Photos du prix Rachel Carson

Comme promis, je mets en ligne quelques photos du Prix Rachel Carson, qui m’a été remis à Stavanger en Norvège. Créé pour rendre hommage à l’auteur du Printemps silencieux (voir sur ce blog) , ce prix est remis, tous les deux ans, à une femme qui défend l’environnement.

La cérémonie s’est déroulée dans la salle de réception de Stavanger, en présence de la ministre norvégienne de la recherche et de l’enseignement supérieur et du consul honoraire de France.

– Photo 1: à ma droite Sidsel Morck, écrivain, lauréate du prix en 1991, et à ma gauche, Berit As, professeure en psychologie sociale, lauréate du prix en 1997.

En 1999, la lauréate du prix fut le Dr. Theo Colborn, qui lança l’appel de Wingspread, dénonçant les effets des perturbateurs endocriniens sur la reproduction, et auteure du livre « Our stolen future » (L’homme menacé de disparition), un best seller aux Etats Unis.

En 2001, ce fut Renate Kunast, la ministre allemande de l’environnement (Verts).

– Photo 2: le prix! Un cormoran en bronze et un chèque monumental

– Photo 3: avec Tora Aasland la ministre de la recherche et de l’enseignement supérieur qui m’a remis le prix.

Le DDT: un poison persistant banni par l’OMS

« Rachel Carson fut la première à dénoncer les conséquences sanitaires et environnementales désastreuses des épandages de DDT, a déclaré Tora Aasland, la ministre norvégienne de la Recherche et de l’Enseignement supérieur, au moment de me remettre le Prix Rachel Carson, hier, à Stavanger (photos et vidéo prochainement).

Puis, elle a rappelé qu’avec la Suède, son pays fut le premier à interdire l’usage de ce « poison persistant », dès 1970.

De fait, le DDT fait partie de la « sale douzaine » des Polluants Organiques Persistants (POP) , recensés par la Convention de Stockholm de l’ONU qui a été ratifiée le 22 mai 2001 et est aujourd’hui signée par 158 pays.

Voici la définition des POP que donne le site du Sénat français:

 » Les POP sont des substances chimiques persistantes, qui s’accumulent dans les tissus adipeux, se propagent dans la chaîne alimentaire et sont nocives pour la santé et l’environnement.. Ces substances franchissent aisément les frontières internationales pour atteindre les régions les plus reculées ; elles posent donc un problème mondial, requérant une solution globale. »

Le DDT, comme tous les POP, est une molécule organique – c’est à dire une molécule dont la structure de base repose sur une combinaison d’atomes de carbone et d’hydrogène – dont la dissémination dans l’environnement est devenue problématique du fait des propriétés particulières des POP : faible biodégradabilité (persistance), effets toxiques à très faible dose, capacité à s’accumuler dans la chaîne alimentaire (bioaccumulation).

Ce caractère persistant couplé à une certaine volatilité explique qu’on puisse retrouver des POP très loin de leurs lieux d’émission, transportés par les courants marins ou atmosphériques ; ce qui fait de l’élimination des sources de POP un enjeu d’échelle mondiale.

Figurent parmi la « sale douzaine » des POP, des pesticides extrêmement toxiques, dont les effets dramatiques sur la faune, la flore, et les êtres humains, ont été dénoncés pour la première fois par la biologiste marine Rachel Carson, dans son livre Le Printemps silencieux, publié en 1962.

S’appuyant sur des dizaines de rapports scientifiques, provenant de tous les Etats américains, soumis dans les années 1950 à ce qu’elle appelle une « pluie chimique », l’écrivain visionnaire pointe du doigt le DDT (et ses produits de décomposition comme le DDD et DDE), qui est extrêmement toxique pour les oiseaux et les espèces aquatiques; mais aussi l’aldrine, chlordane, dieldrine, endrine, heptachlore, hexachlorobenzène, mirex, toxaphène, tous considérés , aujourd’hui, comme des POP , auxquels la Convention de Stockholm a ajouté les PCB de Monsanto.

Concernant le DDT, cet insecticide, inventé pendant la seconde guerre mondiale (cf: mon livre) et commercialisé à grande échelle par Monsanto et consorts, son usage agricole (dénoncé par Rachel Carson) a été interdit dans la plupart des pays développés, dans les années 1970, où il est classé comme « cancérigène humain potentiel ».

