute-Garonne . Le verdict prononcé s’affiche très lourd pour les 41 faucheurs volontaires, dont José Bové, avec des peines allant de 180 jours-amende à 1 mois de prison avec sursis. Comme demandé par le procureur de la république lors de sa réquisition, José Bové a écopé de 180 jours-amende (à raison de 100 €/jour), tandis que pour 4 autres faucheurs le tribunal a retenu 120 jours-amende, d’un montant journalier identique. Concernant les autres accusés des peines de 1 à 2 mois de prison avec sursis ont été prononcées.

En outre, à titre de dommages à l’exploitant de la parcelle commerciale semée en maïs MON 810, les prévenus devront verser 13 234 € pour la perte occasionnée, plus 1 944 € de remise en état du champ et 2 000 € de préjudice moral. Pour le champ d’essai, la ‘facture’ est encore plus élevée avec 32 892 € au titre du préjudice matériel et 1 000 € pour le préjudice moral au bénéfice du semencier Pioneer.
Au final, l’addition pour les faucheurs d’OGM s’élève donc à environ 115 000 €.  »

Curieuse condamnation quand on sait que les 41 faucheurs étaient poursuivis pour avoir détruit des parcelles de MON 810, le maïs OGM de Monsanto (vendu ici par Pioneer), dont la culture a été suspendue en février dernier par le gouvernement, au nom du principe de précaution…

En revanche, le tribunal de Carcassonne a… relaxé les faucheurs, ainsi que le rapporte Le Point.fr, le 17 septembre:

« Le tribunal de grande instance de Carcassonne a relaxé 28 faucheurs d’OGM, dont José Bové, poursuivis pour avoir envahi un site du semencier Monsanto en 2006, apprend-on de source judiciaire.

A l’audience, le 2 juillet dernier, le procureur de la République avait requis une amende de 3.000 euros, « dont une grande partie avec sursis » contre les prévenus.

Monsanto a exprimé son « incompréhension » et son « exaspération » devant la décision rendue. « La relaxe prononcée revient à nier toute action délictueuse et tout préjudice pour Monsanto et ses collaborateurs », a déclaré dans un communiqué Laurent Martel, directeur de Monsanto France.

Pour le semencier, les faits jugés à Carcassonne étaient « clairement délictueux ».

Le 13 avril 2006, alors que la France s’apprêtait à cultiver plusieurs milliers d’hectares d’OGM en l’absence de tout cadre légal, plus de 150 militants anti-OGM avaient effectué une « inspection citoyenne » sur le site de Trèbes (Aude).

Ils entendaient vérifier si des semences génétiquement modifiées y étaient stockées. Aucune dégradation n’avait été commise au cours de cette opération, selon Greenpeace. Monsanto avait porté plainte pour « entrave à l’exercice de la liberté du travail d’une manière concertée et à l’aide de voies de fait. »

A l’origine, seul José Bové et quatre autres militants anti-OGM étaient poursuivis. Mais une vingtaine d’autres participants à l’action s’étaient présentées à l’audience comme « comparants volontaires » et avaient obtenu d’être jugés.

Greenpeace s’est réjoui dans un communiqué de la relaxe.

« Cette action visait à pallier et pointer le manque de transparence de ces cultures potentiellement dangereuses. En suspendant provisoirement la culture de Mon 810, la France a d’ailleurs implicitement reconnu la justesse de la démarche des lanceurs d’alerte qu’ont été Greenpeace, la Confédération paysanne et les Faucheurs », dit l’organisation. »

Je lance un appel à la solidarité pour soutenir financièrement les faucheurs volontaires dont les amendes cumulées atteignent plusieurs centaines de milliers d’Euros. Il est possible de verser des dons, déduisibles des impôts, à la caisse créée à cet effet, dont les internautes peuvent consulter les références sur le site « Sans Gène ».

Je reproduis ici le modèle du formulaire disponible sur le site pour accompagner les dons.

Je rappelle que c’est précisément, parce qu’ils n’ont pas su résister à l’invasion de leurs champs par les OGM, que les Canadiens qu’aujourd’hui « 70% de leurs aliments préparés à base de maïs, canola (colza) , de soja ou de leurs dérivés contiennent des OGM », ainsi que le rapporte la diapositive projetée pendant la conférence que j’ai donnée à l’Université de Montréal, à la mi septembre (voir photo).

Rencontre avec Shiv Chopra et Margaret Haydon, les « whistleblowers » canadiens

Lors de mon (court) séjour au Canada , j’ai eu l’immense plaisir de retrouver le Dr. Shiv Chopra , le « whistleblower » (lanceur d’alerte) qui avait dénoncé les pressions exercées par Monsanto sur Santé Canada pour forcer la mise sur le marché de l’hormone de croissance laitière. Il était accompagné par le Dr. Margaret Haydon, qui avait dénoncé devant une commission d’enquête sénatoriale la tentative de corruption de Monsanto dont elle avait été témoin, lors d’une réunion à laquelle participaient des représentants de la firme et des responsables du département vétérinaire de Santé Canada.
Ces révélations avaient entraîné l’interdiction de l’hormone de croissance transgénique au Canada, puis en Europe, ainsi que je le raconte dans mon film et livre.
Je reproduis la partie de mon livre s’y rapportant.

