L’Argentine montre la voie

Je vous écris de Montréal où j’ai présenté , aujourd’hui, mon film « Le monde selon Monsanto » au 5ème Congrès mondial d’éducation relative à l’environnement, en présence du Dr. Shiv Chopra, le lanceur d’alerte de Santé Canada, qui avait dénoncé la tentative de corruption de Monsanto pour imposer la mise sur le marché de son hormone de croissance bovine transgénique (voir mon film et livre). Le Dr. Chopra vient de publier un livre, intitulé Corrompus jusqu’à la moelle. les mémoires d’un scientifique de Santé Canada qui a choisi de sonner l’alarme. J’en ferai un compte rendu dès que je l’aurai lu.

En rentrant d’une journée bien remplie, j’ai découvert sur ma boîte mail deux articles publiés par le journal argentin Página 12, qui, après ma visite en Argentine à la fin du mois de mars (voir sur mon Blog) enchaîne les révélations sur la manière dont Monsanto a introduit le soja roundup ready au pays de la vache et du lait.

Récemment, je racontais comment le Pr. Andrés Carrasco, qui a montré dans une étude les effets mortels du roundup sur des embryons d’amphibiens, avait été menacé de mort et victime d’une campagne de diffamation orchestrée par les promoteurs du modèle transgénique et leur relai dans la presse complaisante comme Clarín ou la Nación.

Cette lamentable affaire a provoqué le réveil de 300 scientifiques et intellectuels argentins qui viennent de publier une pétition en soutien au Dr. Carrasco où ils dénoncent ce qu’ils appellent l’ « intromission mercantile » dans la science , à savoir les pressions exercées par les multinationales de l’agro-alimentaire comme Monsanto et consorts pour contrôler la production scientifique et empêcher toute recherche indépendante des pouvoirs économiques sur les OGM et les pesticides qui leur sont liés.

C’est un événement sans précédent dans ce pays laminé par une dictature sanglante et une crise économique dramatique qui compte, aujourd’hui dix-huit millions d’hectares de soja roundup ready.

Pour les hispanophones, voici l’article de Página 12.

Par ailleurs, Página 12 publie un communiqué de l’association des petits producteurs agricoles qui dénonce les conséquences néfastes de l’agrobusiness sur la sécurité alimentaire et la biodiversité :

Tout indique qu’après avoir longtemps ignoré la catastrophe transgénique qui a conduit à une pollution environnementale et à un désastre sanitaire dramatiques, l’Argentine montre la voie de la résistance à un modèle dévastateur que j’avais déjà dénoncé en 2005 dans mon film  » Argentine: le soja de la faim » (consultable sur ce Blog, dans la rubrique « les films qui m’ont conduite à Monsanto ».

Quel succès!

Voici le message que vient de m’envoyer Eric Darier, directeur du bureau Greenpeace du Québec, avec deux photos qui m’ont bien fait rire à mon retour de Suède!

« Une petite dose d’humour..

Voici 2 photos du visionnement de monde selon Monsanto par les retraités de l’enseignement dans une région agricole du Québec.
Il est évident que dès que le public voit Marie-Monique Robin sur l’écran, cela déclenche une adoration instantanée. Par contre, ma présentation après, les fait s’assoir et se tenir tranquilles ! »

Canada: Greenpeace lance une campagne pour l’étiquetage des OGM

Comme je l’ai indiqué dans un précédent message, mon film « Le monde selon Monsanto » sera présenté à l’assemblée nationale du Québec mercredi 13 mai.

Greenpeace en profite pour lancer une campagne pour demander aux députés d’exiger l’étiquetage des OGM, qui, pour l’heure est interdit au Canada (et aux Etats Unis), au nom du « principe d’équivalence en substance »:

Dernière nouvelle: après la version portugaise, espagnole, allemande, je viens de recevoir la version italienne de mon livre. Une tournée italienne est prévue en octobre prochain.

Sortiront en juin les versions hollandaise et hongroise. Je serai à Amsterdam pour le lancement du livre et livre à la mi juin.

Je m’envole demain aux aurores pour la Suède!

La recherche corrompue ou étouffée par l’industrie

Pour les internautes qui, comme moi, ont quelques doutes sur l’ indépendance désintéressée des scientifiques qui peuplent les agences de réglementation, je recommande la lecture du dossier du magazine Books d’avril 2009, intitulé « le scandale de l’industrie pharmaceutique. Notre santé otage de la corruption ».

On y découvre comment les professeurs d’université se font acheter par les majors de l’industrie pharmaceutique, en faisant la promotion de médicaments très mal évalués ou en publiant des articles de complaisance dans de grandes revues scientifiques, et pourquoi « il n’est plus possible de croire les recherches publiées, ni de se fier au jugement de son médecin de famille », comme l’écrit Marcia Angell, qui fit partie de la rédaction en chef du New England Journal of Medicine, et est l’auteur de La vérité sur les compagnies pharmaceutiques. Comment elles nous trompent et comment les contrecarrer.