En revanche, son utilisation modérée à des fins sanitaires, notamment pour lutter contre les moustiques transmetteurs du paludisme, restait tolérée dans les pays tropicaux, jusqu’à ce que , en mai dernier, l’Organisation mondiale de la santé annonce son bannissement définitif d’ici 2020.

Malgré les pressions des fabricants du « poison persistant », l’OMS s’est, enfin, rendue à l’avis des organisations écologistes qui n’ont cessé de dénoncer l’inefficacité à moyen et long terme des pulvérisations de DDT car celles-ci contribuent à l’apparition de moustiques toujours plus résistants et mettent en péril la santé des populations, contaminées, y compris à faibles doses, par cette molécule hautement toxique, alors que des programmes de substitution au DDT, menés au Mexique et en Amérique centrale, ont montré leur efficacité.

J’invite les internautes à lire le communiqué de presse des Nations Unies annonçant cette désision, qui confirme ce que Rachel Carson avait écrit, cinquante ans plus tôt…

Le titre du communiqué est sans ambiguité: « Du progrès vers un monde sans DDT »:

NB: j’ai mis ce commentaire en ligne le 6 juin, mais en avais préparé les éléments le 5 juin, d’où la date.

Deux prix ce week end!

Je m’envole dans quelques heures pour Stavanger, en Norvège, où je vais recevoir le Prix Rachel Carson:

Comme je l’écrivais sur ce Blog, je suis très honorée de recevoir cette récompense remise, tous les deux ans, à une femme internationale qui lutte pour la protection de l’environnement.

Rachel Carson (1907-1964) est l’auteur de Silent Spring (Le printemps silencieux) , publié en 1962, une oeuvre majeure où elle dénonce, pour la première fois, les effets dramatiques de l’uage massif des pesticides aux Etats Unis, et notamment du DDT (produit notamment par Monsanto).

Cette enquête rigoureuse, que je suis en train de relire (j’y reviendrai) provoqua l’émergence du mouvement écologiste et conduisit à l’interdiction de l’usage agricole du DDT ainsi qu’à la création de l’EPA, l’agence de protection de l’environnement des Etats Unis.

Le Prix me sera remis par le ministre de l’éducation et de la recherche norvégien, Tora Assland, en présence du consul de France, M.Kjell O. Hauge.

Par ailleurs, mon film « Le monde selon Monsanto » a remporté une « Etoile de la Scam« , qui me sera remise dimanche au Forum des Images (Les Halles):

Malheureusement je ne pourrai pas être à la présentation du film, programmé à 17 heures, car je serai encore dans l’avion me ramenant de Norvège, mais j’arriverai vers 21 heures 30 pour recevoir mon étoile!

L' »imposture » des OGM BT (suite!)

J’étais cet après-midi au lycée agricole les Sicaudières , à Bressuire, dans les Deux Sèvres (voir photo), situé à une trentaine de kilomètres de la ferme de mes parents. Les élèves de cet établissement qui préparent les futurs agriculteurs avaient travaillé en cours sur mon film « Le monde selon Monsanto » et après avoir fait un exposé d’une heure sur le bilan des cultures transgéniques en Amérique et Asie, j’ai répondu à leurs nombreuses questions. Celles-ci ont porté principalement sur l’avenir de l’agriculture biologique (le lycée propose un enseignement sur l’élevage de poulets bio), les liens entre les maladies (cancers, Parkinson, maladie de Charcot) dont souffrent certains membres – agriculteurs- de leurs familles et l’exposition aux pesticides qu’ils ont longtemps manipulés sans aucune précaution, et les résultats des cultures BT (maïs et coton) en Amérique, Asie et Afrique du Sud.

Concernant les cultures BT, le bilan est catastrophique pour Monsanto et consorts:

– interdiction du MON 810 dans six pays de la Communauté européenne

– apparition d’insectes résistants dans plusieurs Etats des Etats Unis (voir sur ce Blog)

– récolte nulle en Afrique du Sud (voir sur ce Blog).

J’ai rappelé aux élèves du lycée agricole dans quelles conditions rocambolesques et amateures les plantes BT avaient été mises sur le marché.