J’informe les internautes qui voudraient en savoir plus que le Dr. Shiv Chopra publie très bientôt un livre au titre sans ambiguités « Corrupt to the Core. Memoirs of a Health Canada Scientist » où il dénonce la collusion entre les industriels et l’agence de réglementation canadienne à travers l’histoire de plusieurs produits vétérinaires ou médicaux qui n’auraient jamais dû être mis sur le marché en raison des risques sanitaires qu’ils font courir aux animaux ou consommateurs…

DÉBUT EXTRAIT

Tentative de corruption au Canada

J’ai quitté la Floride passablement chamboulée par le témoignage de ma consœur. Naïvement, je pensais avoir fait le tour des méthodes pour le moins « spéciales » que la société de Saint-Louis n’hésite pas à utiliser pour imposer ses produits. En fait, je n’étais pas au bout de mes surprises. Tandis que mon avion s’envole pour Ottawa, je replonge dans le dossier de presse que j’ai constitué sur le processus d’homologation de la rBGH au Canada.
« Des scientifiques de Santé Canada accusent une firme de corruption pour faire approuver un produit vétérinaire douteux », titre ainsi The Ottawa Citizen, le 23 octobre 1998. « Le témoignage des scientifiques devant le comité sénatorial ressemblait à une scène de la série télévisée The X Files », renchérit Globe and Mail, le 11 novembre 1998.

Je découvre ainsi que Monsanto a déposé une demande d’autorisation de mise sur le marché de son hormone transgénique auprès de Health Canada (Santé Canada), l’homologue canadien de la FDA, en 1985.

Généralement Health Canada calque ses décisions sur celles de l’agence américaine, mais cette fois-ci la machine, pourtant bien huilée, s’est grippée…
Trois scientifiques du Bureau des médicaments vétérinaires (BVD) ont endossé le rôle peu confortable du lanceur d’alerte, en dénonçant publiquement l’autorisation imminente de la rBGH.
En juin 1998, ils ont été convoqués pour témoigner devant une commission sénatoriale qui s’est réunie pendant plusieurs mois, avant de publier un rapport demandant que le produit de Monsanto ne soit pas autorisé au Canada.
Je me suis procuré une transcription ainsi qu’un enregistrement audiovisuel des auditions de la commission, dont l’atmosphère rappelle effectivement celle d’un épisode de X Files…
La séance d’ouverture prend tout de suite un tour très solennel, puisque les trois whistleblowers demandent à prêter serment sur la Bible ou la Constitution canadienne. Il s’agit des docteurs Shiv Chopra, Gérard Lambert et Margaret Haydon, qui travaillent à Health Canada respectivement depuis trente ans, vingt-cinq ans et quinze ans. L’un après l’autre, ils se lèvent, visiblement émus, tendent la main, et jurent de dire « la vérité, toute la vérité, rien que la vérité »…
Un long silence s’installe dans l’assistance un peu guindée, où se mêlent la gêne et l’étonnement, puis le sénateur Stratton prend la parole :

« Vous avez demandé à prêter serment, dit-il, mais êtes-vous sûrs que votre vie professionnelle n’est pas en danger ? En d’autres termes, craignez-vous que des actions soient entreprises contre vous ? […] Le ministre a envoyé une lettre à la commission assurant que votre groupe pouvait témoigner honnêtement et directement sans peur de représailles. Êtes-vous rassurés ?

– Si je parle sous serment, en présence de Dieu, je suis donc censé dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité, répond le docteur Shiv Chopra. Mais mon problème, c’est de savoir quelle vérité je dois dire, celle que je connais ou celle que le ministre me dit de dire ? Voilà mon conflit. […] On nous a garanti qu’il n’y aurait pas de répercussions, mais nous demandons à voir. En ce qui me concerne, j’ai reçu l’ordre de me taire, au point que je n’ai pas le droit de participer à aucune réunion sur la rBST. Si je m’exprime lors d’un dîner et que quelqu’un rapporte ce que je dis à la Division , je peux avoir des problèmes…

– Finalement, je n’ai pas l’impression que vous ayez confiance dans la procédure en cours, reprend le sénateur Stratton. Je voudrais que vous sachiez que si vous avez un quelconque problème ou des menaces de votre direction, cette commission sera ravie d’en être informée…

