Campagne pour l’étiquetage au Canada

Je suis donc rentrée du Canada, où j’ai fini ma (troisième) mini tournée à l’Assemblée nationale du Québec. Greenpeace, en effet, a lancé une campagne pour l’étiquetage des OGM, auquel s’était d’ailleurs engagé le candidat Jean Charest (libéral), qui, depuis qu’il préside le gouvernement, a oublié ses promesses.

Je rappelle qu’une vingtaine de sondages réalisés en Amérique du Nord indiquent que la très grande majorité des consommateurs des Etats Unis et du Canada veulent que les aliments contenant des OGM soient étiquetés, comme en Europe, mais qu’ils n’ont, pour l’heure, pas été entendus.

Ainsi que je le révèle dans mon livre, Monsanto mène un lobbying incessant pour que l’étiquetage ne soit pas obligatoire en Amérique du Nord, car la firme sait très bien que l’étiquetage entraînera la fin des plantes transgéniques pesticides.

Comme je le disais encore récemment aux journalistes canadiens qui m’ont interviewée: entre une huile faite avec des graines arrosées de roundup et une huile sans résidus de roundup, laquelle choisissez-vous? Même chose pour le maïs: entre un maïs insecticide (BT) et un maïs sans insecticide, pour les consommateurs, le choix est évident…

Je retranscris ici la partie de mon livre que j’avais consacrée à l’étiquetage des OGM en Amérique du Nord.

DÉBUT EXTRAIT

Une entreprise à « hauts risques » pour les investisseurs

Manhattan, toujours, à quelques encablures du siège de TIAA-CREF. Cette fois-ci, je rencontre Marc Brammer, qui travaille pour Innovest Strategic Value Advisor, le leader de ce qu’on appelle l’« analyse extra-financière », qui consiste à noter les performances sociales et environnementales des entreprises, selon un barème allant de AAA (pour les entreprises meilleures de la classe) à CCC (pour les cancres). Ces notes servent à conseiller les investisseurs pour qu’ils puissent réduire leurs risques financiers et augmenter le rendement de leurs placements.

Installé à New York, mais aussi à Londres, Tokyo et, plus récemment, Paris, Innovest s’est fixé pour mission de développer la clientèle des portefeuilles axés sur le développement durable.

En janvier 2005, Marc Brammer a publié un rapport intitulé « Monsanto et le génie génétique : les risques pour les investisseurs », dans lequel il dresse un bilan de l’activité de la firme de Saint-Louis et note sa « gestion et stratégie » dans le domaine des biotechnologies.

Résultat : CCC. « C’est la plus mauvaise note environnementale, m’explique l’analyste financier. Or, nous avons constaté que dans presque tous les secteurs industriels, les compagnies ayant des notes environnementales au-dessus de la moyenne dépassent en général sur le marché des valeurs les entreprises en dessous de la moyenne, de 300 à 3 000 points par an. Cela veut dire que la firme représente une entreprise à risques pour les actionnaires à moyen ou long terme.

– Qui sont les actionnaires de Monsanto ?

– C’est un actionnariat très dispersé, mais les principaux investisseurs sont les fonds de pension et les banques, qui représentent des dizaines de milliers de petits porteurs.

– Comment expliquez-vous qu’un fonds comme TIAA-CREF ait investi dans Monsanto ?

– C’est surprenant, me répond Marc Brammer, car c’est une institution qui encourage vraiment l’investissement responsable. D’un autre côté, c’est assez caractéristique du mode de fonctionnement des fonds de pension, qui calculent à très court terme et sont très sensibles aux rumeurs de la Bourse. Or, dans le cas de Monsanto, il est clair que sa valeur est surévaluée, grâce à un soutien inconditionnel de Wall Street.

– Quels sont les principaux facteurs de risques pour les investisseurs ?

– Le premier d’entre tous, c’est le rejet des marchés, qui, pour Monsanto, constitue une véritable bombe à retardement. Les OGM font partie des produits les plus fortement rejetés qui aient jamais existé. Plus de trente-cinq pays ont adopté ou annoncé des législations limitant les importations d’OGM ou exigeant l’étiquetage des aliments contenant des ingrédients transgéniques. La plupart des distributeurs alimentaires européens ont mis en place des mesures pour s’assurer qu’aucun ingrédient transgénique n’est utilisé dans leurs produits. C’est le cas de Nestlé, Unilever, Heinz, ASDA (Wal-Mart), Carrefour, Tesco et bien d’autres. Hors d’Europe, il existe aussi une forte opposition des consommateurs aux OGM, en Asie ou en Afrique.
Même aux États-Unis, Monsanto a dû, par exemple, retirer ses pommes de terre Bt du marché, après que des firmes comme McDonald’s, Burger King, McCain et Pringles ont refusé d’en acheter. Je suis sûr que si la Food and Drug Administration décidait d’étiqueter les OGM, Monsanto perdrait 25 % de son marché en une nuit… De fait, une vingtaine de sondages, réalisés entre 1997 et 2004, indiquent clairement que plus de 80 % des Américains veulent un étiquetage des produits transgéniques . C’est tellement vrai que l’une des conséquences du non-étiquetage des OGM est le développement absolument exponentiel du marché des produits biologiques aux États-Unis. »

Monsanto a bien compris le danger que représentait l’étiquetage pour son business transgénique. Lorsqu’en 2002, une initiative citoyenne a obtenu de l’État de l’Oregon qu’il organise un référendum sur l’étiquetage des OGM, la firme de Saint-Louis n’a pas hésité à monter une campagne, baptisée « Coalition contre la loi sur l’étiquetage coûteux », avec le renfort de ses « alliés des biotechnologies et de l’industrie alimentaire », qui a coûté la bagatelle de 6 millions de dollars.

« Le sentiment général, a argumenté Shannon Troughton, le porte-parole de Monsanto, c’est que si cette mesure passe, elle créera un nouveau paquet de règles bureaucratiques, en fournissant une information sans importance au frais des consommateurs … »

Finalement, l’initiative, qui constituait une première aux États-Unis, a été rejetée par 73 % des votants, au motif que l’étiquetage allait coûter trop cher…

« L’autre facteur de risque qui menace la performance de Monsanto, ce sont les failles du système réglementaire, qu’illustre parfaitement le désastre de StarLink, poursuit Marc Brammer. Nous avons calculé que si elle était confrontée à une affaire similaire, la firme perdrait 3,83 dollars par action. Le problème fondamental avec les OGM, c’est qu’il n’y a que Monsanto qui en tire des bénéfices : les risques sont pour les autres, alors que les agences réglementaires ont abdiqué leur rôle d’évaluation et de contrôle. L’opacité du processus réglementaire alimente le rejet des consommateurs aux États-Unis, où ceux-ci n’ont pas le droit de choisir ce qu’ils veulent manger, mais aussi en Europe, ainsi que le montre l’affaire du maïs MON 863. »

FIN DE L’EXTRAIT

Je rappelle qu’en France et en Europe l’étiquetage des animaux nourris aux OGM sera bientôt obligatoire, pour répondre au souhait des consommateurs européens. En attendant, la meilleure manière d’éviter les OGM pesticides, c’est , bien sûr, de manger de la viande bio!

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