Voici ce que j’ai écrit dans mon livre:

La résistance des insectes aux plantes Bt : une « bombe à retardement »
(…)

De fait, la perspective que les parasites du coton (ou du maïs) mutent en développant une résistance à la toxine Bt a été soulevée avant même que Monsanto mette ses OGM sur le marché. Dès le milieu des années 1990, la stratégie retenue par la multinationale, en accord avec l?Agence de protection de l?environnement des États-Unis (EPA), a été que les producteurs de plantes Bt s?engagent contractuellement à préserver des parcelles de cultures non Bt, baptisées « refuges », où sont censés pulluler les insectes « normaux » pour que ceux-ci se croisent avec leurs cousins devenus résistants au bacillus thurigiensis, provoquant ainsi une « dilution génétique ».

En effet, lorsque des insectes sont confrontés en permanence à une dose de poison a priori mortelle, ils sont tous exterminés, sauf quelques spécimens dotés d?un gène de résistance au poison. Les survivants s?accouplent avec leurs congénères, transmettant éventuellement le fameux gène à leurs descendants ; et ainsi de suite sur plusieurs générations. C?est ce qu?on appelle la « co-évolution » qui, au cours de la longue épopée du vivant, a permis à des espèces menacées d?extinction de s?adapter pour survivre à un fléau fatal.

Pour éviter que ce phénomène se développe chez les parasites des plantes Bt, les apprentis sorciers ont imaginé qu?il suffisait d?entretenir une population d?insectes « sains » sur des parcelles non transgéniques ? les « zones refuges » ? pour qu?ils batifolent avec leurs cousins devenus résistants au Bt, en les empêchant ainsi de se reproduire entre eux.
Une fois cela établi, restait à déterminer la taille que devaient avoir les fameux « refuges » pour que le scénario fonctionne. Le sujet fut l?objet d?âpres négociations entre Monsanto et les scientifiques, l?Agence de protection de l?environnement se contentant d?enregistrer l?issue du match.

Au début, certains entomologistes prônaient que la surface des refuges soit au moins équivalente à celle des parcelles transgéniques. Monsanto, bien sûr, a protesté, en proposant un premier compromis généreusement chiffré à 3 % (la superficie du refuge devait être égale à 3 % de la surface OGM).

En 1997, un groupe de chercheurs universitaires travaillant dans la « corn belt » (la « ceinture du maïs » qui couvre l?Iowa, l?Indiana, l?Illinois et l?Ohio, dans le nord-est des États-Unis) se lança courageusement dans l?arène en recommandant que les refuges soient équivalents à 20 % des parcelles transgéniques, et au double si ceux-ci étaient traités avec d?autres pesticides que le Bt.

Pour la firme de Saint-Louis, c?était encore trop, comme le rapporte Daniel Charles dans son livre Lords of the Harvest :

« Monsanto a regardé les recommandations et a dit : ?Nous ne pourrons pas vivre avec ça?, raconte Scott McFarland, un avocat qui a suivi le dossier de très près. La multinationale contacte alors l?association nationale des producteurs de maïs, dont le siège se trouve aussi à Saint-Louis. Elle parvient à convaincre ses représentants que ?de grands refuges constitueraient une menace pour la liberté des agriculteurs d?utiliser les semences Bt? . »

Jusqu?à ce jour de septembre 1998 où les parties se rencontrent à Kansas City pour trouver un accord. Alors que les débats s?enlisent dans des batailles de pourcentages surréalistes, un économiste de l?université du Minnesota, spécialiste de l?agriculture, démontre avec brio que, selon ses estimations, si les refuges ne font que 10 % des cultures transgéniques, alors les pyrales ? le parasite cible du maïs Bt ? auront 50 % de chance de développer une résistance à court terme et que cela coûtera très cher aux farmers. Touchés droit au porte-monnaie, ceux-ci basculent dans le camp des entomologistes.

Voilà pourquoi, un peu partout dans le monde, les manuels de cultures Bt exigent depuis que les zones refuges soient équivalentes à au moins 20 % des surfaces OGM. Mais, on en conviendra, tout cela relève une fois de plus du bricolage et de l?improvisation, puisqu?aucune étude sérieuse n?a été réalisée pour vérifier que ce compromis arraché dans un coin du Missouri ait une quelconque validité scientifique.

Et quand, en 1998, le journaliste du New York Times Michael Pollan, dont j?ai déjà cité l?enquête décapante (voir supra, chapitre 11), interroge les représentants de Monsanto sur la question, ils répondent que, « si tout va bien, la résistance peut être repoussée de trente ans », ce qui s?appelle de la politique à courte vue.