– La Division ne cesse de dire que maintenant le client — et c’est écrit — c’est l’industrie et que nous devons servir le client, explique Shiv Chopra. Le conflit qui nous préoccupait au BVD, particulièrement dans la Division de la sécurité humaine, venait du fait que nous subissions des pressions et de la coercition pour autoriser des produits vétérinaires d’une sécurité douteuse, comme la rBST. […] J’ai finalement décidé d’écrire au ministre de la Santé actuel et à son prédécesseur ainsi qu’au ministre adjoint pour me plaindre d’un problème sérieux de secret et de conspiration et demander que quelque chose soit entrepris. Je les ai pressés d’intervenir pour sauvegarder l’intérêt public. Je n’ai jamais reçu de réponse… En novembre 1997, nous avons rencontré le docteur Paterson, l’un des cadres supérieurs de Health Canada, et nous lui avons dit que nous voulions que soit réalisée une analyse scientifique poussée du dossier. […] Quand on nous a transmis celui-ci, nous avons constaté qu’il ne s’agissait que de résumés fournis par la FDA ou la Commission européenne, mais pas des données brutes. […] Celles-ci sont verrouillées et placées sous la garde exclusive du docteur Ian Alexander, qui a été désigné comme l’examinateur référent de la rBST. Personne d’autre que lui n’a le droit de les consulter… »

Est alors interrogée Margaret Haydon, à qui avait été confié l’examen de la demande d’autorisation de 1985 à 1994, avant qu’elle en soit dépossédée…

« Mes documents ont été volés dans mon bureau, pourtant fermé à clé, en mai 1994, raconte-t-elle d’une voix fluette. J’ai découvert que beaucoup de choses manquaient. J’étais très choquée. […] La plupart du travail que j’avais réalisé depuis dix ans sur la rBST avait disparu. J’ai décidé de faire un rapport et de l’envoyer à mon supérieur. Quand je suis rentrée, après le week-end, certains documents avaient réapparu. […] Une enquête a été conduite par le groupe de sécurité de Health Canada. Le sergent Fiegenwald a pris quelques documents pour vérifier les empreintes digitales. Il m’a demandé de rédiger un mémorandum sur tout ce qui avait disparu et d’écrire tout ce qui me semblait expliquer cet événement. Je lui ai donné l’original du mémorandum et j’ai gardé une copie. […] Quelques mois plus tard, en novembre 1997, j’étais en congé maladie à la maison quand un membre de la sécurité m’a appelée, et est venu chez moi pour me demander la copie de mon mémorandum. Depuis, je n’ai plus jamais revu mon texte et il n’y a jamais eu de suite. C’était très surprenant…

– Les documents qui ont été volés étaient pro ou anti rBST ?, demande le sénateur Taylor.

– Il y avait beaucoup de questions que je soulevais, répond Margaret Haydon, et ce que nous appelons des “lettres additionnelles” qui demandaient au fabricant de fournir des informations complémentaires. Disons qu’à l’époque, je ne recommandais pas d’autoriser le produit à cause des problèmes de sécurité et d’efficacité qu’il posait…

– Je suppose que si quelqu’un vous avez offert un verre de lait traité à la rBST, vous ne l’auriez pas bu ?, interroge le sénateur Taylor.

– Personnellement, j’aurais décliné l’offre, oui.

– À vous entendre tous, j’ai du mal à croire que nous sommes au Canada !, intervient le sénateur Eugen Wheelan. Dans quel système sommes-nous ? J’ai été ministre de l’Agriculture pendant onze ans, et la recherche était mon sujet favori. […] J’ai toutes les raisons d’être sceptique alors qu’il y a de moins en moins de recherche publique et que nous sommes de plus en plus dépendants de sociétés comme Monsanto, qui réalisent les études pour nous et dont l’unique souci est de faire de l’argent. Je voudrais demander, à chacun d’entre vous : avez-vous été approchés par Monsanto ?

– Voici ce que j’ai vécu, raconte Margaret Haydon. Je ne sais pas si le mot “lobbying” est le bon, mais j’ai assisté à une réunion, en 1989 ou 1990, où il y avait des représentants de Monsanto, mon superviseur, le docteur Drennan, et mon directeur, le docteur Messier. Lors de cette réunion, la société a proposé un à deux millions de dollars. Je ne sais pas ce qui s’est passé après, mais mon directeur m’avait dit qu’il allait en référer à ses supérieurs…

– Le docteur Haydon a parlé des un à deux millions offerts par Monsanto lors de cette réunion, renchérit Shiv Chopra. La chaîne Fifth Estate a fait une émission de télévision à ce sujet. Ils ont rencontré le docteur Drennan, aujourd’hui retraité. Ils lui ont demandé : est-ce que cette offre a vraiment au lieu ? Il a répondu : “Oui.” Ils ont demandé : “Considérez-vous que c’était une tentative de corruption ?” Il a dit : “Je dirais que oui.” Ils ont demandé : “Qu’est-ce que vous avez fait après ?” Il a répondu : “J’ai rigolé.” Ils ont demandé : “Et après avoir ri, qu’avez-vous fait ? Avez-vous fait un rapport ?” Il a répondu : “Oui.” “Et après, que s’est-il passé ?” “Je ne sais pas”… »

