J’ai appris aujourd’hui que Monsanto Brésil m’a fait l’honneur de consacrer une page à ma visite sur son site web.
Rien de nouveau sous le soleil brésilien: pas de problème avec le roundup, les PCB et l’agent orange c’est du passé, l’hormone de croissance est formidable et les OGM vont sauver le monde, etc,
C’est un signe que le Brésil représente un pays stratégique pour Monsanto. C’est, en effet, la première fois qu’une filiale de Monsanto « dénigre » (pour reprendre les termes de la firme) publiquement mon « documentaire-livre ». Jusqu’à présent Monsanto France et Monsanto Canada s’était contentées d’un « no comment », tandis que Monsanto Japon faisait pression sur la NHK , la télévision publique, quik a battu des records d’audience avec mon film, pour empêcher sa rediffusion. En vain…
Voici ce que j’ai écrit sur la situation brésilienne dans mon livre:
DEBUT EXTRAIT
Cela fait longtemps, en effet, que la compagnie de Saint-Louis est dans les starting-blocks. Toute sa stratégie au Brésil prouve qu’elle avait largement anticipé la « sojisation » — et, au-delà, la « transgénisation » — du pays.
Présente depuis les années 1950 au Brésil, où elle commercialisait ses herbicides, elle avait ouvert sa première usine de production de glyphosate en 1976, à São Paulo. Mais, dans les années 1990, alors que son soja RR se répand illégalement, elle se lance dans la construction d’un nouveau site de production que sa page Web brésilienne présente avec toute l’emphase requise :
« En décembre 2001, Monsanto a inauguré, dans le pôle pétrochi-mique de Camaçari (Bahia), la première unité de la compagnie conçue pour produire les matériaux bruts pour l’herbicide Roundup en Amérique latine. L’usine de Camaçari, qui correspond à un investissement de 500 millions de dollars, […] est la plus grande jamais installée par Monsanto à l’extérieur des États-Unis. […] C’est aussi la seule produisant les éléments constitutifs du Roundup. La production alimentera les usines de São José dos Campos, Zarate (Argentine) et Anvers (Belgique). Auparavant, ces usines recevaient les produits de base des États-Unis . »
Tandis qu’elle adaptait sa capacité de production de Roundup à l’énorme marché qu’elle cherchait à développer, la multinationale mettait la main sur les semences brésiliennes, en achetant, dès 1997, Agroceres, la plus grande entreprise semencière du Brésil, ou à travers les filiales brésiliennes des semenciers américains qui étaient tombés dans son escarcelle aux États-Unis, comme Cargill Seeds, DeKalb et Asgrow. En 2007, Monsanto était le premier fournisseur de semences de maïs au Brésil et le se-cond pour le soja, juste après l’EMBRAPA, l’Institut national de la recherche agricole, qui se battait âprement pour sa survie…
FIN DE L’EXTRAIT
Je viens d’apprendre, aujourd’hui, que Monsanto est en train de mettre la main sur une partie de l’EMBRAPA…
Hier soir à l’Université de Sao Paulo où quelque 2OO personnes ont assisté à une projection de mon film, suivie d’un débat. Puis, aujourd’hui, à l’Ecole supérieure d’Agronomie Luis de Queiroz (ESALQ) de Piracicaba, à deux heures de Sao Paulo.
Ce fut très instructif: l’école étant largement financée par … Monsanto, le directeur a tout fait pour empêcher ma visite. Mais grâce à quelques professeurs courageux et au ministère du développement agraire qui m’a personnellement invitée, la projection- débat a finalement eu lieu devant quelque 150 étudiants qui ont posé des questions pendant deux heures.Et sont repartis avec mon livre…
A la tribune, il y avait une chaise vide:celle de la professeure chargée de défendre les plantes pesticides qui a fait faux bond au dernier moment!
Flavio, le professeur d’agronomie, qui coordonnait le débat, et Gilles , le représentant du ministère , ont confirmé un phénomène que j’avais constaté en Argentine, au Canada et aux Etats Unis (cf:mon livre): la consommation de roundup a explosé au Brésil, en raison de la résistance développées par les mauvaises herbes. Quatre biotypes sont déjà résistants à l’herbicide toxique de Monsanto…
Je m’envole, demain, pour Brasilia où je présenterai le film devant le Congrès.
J’ai compris, en tout cas, que le gouvernement de Lula était complètement « hybride » : d’un côté, le ministère de l’agriculture tenu par les promoteurs de l’agro-business et pro-OGM, de l’autre le ministère de l’environnement et du développement agraire, qui font ce qu’ils peuvent pour limiter les dégâts…