Puis, quand mon confrère insiste auprès de Jerry Hjelle, le vice-président de la firme en charge des affaires réglementaires, pour savoir ce qui se passera après ce délai fatidique, la « réponse est encore plus troublante » :

« Il y a des milliers d?autres Bt un peu partout, explique-t-il, nous pourrons traiter ce problème avec d?autres produits. Ceux qui nous critiquent ne savent pas tout ce que nous avons encore dans notre pipeline. [?] Faites-nous confiance ! »
En attendant, dix ans après le lancement des cultures Bt, il est possible d?établir un premier bilan de la jolie construction bureaucratique. D?abord, comme le soulignait dès janvier 2001 une dépêche de l?agence Associated Press, d?après un sondage conduit en 2000, « 30 % des producteurs [américains] de maïs Bt ne suivent pas les recommandations émises pour la gestion de la résistance », parce qu?ils les jugent trop contraignantes. À dire vrai, je les comprends, sauf que, bien sûr, ils devraient arrêter de cautionner un système aussi absurde, qui finira tôt ou tard par s?écrouler comme un château de cartes, ainsi que l?indique une étude réalisée en 2006 par des chercheurs de l?université Cornell (États-Unis), en collaboration avec l?Académie chinoise de la science .

Considérée comme la « première étude sur l?impact économique à long terme du coton Bt », celle-ci a été conduite auprès de 481 producteurs d?OGM de Chine, parmi les 5 millions que compte le pays. Elle constate que les « profits substantiels engrangés pendant quelques années grâce à une économie sur les pesticides sont maintenant érodés ». En effet, écrivent les auteurs, si pendant les trois ans qui ont suivi l?introduction des cultures Bt, les paysans étaient parvenus à « réduire de 70 % leur usage de pesticides et à augmenter de 36 % leurs gains », en revanche, en 2004, « ils ont dû pulvériser autant d?insecticides que les producteurs conventionnels, ce qui s?est traduit par un revenu net moyen inférieur de 8 % à celui des producteurs conventionnels, parce que le coût des semences est trois fois plus élevé ».

Enfin, au bout de sept ans, « les populations d?insectes [?] ont tellement augmenté que les paysans doivent asperger leurs cultures jusqu?à vingt fois au cours d?une saison pour pouvoir les contrôler ». La conclusion des auteurs, pourtant partisans des OGM, est sans appel : « Ces résultats constituent un signal d?alerte très fort en direction des chercheurs et des gouvernements, qui doivent trouver des solutions pour les producteurs de coton Bt, faute de quoi ceux-ci arrêteront les cultures transgéniques, ce qui serait très dommage. »

FIN DE L’EXTRAIT

Photo: rencontre avec les élèves du lycée agricole de Bressuire.

Merci à Philippe Engerbeau, photographe à La Nouvelle République.

Obama favorise l’agriculture bio

Hier soir, de 18 à 19 heures, j’ai participé à l’émission du Dr. Gary Null sur PRN, une radio qui émet depuis New York. L’heure était consacrée aux OGM, pour lesquels l’administration Obama a annoncé un processus de révision de la réglementation, ce qui est une très bonne nouvelle.

Au moment où le président Obama demandait à l’USDA (le secrétariat à l’agriculture) d’amorcer une réflexion sur la réglementation des OGM , ou plutôt la non-réglementation des OGM, telle qu’elle est pratiquée depuis 1992 (voir mon film et livre) , son épouse Michelle Obama faisait la Une des journaux en annonçant la création à la Maison Blanche d’un jardin potager entièrement bio.

Ainsi que le rapporte The New York Times, c’est plus qu’une anecdote. Tout indique, en effet, que la Première dame a décidé de montrer l’exemple dans un pays ravagé par la malbouffe, où l’épidémie d’obésité, cancers, diabète ( de type 2), malformations génétiques, stérilité et allergies ne cesse de progresser.

Comme l’expliquait la scientifique qui participait, hier, à l’émission de Gary Null, il est tout à fait possible que les OGM pesticides qui contaminent toute la chaîne alimentaire aux Etats Unis soient l’une des causes de cette épidémie, aux côtés d’autres polluantschimiques.

www.nytimes.com/2009/03/20/dining/20garden.html

Enfin, on apprenait récemment que l’administration Obama a nommé la professeure Kathleen Merrigan comme numéro 2 à l’USDA. Kathleen Merrigan s’est beaucoup engagée pour promouvoir une agriculture écologiquement durable, familiale et bio, un modèle totalement opposé à celui des monocultures transgéniques brevetées.