Dans la salle d’audience, la tension est à son comble. Un long silence parcourt les membres de la commission, finalement rompu par le sénateur Spivak, qui met le doigt sur un sujet éminemment important :

« Aux États-Unis, la FDA a autorisé le produit sur la base de résumés qui se sont révélés incorrects, car les données brutes n’étaient pas disponibles ou n’avaient pas été transmises. Aujourd’hui, le JECFA, qui est le comité commun de l’OMS et de la FAO, dit qu’il n’y a pas de problème avec la rBST. Mais apparemment, le JECFA s’est également prononcé sur la base de résumés, ce qui n’a rien à voir avec les données brutes. Doit-on lui faire confiance ? »

Pour comprendre l’importance de cette question, il faut savoir que le JEFCA (Joint Expert Committee on Food Additives) est un comité scientifique consultatif créé en 1955 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et la Food and Agriculture Organization (FAO), deux organismes onusiens. Ce comité se réunit régulièrement pour examiner la demande de mise sur le marché de nouveaux produits alimentaires. Pour cela, il fait appel à des experts ad hoc, censés être choisis pour leurs compétences et leur impartialité par les pays membres. Les avis du JEFCA sont transmis à la commission du Codex alimentarius — nous en reparlerons —, dépendant elle aussi de l’OMS et de la FAO et créée en 1962 pour uniformiser les normes des produits alimentaires et émettre des recommandations internationales en matière d’hygiène et de sécurité des pratiques technologiques liées à la nourriture. Les textes publiés par le Codex sont auréolés d’une expertise scientifique internationale, avec l’imprimatur des Nations unies…

Concernant le mode de fonctionnement du JEFCA et du Codex alimentarius, les travaux de la commission sénatoriale canadienne ont été fort instructifs, car ils ont permis de confirmer ce que d’aucuns subodoraient, à savoir le verrouillage des travaux par Monsanto.
En effet, le 7 décembre 1998 au matin, les sénateurs ont auditionné Michael Hansen, l’expert du Consumer Policy Institute, qui connaît bien les arcanes des organismes onusiens pour avoir participé à plusieurs réunions comme représentant des organisations de consommateurs.
Celui-ci a révélé que le premier panel de scientifiques réuni par le JEFCA en 1992, pour évaluer l’hormone de croissance transgénique, comprenait six représentants de la FDA, dont Margaret Miller — la transfuge de Monsanto — et les docteurs Greg Guyer et Judith Juskewitch, les auteurs de l’article controversé publié dans Science. En 1998, le rapporteur du second panel n’était autre que… Margaret Miller. On comprend, dans ces conditions, que le JEFCA ait émis un avis favorable sur la rBGH, comme n’a pas manqué de le souligner, avec toute l’emphase requise, Ray Mowling, le vice-président de Monsanto, en charge des affaires gouvernementales et publiques, auditionné peu après Michael Hansen :
« Le rapport de l’ONU a réaffirmé que le traitement des vaches avec la BST ne pose pas de problème de santé. Il a conclu qu’il n’y a aucun problème de sécurité ou de santé lié aux résidus de BST dans les produits, tels que la viande ou le lait, provenant d’animaux traités », etc.

Un banc d’essai pour les OGM

Seulement voilà, ce même après-midi du 7 décembre 1998, était aussi entendu David Kowalcyk, en charge des affaires réglementaires chez Monsanto, qui s’est fait prendre la main dans le sac…
« Nous avons obtenu des rapports où vous suggérez à Health Canada qui devrait aller dans le panel du JECFA, déclare le sénateur Spinak, en fixant droit dans les yeux son interlocuteur. Ne pensez-vous pas que vous dépassez les limites de votre relation avec Health Canada en suggérant qui devrait représenter le Canada dans le panel du JECFA ?

– C’est la première fois que j’entends parler de cela. Je n’ai jamais recommandé personne pour le JECFA, bredouille le représentant de Monsanto.

– Il y a des comptes rendus et rapports qui attestent de plusieurs conversations que vous avez eues à ce sujet avec M. Ian Alexander, qui avait le contrôle exclusif des données brutes fournies par votre compagnie et qui comme vous d’ailleurs a nié », insiste le sénateur.
« Je maintiens que nous devrions faire plus de recherche nous-mêmes, a conclu le sénateur Wheelan, après l’audition des trois lanceurs d’alerte de Santé Canada. Par exemple, en ce moment, Monsanto a donné 600 000 dollars à Agriculture Canada pour travailler sur un blé résistant au Roundup (voir infra, chapitre 11). J’ai écrit à dix universités. L’une d’entre elles m’a dit de me mêler de ce qui me regarde, quand j’ai essayé de savoir quelles étaient les contreparties à ces subsides. Deux d’entre elles m’ont appelé pour me dire : “Vous êtes sur la bonne voie, mais nous ne pouvons pas vous donner d’information.” Ils sont morts de peur. Je suis très fier de voir que vous n’êtes pas morts de peur. S’ils essaient de vous faire quelque chose, tenez-nous au courant… »