Ce qu’elle décrit – encore une fois corruption, conflits d’intérêts, noyautage des agences de réglementation, censées protéger l’intérêt des consommateurs, par l’industrie – ne concerne pas que les Etats Unis, ainsi que le prouve l’interview de Philippe Even, ancien doyen de la faculté de médecine de l’hôpital Necker, professeur émérite à l’Université Paris V, qui dirige aujourd’hui l’Institut Necker.

À LIRE ABSOLUMENT!

Par ailleurs, je participais récemment à un colloque sur « Cancer et environnement », où le Docteur Annie Sasco, qui travailla pendant vingt-deux ans au CIRC, le Centre international de recherche sur le cancer ( un organisme dépendant de l’Organisation mondiale de la Santé, installé à Lyon) a présenté l’épidémie de cancers qui frappe le monde depuis vingt ans.

De fait, les chiffres officiels de l’OMS révèlent que l’incidence du cancer a augmenté de 63% entre 1980 et 2000, avec une augmentation annuelle de 1 à 3% pour les jeunes enfants. L’augmentation est telle qu’on parle désormais d’ « épidémie », alors que le terme désigne normalement des maladies virales ou infectieuses.

Le même constat a été fait pour l’incidence des maladies de Parkinson et d’Altzheimer, qui frappent des personnes de plus en plus jeunes. Sans oublier le diabète (de type 2) ou les maladies autoimmunes, qui connaissent aussi une explosion.

Le coupable? La pollution environnementale et notamment les pesticides organochlorés ou organophosphorés.

Pour mettre fin à ce fléau qui touche toutes les familles de France ou d’ailleurs, il faudrait interdire tout ce qui est à l’origine de l’épidémie, à savoir les molécules chimiques qui ont des effets cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques et qui ont envahi notre environnement et notre assiette depuis une cinquantaine d’années.

Ce qui ne fait pas l’affaire de l’industrie pharmaceutique ni des scientifiques, au CV prestigieux, qu’elle arrose généreusement…

Les manoeuvres décrites ci-dessus ne concernent pas que l’industrie pharmaceutique, mais aussi les multinationales de la biotechnologie.

Récemment, 26 scientifiques américains ont dénoncé dans une déclaration commune, adressée à l’agence de protection de l’environnement (EPA) l’impossibilité de conduire des recherches sur les effets possibles des OGM,car les fabricants , comme Monsanto et Syngenta, leur interdisent d’utiliser leurs semences transgéniques sous prétexte qu’elles sont couvertes par des brevets!

Résultat: les seules études disponibles sont celles qui sont contrôlées par les fabricants!!

Voici le texte de la Déclaration :

« Les accords de technologie / gestion exigés pour l’achat de semences modifiées génétiquement interdisent explicitement la recherche. Ces accords empêchent les scientifiques publics de poursuivre le rôle qui leur est imparti au nom du bien public, à moins que l’industrie n’approuve la recherche. Il résulte de cet accès limité qu’aucune recherche vraiment indépendante ne peut être légalement menée sur de nombreuses questions critiques concernant la technologie, ses performances, ses implications pour la gestion (des cultures), la gestion des résistances aux insectes et ses interactions avec la biologie des insectes. Il en résulte que les données en provenance du secteur public parvenant à un panel scientifique consultatif de l’EPA, sont excessivement restreintes. »

Pour les anglophones, voici l’article du New York Times qui a révélé le « malaise des scientifiques ».

Pour les non anglophones, voici la traduction réalisée par les Amis de la Terre.

Enfin, j’ai présenté récemment les travaux du Pr. Andres Carrasco, qui dirige depuis trente ans un laboratoire d’embryologie moléculaire en Argentine. Son étude a montré l’impact du roundup qui tue les embryons d’amphibiens, ce qui confirme les résultats obtenus par le chercheur américain Rick Relyea, de l’Université de Pittsburgh (cf: mon livre).

Son étude avait entraîné la décision du ministère de la défense d’interdire l’usage du roundup sur les terrains lui appartenant.

Et bien le Professeur Carrasco a été menacé de mort, victime d’une campagne d’intimidation (des gros bras ont débarqué dans son laboratoire) et de diffamation.

J’invite les lecteurs hispanophones à lire son interview dans Página 12.

Agenda du mois de mai

Bonne nouvelle!

La campagne de Greenpeace aura été de courte durée, puisque le parlement du Québec a déjà programmé la projection de mon film!

Voici mon programme pour les trois semaines qui viennent:

– Mercredi 6 et jeudi 7 mai: présentation de mon film au Festival de l’environnement de Torsby en Suède (voir affiche en suédois). Je vais aussi rencontrer des journalistes et des universitaires.

– Lundi 11 mai: présentation du film au 5ème Congrès mondial d’éducation relative à l’environnement, à Montréal.

– Mercredi 13 mai: présentation à l’Assemblée nationale à Québec.