Cette nomination compense celle de Tom Vilsack comme Secrétaire à l’agriculture car l’ancien gouverneur de l’Iowa, l’un des Etats le plus transgénique des Etats Unis , est plutôt associé à l’agriculture industrielle. Récemment la Biotechnology Industry Organization, où Monsanto est très actif, lui a remis le « prix du meilleur gouverneur de l’année »…

L’arrivée de Kathleen Merrigan à l’USDA va peut-être permettre des progrès vers une agriculture plus verte.

À peine nommée, Kathleen Merrigan a annoncé la création d’un fonds de 50 millions de dollars pour soutenir la reconversion d’agriculteurs vers l’agriculture bio. Une somme encore modeste dont on espère qu’elle ne constitue qu’un début…

Pétition pour soutenir le Dr. Andres Carrasco et la science indépendante

Dans un post précédent, j’ai évoqué les pressions, menaces et la campagne de diffamation menées contre le Pr. Andres Carrasco, qui a conduit une étude sur les effets mortels du roundup sur les embryons d’amphibiens.

Je viens de signer la pétition, lancée par 300 scientifiques et intellectuels argentins pour les soutenir, et invite les internautes à faire de même:

Plus que jamais nous avons besoin de scientifiques indépendants des multinationales qui évaluent rigoureusement et dans l’intérêt de la collectivité les produits que celles-ci mettent sur le marché, dans le but exclusif de satisfaire leurs intérêts économiques et ceux de leurs actionnaires.

Voici le texte de la pétition qui circule en espagnol, anglais et français:

Alerte
Nous, scientifiques, académiques, intellectuels, artistes, souhaitons rendre publique notre position critique face à toute intromission mercantiliste et pragmatique du pouvoir économique dans l’indépendance du système scientifique et universitaire. Avec la rhétorique du “productivisme” devenue courante ces derniers temps -et différente de l´accumulation financière typique des décennies précédentes-, on cherche à éviter le débat sur ce qui depuis longtemps fait l’objet de préoccupations et d’actions au sein des réseaux scientifiques et académiques au niveau de la communauté internationale: le savoir, et le savoir public surtout, est-il assiégé par le marché ? Dans quelles conditions l’indépendance scientifique peut-elle être réelle, notamment celle qui mène à exercer le droit éthique de donner l´alarme face aux dommages subis par la communauté, sans souffrir de représailles ou de sanctions plus ou moins voilées ? La communauté scientifique et universitaire a ses voix d´alerte, avec les arguments que lui donnent les “sciences dures” –biologie, géologie, glaciologie, chimie, entre autres- et de même en est-il pour les “sciences molles” –médicine, sociologie, écologie sociale, économie politique, archéologie, anthropologie, éducation, etc. Des chercheurs et des universitaires essaient de se faire entendre pour éviter ou diminuer les risques certains de dommages irréparables et, surtout, de grandes souffrances sociales.
Le discours des politiques, des fonctionnaires, des communicateurs et des médiateurs recrutés par les corporations économiques produisent une sorte de discours unique semblable à un chant des sirènes sur le “développement durable” du modèle d`agrobussines (celui du soja en particulier) et des “mines responsables » comme facteur de transformation, et ce discours hégémonique est stratégiquement légitimé par des acteurs universitaires et scientifiques financés par les compagnies transnationales au sein d’un système public qui a été soumis à une désappropriation. Comment les voix critiques des universitaires et des chercheurs contre le modèle basé sur l’extraction pourraient-elles être entendues? Quelles possibilités y a-t-il de développer une discussion publique sur ces thèmes si importants pour le bien commun? Comment caractériser cette scène en termes de promotion de la citoyenneté et des droits qu’il est possible d’exiger, là où les voix indépendantes et critiques associés à des savoirs aux trajectoires non cooptées se voient niées, diffamées, réduites au silence, voire détournées ?
En ce moment où fait rage le débat sur la publication des résultats d’une enquête sur des produits agrochimiques largement utilisés dans l’agriculture argentine, nous réaffirmons notre décision de préserver un système scientifique et universitaire indépendant des intérêts économiques des grandes corporations, ou dominent la liberté de penser et de chercher, encadrée à la fois par les principes éthiques propres à chaque champ disciplinaire ainsi que l’incontournable responsabilité face aux secteurs sociaux les plus démunis.
Pour signer cette pétition, veuillez envoyer un email à muchasredes09@gmail.com
Pour lire les signature, voir www.voces-de-alerta.blogspot.com