L’ancien ministre de l’Agriculture canadien ne croyait pas si bien dire…
Après l’opération de catharsis nationale provoquée par la commission sénatoriale, tout est rentré dans l’ordre. Certes, le Canada a banni définitivement la rBGH de son territoire, entraînant le rejet définitif de l’hormone par la Commission européenne, qui était pourtant à deux doigts de suivre l’avis du JECFA et de lever le moratoire en vigueur depuis 1990 .
Dans la foulée, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ont également enterré le produit. Et puis, à Santé Canada, les bonnes vieilles habitudes ont repris le dessus : en juillet 2004, Shiv Chopra, Margaret Haydon et Gérard Lambert ont été licenciés pour désobéissance…

« Après notre témoignage devant la Commission, nous avons été harcelés, placardisés, marginalisés, m’explique Shiv Chopra, qui me reçoit en juillet 2006 dans sa belle demeure hindoue-canadienne, située à une cinquantaine de kilomètres d’Ottawa. Tout ce que nous craignions s’est produit, et personne n’a bougé le petit doigt ! Nous avons porté l’affaire devant les tribunaux, mais au Canada, aucune loi ne protège les whistleblowers… Ce pays est corrompu jusqu’à la moelle et c’est d’ailleurs le titre du livre que je rédige actuellement !

– Pensez-vous que Monsanto ait joué un rôle dans votre disgrâce ?

– Je dois faire très attention à ce que je vais vous répondre, sourit Shiv Chopra. Disons que notre témoignage est arrivé à un très mauvais moment pour la société qui, à l’époque, était en train de lancer ses OGM au Canada. Il est clair que l’hormone de croissance transgénique constituait un banc d’essai, qui a en partie mal tourné, mais qui lui a permis de rôder ce que j’appellerais ses techniques de conquête du marché… »

FIN DE L’EXTRAIT

PHOTOS:
– Les docteurs Shiv Chopra et Margaret Haydon ont participé à la projection débat organisée à l’université d’Ottawa.
– A la fin de la soirée, le Dr. Shiv Chopra répond aux questions des étudiants fascinés par son témoignage.
– Projection à l’université de Montréal
– Conférence devant une trentaine de représentants d’organismes financiers et de conseillers pour l’investissement responsable.
– Devant la vitrine d’un magasin vidéo

Nouvelles du monde

Je continue d’être inondée de demandes de projections débats signatures, conférences, participations à des colloques, festivals, en France et dans le monde entier.
Je ne pourrai pas répondre à la plupart d’entre elles car je dois, notamment, terminer mon film « Torture made in USA », qui sera diffusé en janvier prochain sur Canal +.

Quelques nouvelles internationales:
– Au Québec, le film a déjà fait 13 OOO entrées en salle, et 6OOO exemplaires de mon livre ont été vendus, ce qui est un excellent résultat , d’après l’ONF et mon éditeur, vue la taille de la « belle province »! Mon séjour au Canada a coïncidé avec le lancement du DVD bilingue dans tout le Canada. L’éditeur du DVD (métropole) est ravi car les 5OOO premiers exemplaires sont partis comme des petits pains, et il a dû déjà en retirer un milllier!
Le film a été sélectionné au Festival international de cinéma francophone en Acadie qui se déroule actuellement du 25 septembre au 4 octobre.
Par ailleurs, mes amis de l’ONF m’ont informée que le film avait été acheté par une chaîne des Etats Unis, dont je tairai, par prudence, le nom, on ne sait jamais!
– Au moment où j’étais au Canada, j’étais aussi invitée à Bahia (Brésil) pour le festival « la Jornada de cinema de Bahia ».
– Je suis invitée à Lisbonne pour la 6ème édition du Festival international du film documentaire qui se tiendra du 16 au 26 octobre.
– Je suis invitée au festival « DokMa – Documentaries in Maribor » qui se tiendra en Slovénie du 2 au 8 novembre prochain.
– Du 17 au 20 novembre, je serai en Espagne pour le lancement du livre. Par ailleurs, une chaîne espagnole a acheté le film.

La suite plus tard….

Concernant la France, je serai le 2 octobre à Clermont Ferrand (voir affiche).

Photo: conférence à l’espace pour un monde solidaire lors de la Fête de l’Huma.

Des nouvelles du Canada

Elections fédérales – Pour un moratoire sur les OGM OTTAWA, MONTREAL et QUEBEC, le 16 sept. /CNW Telbec/ –

Dans le cadre de l’élection fédérale, une large coalition d’organismes de la société civile coordonnée par le Réseau québécois contre les OGM (RQcOGM) et le Canadian Biotechnology Action Network (CBAN) demande à tous les candidats et partis politiques de s’engager à appuyer un moratoire sur toute nouvelle autorisation d’OGM au Canada, tant que les procédures d’évaluation des risques liés aux OGM n’auront pas été renforcées, de manière à les rendre conformes aux normes scientifiques internationales découlant du principe de précaution.

