Face au succès de mon livre « Le monde selon Monsanto », les Editions la Découverte et ARTE Editions ont décidé de le sortir en livre de poche. Cette nouvelle édition sera bientôt disponible dans les librairies.
Je mets en ligne la postface que j’ai rédigée pour l’édition poche, qui dresse un bilan de l’incroyable phénomène qui a accompagné la sortie de mon film et livre un peu partout dans le monde.
Contrairement à ce qu’affirment mes détracteurs personnels (!), mon enquête a soulevé très peu de critiques: à part les leurs et celles de l’AFIS, dont je parle dans la postface (et sur mon Blog). Pour le reste, les scientifiques honnêtes n’ont rien trouvé à redire à mon travail, bien au contraire.
Il est intéressant de noter que mes détracteurs personnels se sont empressés de squatter le site de Télérama.com, après l’article de François Ekchajzer qui raconte l’invraisemblable impasse dans laquelle se trouve mon film « Torture made in USA » (voir la rubrique « Torture made in USA »
Normal , ils sont payés pour cela!
La postface faisant seize pages, je suis obligée de la mettre en plusieurs fois!
Postface
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Un succès certifié durable
(Note: J’emprunte ce titre à celui d’un article de l’hebdomadaire professionnel Livres Hebdo du 18 avril 2008, rapportant que Le Monde selon Monsanto « arrive en deuxième position des meilleures ventes des essais ».)
J’écris cette postface à l’édition en poche de mon livre, parue en mars 2009, d’une chambre d’hôtel à Lima (Pérou).
Les 28 et 29 janvier 2009, j’y étais invitée à participer à un colloque intitulé « Les semences de la diversité face aux OGM », organisé par une dizaine d’associations impliquées dans le développement durable et les droits de l’homme. Pour ce pays « mégadivers » – le Pérou, la Bolivie, le Brésil, la Colombie, le Costa Rica, l’Équateur, le Mexique et le Vénézuéla concentrent 70 % de la biodiversité du monde –, l’enjeu est de taille : un projet de loi va bientôt être discuté au Parlement pour « encadrer les cultures transgéniques ».
Si la loi passe, le maïs transgénique de Monsanto (Bt) fera son entrée au Pérou, menaçant de contaminer les centaines de variétés « criollas » (traditionnelles) de la céréale mythique des Incas, « capable de pousser dans les zones littorales mais aussi à 3 000 mètres d’altitude », comme l’a rappelé lors du colloque la docteur Antonieta Gutiérrez, professeure à l’Université nationale d’agronomie de La Molina à Lima.
Preuve, s’il en était besoin, que les millions de paysans péruviens qui entretiennent cette extraordinaire biodiversité depuis des millé-naires n’ont pas attendu le « génie génétique » de multinationales comme Monsanto pour développer des variétés adaptées aux terroirs, climats et aléas agronomiques. Même chose pour la pomme de terre ou le quinoa, dont le Pérou constitue le centre d’origine, avec des milliers de variétés cultivées partout dans le pays.
Le problème pour Monsanto et consorts, c’est que ces variétés ne sont pas brevetées et que les paysans continuent de développer leurs propres semences, au besoin en les échangeant avec leurs voisins. Or, curieuse coïncidence, le Pérou a justement adopté le 14 janvier 2009 une loi autorisant le brevetage des semences, ce qui ouvre la voie aux OGM…
Dans le même temps, le gouvernement péruvien subissait de nombreuses pressions pour interdire l’étiquetage des OGM qui entrent déjà dans le pays, notamment sous forme d’huile de soja importée du Brésil, au motif que cet étiquetage serait préjudiciable au consommateur, en entraînant une « augmentation des prix » (un argument déjà mis en avant par Monsanto notamment aux États-Unis).
Enfin, des informations concordantes signalent la présence de cultures transgéniques illégales dans au moins une région péruvienne, grâce à un trafic de semences fort opportun, organisé depuis les pays voisins…
Le lecteur de ce livre l’aura compris, on retrouve là les ingrédients habituels propres à la stratégie de la pour firme de Saint Louis pour imposer par tous les moyens ses plantes transgéniques pesticides : pression sur les gouvernements pour modifier les lois concernant le brevetage du vivant, ou pour empêcher l’étiquetage des OGM, tandis que des acteurs obscurs créent un « état de fait » (comme au Paraguay ou au Brésil, et plus récemment au Mexique) permettant de facto à la multinationale de revendiquer ses « droits de propriété intellectuelle » sur les cultures transgéniques illégales et, donc, de juteuses royalties, entraînant in fine la légalisation des cultures de contrebande.
Le colloque de Lima a débuté par la projection de mon film devant quelque trois cents participants. Au même moment, une autre projection était organisée pour vingt-cinq journalistes, suivie d’une conférence de presse qui a duré près de deux heures, tant les questions étaient nombreuses.
Puis j’ai rejoint la salle du colloque pour écouter le discours d’ouverture du ministre de l’Environnement Antonio Brack, un écologue réputé. Celui-ci a réitéré sa proposition de déclarer le « Pérou libre d’OGM », en soulignant qu’elle était loin de faire l’unanimité au sein du gouvernement. Elle est même l’objet d’intenses frictions avec le ministère de l’Agriculture, qui, comme au Brésil, soutient mordicus les OGM de Monsanto, censés entraîner une augmentation de la productivité agricole. Pendant le déjeuner, Antonio Brack m’a « avoué », avec un grand sourire, que son cabinet était coupable de « piraterie » :
« N’ayant pas pu nous procurer votre film en espagnol, m’a-t-il expliqué, nous avons donc regardé la version pirate mise en ligne sur Google ! » De fait, aucun DVD espagnol n’étant alors disponible sur le marché, un internaute avisé avait pris la peine de sous-titrer entièrement le film et de mettre sa version pirate sur Internet !
(Note: Depuis, Arte a produit une version espagnole de mon film, qui est disponible par ailleurs en allemand, anglais, hollandais et portugais.)
Pour conclure cette première partie de la postface, je mets quelques photos en ligne qui illustrent le séminaire du Pérou:
– Photo 1: l’affiche du colloque
-Photo 2: conférence de presse
-Photo 3: les participants au colloque
-Photo 4: le ministre de l’environnement Antonio Brack
-Photo 5: l’édition espagnole de mon livre