Grippe porcine et dengue: le désastre de l’agriculture intensive

Drôle de coïncidence… Au moment où la »grippe porcine » faisait la Une des journaux, j’étais en Bretagne, très exactement à Pontivy au coeur d’une région qui pratique l’agriculture industrielle intensive: cultures et élevage de… porcs en hors sol.

Avant de rejoindre le cinéma où allait être projeté mon film devant plus de 300 personnes, dont de nombreux agriculteurs (voir photo), j’ai dîné sur la ferme de Joseph et Martine Servel, un couple d’ agricuteurs bio. Leur fils a travaillé chez des maraîchers, qui produisent notamment des choux sur un mode intensif. Avant de semer, ils désherbent avec un herbicide bien connu …, puis aspergent leurs cultures d’insecticides, et, enfin, chaque chou récolté est trempé dans une cuve de pesticides avant d’être expédié sur les marchés et supermarchés.

L’histoire de cette famille est dramatique: l’an dernier, leur petit garçon de cinq ans est mort d’une leucémie, et le frère du maraîcher, qui travaillait sur l’exploitation, est décédé d’un cancer , en pleine jeunesse, ainsi que, peu après le grand-père…

Après la projection de mon film, un débat très intense s’est installé dans la salle, car l’histoire de cette famille est malheureusement banale: l’épidémie de cancers et de maladies de Parkinson ou d’Alzheimer , due notamment à l’usage massif des pesticides, frappe massivement les familles d’agriculeurs, qui sont les premières victimes de ce modèle agricole industriel criminel, – dont les OGM représentent le dernier avatar -, qui empoisonne l’environnement et les humains et détruit les écosystèmes, en provoquant des catastrophes sanitaires comme le prouve l’épidémie de « grippe porcine », au Mexique, ou de dengue, en Argentine.

Concernant le virus H1N1 tout semble indiquer, en effet, qu’il est parti d’une usine à porcs (950 000 porceaux à l’année) appartenant au géant américain de l’agroalimentaire Smithfield Foods, « le plus gros producteur mondial de porc, sanctionné jadis aux Etats Unis pour pollution de l’environnement », comme l’écrit Le Monde , dans son édition du 29 avril. Suite à sa condamantion, la multinationale a ouvert une filiale dans le petit village de La Gloria, dans l’Etat du Veracruz, avec « des conditions d’hygiène désastreuses dénoncées depuis des années », selon les termes du Monde, qui poursuit : « Les trois mille habitants se sont plaints tout le mois de mars d’une épidémie galopante de pneumonies et autres maladies infectieuses , attribuées aux millions de mouches que nourrissent les charognes de porc pourrissant à l’air libre ».

Si l’on ajoute à cela le problème du lisier produit par les malheureux porcs – à qui les hommes de Smithfield Foods arrachent les dents, car leur entassement provoque des comportements cannibales …- alors on a tous les ingrédients d’une catastrophe sanitaire annoncée: en effet, comme le décrit William Reymond dans son livre Toxic, les « lagons » d’excréments de porcs comprennent, entre autres, des millions de bactéries, dont certaines sont hypervirulentes et résistantes aux antibiotiques, qui contaminent l’environnement.

Pour en savoir plus sur ce « système alimentaire qui tue », j’invite les internautes à lire l’excellent article de GRAIN, intitulé « la peste porcine, dernier fléau de l’industrie de la viande »:

Au même moment, en Argentine, le gouvernement lutte contre une épidémie de dengue, dont l’origine est liée aux épandages massifs de roundup sur les dix-huit millions d’hectares de cultures de soja roundup ready et à la déforestation que provoque la ruée sur le nouvel or vert. C’est en tout cas ce qu’a expliqué l’agronome Alberto Lapolla à Horacio Verbitsky, dans le journal Página 12, qui enchaîne les révélations sur le fléau du soja.

Pour les non hispanophones, je résume la dernière partie de l’article qui explique que l’épidémie de dengue est liée à une invasion du moustique Aedes Aegypti, également vecteur de la fièvre jaune, qui s’est abattue sur les régions où l’on produit du soja transégnique, en Argentine, Bolivie, Brésil et Paraguay. En effet, note l’agronome, le roundup et les herbicides utilisés pour venir à bout des mauvaises herbes résistantes … au roundup, comme le 2,4-D (composant de l’agent orange) « tuent les poissons et amphibiens, les crapauds, grenouilles, rainettes, etc, c’est-à-dire les prédateurs naturels des moustiques, desquels ils s’alimentent tant à l’état de larves que d’adultes ».

De plus plusieurs études révèlent la « quasi disparition des amphibiens dans les prairies de la pampa et dans ses cours d’eau principaux, rivières, lagunes ou mares, ainsi que le nombre élevé de poissons morts ou présentant des déformations physiques ainsi que des perturbations graves de leur capacité de reproduction ».

Enfin, la déforestation massive dans le Nord Est de l’Argentine (voir sur mon Blog mon film « Argentine: le soja de la faim ») entraîne la destruction de tout un écosystème, « qui est aussi l’habitat naturel de d’autres prédateurs des moustiques… »

Photo: la projection à Pontivy

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