Cet appel survient le jour de la sortie de la version DVD du documentaire-choc intitulé Le monde selon Monsanto coproduit par l’ONF et réalisé par Marie-Monique Robin, qui signe également un livre au même titre.
L’auteur-documentariste sera de passage à l’Université d’Ottawa, mercredi enfin d’après-midi, et à l’Université du Québec à Montréal, jeudi soir, lors de soirées-débat où le public pourra voir gratuitement son
film.
Selon Eric Darier, directeur de Greenpeace au Québec, « personne ne peut rester indifférent après avoir vu le documentaire Le monde selon Monsanto ».

Le film documente l’histoire de Monsanto, le numéro un mondial des producteurs de semences OGM et l’une des multinationales les plus controversées. On y montre comment certains rapports falsifiés, la collusion et le lobbying mêlé de tentatives de corruption ont contribué à faire de Monsanto l’une des plus importantes firmes agrochimiques et semencières au monde.

« Après avoir vu ce documentaire, tout le monde comprendra comment Monsanto a réussi à convaincre les gouvernements d’autoriser les OGM sans avoir eu à fournir des preuves scientifiques crédibles et indépendantes », soutient Denis Farlardeau de l’ACEF de Québec.

« Ottawa a bien fait de refuser, en 1999, la commercialisation par Monsanto de l’hormone de croissance bovine recombinante. Le prochain gouvernement devrait avoir le même courage et mettre en place un moratoire sur l’autorisation de nouveaux OGM ».

D’après Benoit Girouard de l’Union paysanne, « les cultures OGM de Monsanto, celles du soja, du canola et du mais, ont pour effet de rendre les cultivateurs dépendants de son herbicide, le Roundup. Ce contrôle grandissant d’une poignée de multinationales comme Monsanto sur l’agriculture constitue une menace à la sécurité et à la souveraineté alimentaire ».

Le Canada et les Etats-Unis font partie des très rares pays qui persistent à refuser l’étiquetage obligatoire des aliments contenant des OGM.
Le gouvernement prive les consommateurs canadiens de leur droit le plus légitime de savoir ce qu’ils mangent.

« L’influence démesurée de l’industrie des biotechnologies sur Ottawa explique pourquoi le gouvernement Harper et une majorité de députés(*) ont voté, en mai dernier, contre le projet de loi C-517 qui aurait enfin permis aux consommateurs de savoir si leurs aliments contiennent des OGM » dénonce Charles Tanguay de l’Union des consommateurs.

Les groupes membres de la coalition pressent les citoyens du Canada de voir sans tarder le film Le monde selon Monsanto, puis de rencontrer leurs candidats locaux en prévision de l’élection fédérale du 14 octobre afin d’exiger d’eux qu’ils appuient l’imposition immédiate d’un moratoire sur tous les nouveaux OGM.

(*) Note: Une liste indiquant la manière dont les députés ont voté lors de la présentation du projet de loi C-517 est disponible à : http://www.greenpeace.org/canada/en/campaigns/ge/latest-developments/c-517-how-they-voted

Pour des entrevues médias avec Madame Robin, appeler au 514 605-6497 Renseignements: Eric Darier, Greenpeace, Cell. (514) 605-6497; Benoit Girouard, Union paysanne, Cell. (450) 495-1910; Denis Farlardeau, ACEF de Québec, Cell. (418) 999-0925; Charles Tanguay, Union des consommateurs, Cell. (514) 743-0419; Erick Lafleur, Les AmiEs de la terre, (418) 524-2744; Hélène Cornellier, AFEAS (Association féminine d’éducation et d’action sociale), Cell. (514) 791-9023; Priscilla Gareau, RQGE (Réseau québécois des groupes écologistes, (514) 392-0096

Je (re)pars au Canada

Je m’envole demain pour le Canada (Ottawa et Montréal) où je vais présenter mon film et livre devant divers auditoires – universitaires, parlementaires, chef d’entreprise, ONG- avec pour finir une participation à l’émission télévisée « Tout le monde en parle ».
Je donnerai des nouvelles dès que possible, mais mets déjà en ligne l’affiche que vient de m’adresser Louise Vandelac, professeur de sociologie à l’Institut des sciences de l’environnement de l’Université du Québec, qui a préfacé la version québécoise de mon livre, concernant l’une des manifestations à laquelle je vais participer.
Ma visite coïncide avec le lancement sur le marché de la version anglophone du DVD en Amérique du Nord.

L’affaire de Percy Schmeiser

Avant de poursuivre mon récit sur les « dessous » de la banque de Spitzberg, j’ai décidé de remettre en ligne l’extrait de mon livre concernant l’affaire de Percy Schmeiser, sur laquelle j’ai enquêté un mois, pour répondre aux commentaires erronés que j’ai lus sur mon Blog.

Pour écrire cette partie, j’ai lu tous les articles disponibles sur cette histoire emblématique, épluché les jugements de la justice canadienne et les pièces du dossier (y compris ceux fournis par Monsanto), et parlé longuement au téléphone avec Percy Schmeiser lui-même (que j’ai d’ailleurs rencontré récemment à Bonn).

Je précise que toutes les références des documents que je cite peuvent être consultées dans mon livre, et notamment par ceux qui colportent une vérité déformée par la propagande de Monsanto.

J’ajoute que le 19 mars 2008 Monsanto a accepté de signer un arrangement à l’amiable avec Percy Schmeiser, dont les champs avaient été une nouvelle fois contaminés par du colza roundup ready. Celui-ci contraint notamment Monsanto à payer les frais de décontamination du champ de l’agriculteur canadien.

DÉBUT DE L’EXTRAIT

Percy Schmeiser, un rebelle au « pays des ciels vivants »

Né en 1931 à Bruno, une bourgade de 700 âmes située au cœur de la province canadienne du Saskatchewan (le « pays des ciels vivants »), Percy Schmeiser représente la « bête noire de Monsanto, le caillou dans sa chaussure », pour reprendre les termes du journaliste du Monde Hervé Kempf .
Descendant de pionniers européens venus s’installer dans les prairies nord-américaines à la fin du XIXe siècle, l’homme est un battant, un « survivant » se plaît-il à dire, qui a l’énergie de celui que la vie a failli faucher précocement à plusieurs reprises. Il a survécu notamment à un grave accident du travail qui l’a laissé invalide pendant des années, ainsi qu’à une hépatite virulente contractée en Afrique. Car, en marge de ses activités de fermier, le rebelle des prairies est aussi un homme d’action et de convictions (catholiques) : il a été maire de sa commune pendant un quart de siècle, puis député à l’assemblée provinciale, et il a multiplié les voyages humanitaires, n’hésitant pas, avec sa femme, à confier leurs cinq enfants à leurs grands-parents, pour « aider les gens » en Afrique ou en Asie. Percy Schmeiser, enfin, est un sportif qui, pendant la longue froidure hivernale, partait gravir le Kilimandjaro ou tenter l’Everest (trois fois, sans succès).
Malheureusement, je n’ai pas pu le rencontrer, car lorsque je me suis rendue en Saskatchewan, en septembre 2004, il était, si je me souviens bien, à Bangkok, où il avait répondu à l’une des nombreuses invitations internationales qu’il reçoit depuis qu’il est devenu l’« homme qui s’est rebellé contre Monsanto ».

Pour cet agriculteur, qui cultive une exploitation familiale de 600 hectares depuis cinquante ans, l’affaire commence pendant l’été 1997. Alors qu’il vient de désherber avec du Roundup les fossés qui bordent ses champs de colza, il se rend compte que son travail ne sert pratiquement à rien : de nombreux plants qui avaient germé hors de son aire de culture résistent à l’épandage. Intrigué, il contacte un représentant de Monsanto, qui l’informe qu’il s’agit de colza Roundup ready, mis sur le marché deux ans plus tôt.

Les mois passent et au printemps 1998, Percy, qui est réputé dans toute la région pour être un sélectionneur chevronné des semences de colza, ressème les graines de sa récolte antérieure. Au mois d’août, alors qu’il s’apprête à moissonner, il est contacté par un représentant de Monsanto Canada, qui l’informe que des inspecteurs ont détecté du colza transgénique dans ses champs et lui propose un arrangement à l’amiable, sous peine de porter l’affaire en justice.

Mais Percy Schmeiser refuse de s’incliner. À son avocat, il transmet des documents prouvant qu’il a racheté, en 1997, un champ qui avait été cultivé avec du colza Roundup ready. Il explique aussi que l’oléagineuse a la vivacité d’une mauvaise herbe, capable d’envahir les prairies à la vitesse du vent et que ses graines, très légères, peuvent dormir dans le sol pendant plus de cinq ans, avant d’être transportées par un oiseau sur des kilomètres. Constatant que la présence du colza transgénique est surtout effective aux abords de ses champs, il en conclut que ceux-ci ont dû être contaminés par les cultures de ses voisins convertis aux OGM ou par des camions de grains qui sont pas-sés sur la route.
Il faut dire que la résistance de Schmeiser est encouragée par la révélation des pratiques musclées de la firme de Saint-Louis, qui n’hésiterait pas à répandre du Roundup par hélicoptère sur les champs des paysans soupçonnés de « piraterie », selon les dires, en août 1998, d’Edy et Elisabeth Kram, un couple d’agriculteurs de la province. Un acte pour le moins « étrange », relève Hervé Kempf, et que Monsanto n’a jamais démenti, « reconnaissant par ailleurs, dans une déclaration à la gendarmerie, que ses agents avaient prélevé des échantillons du colza d’Edy Kram pour l’analyser en laboratoire ».

Monsanto Canada, en tout cas, ne veut rien savoir. Brandissant devant la presse les analyses des échantillons qu’elle prétend avoir prélevés (à son insu, donc illégalement) sur la ferme de Percy Schmeiser, qui révèlent un taux de « contamination » de plus de 90 % , la multinationale décide d’engager une action en justice, tout en maintenant la pression sur lui pour qu’il accepte de transiger.

« 1999 a vraiment été l’année terrible, raconte Percy à Hervé Kempf. On était souvent surveillés par des hommes dans une voiture, qui ne disaient rien, ne faisaient rien, ils étaient là, à regarder. Une fois, ils sont restés trois jours d’affilée. Quand on allait vers eux, ils partaient en trombe. On recevait aussi des coups de fil anonymes, des gens qui disaient : “On va vous avoir.” On avait si peur que j’ai acheté une carabine, que je gardais dans le tracteur quand je travaillais au champ . »

Finalement, l’affaire est jugée à Saskatoon, la capitale de la province, en juin 2000. Le juge Andrew McKay rend sa décision, le 29 mars 2001, provoquant la stupéfaction chez tous ceux qui soutiennent l’agriculteur de Bruno. En effet, le magistrat estime qu’en emblavant ses champs avec des graines récoltées en 1997 « qu’il savait ou aurait dû savoir résistantes au Roundup », Percy Schmeiser a enfreint le brevet de Monsanto. Il précise que la « source du colza résistant au Roundup ne change rien au fond de l’affaire » et qu’« un fermier dont le champ contient des semences ou des plantes pro-venant de semences versées dedans, ou apportées par le vent du champ d’un voisin ou même germant par du pollen apporté par des insectes, des oiseaux ou par le vent, peut posséder ces semences ou plantes même s’il n’avait pas l’intention de les planter. Il ne possède pas, cependant, le droit d’utiliser le gène breveté, ou la semence ou la plante contenant ce gène ou cette cellule brevetée », car cela « revient à s’emparer de l’essence de l’invention des plaignants en l’utilisant sans sa permission ».

Le juge écarte ainsi d’un revers de main l’argument de la défense selon lequel l’intérêt d’utiliser l’« essence » des OGM de Monsanto est de pouvoir appliquer du Roundup sur les cultures, ce que Percy Schmeiser n’a pas fait, ainsi que le révèlent ses factures d’herbicides… Il ne tient pas compte non plus du fait que pour prélever ses échantillons, Monsanto a dû rentrer illégalement sur la propriété de l’agriculteur, ni que les tests effectués par les experts que ce dernier a consultés ont révélé une contamination nettement inférieure.
Comme le relève justement Hervé Kempf, « le jugement est extraordinaire : il signifie qu’un agriculteur enfreint le brevet de toute compagnie produisant des semences OGM dès lors que son champ est contaminé par des plantes transgéniques ».
La décision, on s’en doute, remplit d’aise Monsanto : « C’est une très bonne nouvelle pour nous, triomphe Trish Jordan, la représentante de la firme au Canada. Le juge a déclaré M. Schmeiser coupable d’avoir violé notre brevet et l’a condamné à nous verser des dommages et intérêts . »

Ceux-ci s’élèvent à 15 450 dollars canadiens, soit 15 dollars par acre récoltée en 1998, alors que seule une partie de la récolte était contaminée… S’y ajoutent les frais de justice engagés par Monsanto.

Percy Schmeiser fait appel, mais le 4 septembre 2002, la décision du juge McKay est confirmée. Pourtant, l’agriculteur, qui a déjà sacrifié son épargne-retraite et une partie de ses terres pour assurer sa défense (200 000 dollars canadiens), ne renonce pas :
« Ce n’est plus l’affaire Schmeiser, affirme-t-il, c’est l’affaire de tous les paysans à travers le monde . »

Il se tourne donc vers la Cour suprême du Canada, qui, le 21 mai 2004, rend un jugement très attendu par tous ceux qu’inquiète la progression des OGM : par cinq voix contre quatre, les juges confirment les deux décisions antérieures mais, curieusement, exemptent le fermier de payer des dommages et intérêts ainsi que les frais de justice engagés par le groupe américain.
Dramatique sur le fond, puisqu’il confirme que les paysans sont responsables de la contamination transgénique de leurs champs, le jugement prouve aussi que les magistrats sont gênés aux entournures :
« Ils donnent d’une main ce qu’ils enlèvent de l’autre », note Richard Gold, un spécialiste de la propriété intellectuelle de l’université McGill de Montréal.
Mais pour la firme de Saint-Louis, c’est une victoire dont elle ne manquera pas de se prévaloir à l’avenir : « La décision conforte notre manière de faire des affaires », commente Trish Jordan, sa représentante au Canada…

FIN DE L’EXTRAIT