Radio Canada

J’ai donné une dizaine d’interviews sur Radio Canada à Montréal, Québec et Toronto, comme celle-ci dans l’émission quotidienne de Christiane Charette.

Pour la petite histoire, si vous tapez « The World according to Monsanto » dans votre moteur de recherche préféré, vous verrez qu’une rumeur court aux Etats Unis: « the documentary you won’t ever see » (le film que vous ne verrez jamais) disent de nombreux papiers…
En fait, le DVD sera lancé aux Etats Unis par l’ONF (Office canadien du cinéma) début juillet.
En attendant, l’ONF a décidé de faire retirer le film de Daily Motion et de Google Video, droits d’auteur obligent…
L’opération a dû être répétée plusieurs fois, parce que le film est remis « environ tous les deux jours » sur les sites pirates, m’a dit Yves Bisaillon, l’un des patrons de l’ONF.

Du coup, la rumeur court que c’est Monsanto qui intervient pour censurer le film!!

La loi d’airain des brevets (2)/ Rush

Je continue à présenter la face cachée et réelle des OGM qui n’intéressent Monsanto que pour une seule raison: ils sont brevetés à cause de la dérive du système général des brevets que j’ai décrite dans mon post « la Loi d’airain des brevets (1) ».

Comme je l’ai raconté dans mon film, pour s’assurer que les agriculteurs n’ont pas gardé une partie de leur récolte pour la re-semer, Monsanto fait appel aux services d’une agence de détectives privés (la Pinkerton aux Etats Unis et la Robertson au Canada) que l’on surnomme « la police des gènes » et qui sème la terreur dans les prairies et plaines d’Amérique du Nord.
Je retranscris ici la partie de mon livre qui rapporte l’étude conduite par le Center and Food Safety (CFS) de Washington sur une centaine de paysans poursuivis par Monsanto pour « violation du brevet ».
Ensuite, je mets en ligne l’interview que j’avais réalisée (prémontée et finalement coupée) de Joseph Mendelson, le directeur juridique du CFS.

DEBUT EXTRAIT

La police des gènes

« Les OGM sont protégés par la loi américaine sur les brevets, m’explique John Hofman, le vice-président de l’Association américaine du soja (ASA), avec l’indéfectible sourire qui ponctue chacune de ses phrases. C’est pourquoi je n’ai pas le droit de garder des graines pour les replanter l’année suivante. C’est une protection pour Monsanto et les sociétés de la biotechnologie, parce qu’elles ont investi des millions et des millions de dollars pour créer cette nouvelle technologie que nous sommes très heureux d’utiliser. »

À entendre le farmer de l’Iowa, je pense à… Hugh Grant, le P-DG de Monsanto qui, dans une interview à Daniel Charles, ne disait pas autre chose : « Notre intérêt est de protéger notre propriété intellectuelle et nous n’avons pas à nous en excuser. […] C’est aussi dur que cela. Il y a un gène qui appartient à Monsanto et il est illégal qu’un agriculteur prenne ce gène pour le recréer dans une deuxième récolte . »

« Comment la firme Monsanto peut-elle savoir que quelqu’un a ressemé ses graines ?, demandé-je à John Hofman.

– Euh…, hésite-t-il, visiblement embarrassé. Je ne sais pas répondre à cette question… C’est une bonne question pour Monsanto… »

Malheureusement, comme je l’ai dit au début de ce livre, les responsables de Monsanto ont refusé de me recevoir, ce qui m’a été notifié par Christopher Horner, le responsable des relations publiques de la firme à Saint-Louis. Il eût pourtant été intéressant que j’interviewe ce dernier, car d’après un article du Chicago Tribune, c’est lui qui a dû monter au créneau pour défendre les pratiques de son employeur, quand le Center for Food Safety de Washington a publié un rapport très dérangeant en novembre 2004.

Intitulé Monsanto vs. U.S. Farmers , ce document très fouillé de quatre-vingt-quatre pages confirme l’existence de ce qu’on appelle en Amérique du Nord la « police des gènes », assurée effectivement par les agences Pinkerton aux États-Unis et Robinson au Canada . Il révèle aussi que depuis 1998, la firme de Saint-Louis mène une véritable chasse aux sorcières dans les prairies américaines, qui a conduit à des « milliers d’enquêtes, une centaine de procès et de nombreuses faillites ».

« Ces procédures représentent un pourcentage infime par rapport aux quelque 300 000 usagers de notre technologie, a rétorqué Christopher Horner. Les procès constituent le dernier recours de la firme . »
Quant à Joseph Mendelson, le directeur juridique du Center for Food Safety, il dénonce les « méthodes dictatoriales » de la multinationale, prête à tout selon lui, pour « imposer son contrôle sur tous les rouages de l’agriculture ».
Il faut dire que la lecture du rapport qu’il a coordonné donne froid dans le dos : après avoir rappelé qu’en 2005, 85 % du soja cultivé aux États-Unis était transgénique, 84 % du colza, 76 % du coton et 45 % du maïs, celui-ci note qu’« aucun paysan n’est à l’abri des investigations brutales et des poursuites implacables de Monsanto : certains agriculteurs ont été condamnés après que leur champ a été contaminé par du pollen ou des semences issus du champ transgénique d’un voisin ; ou quand des “graines rebelles” restées d’une culture précédente ont germé, l’année suivante, au mi-lieu d’une plantation non transgénique ; certains n’avaient même jamais signé de contrat technologique. Dans tous ces cas, en raison de la manière dont la loi sur les brevets est appliquée, tous ces paysans ont été considérés comme techniquement responsables ».

Pour mener son étude, le Center for Food Safety (CFS) a consulté les données fournies par la firme elle-même, qui rend régulièrement publics les cas de « piraterie de semences » qu’elle a détectés dans le pays.
Une mesure inhabituelle de transparence destinée à dissuader les éventuels contrevenants à sa loi d’airain. On découvre ainsi qu’en 1998, la multinationale a « enquêté » sur 475 cas de « piraterie » et que jusqu’en 2004, la moyenne annuelle dépassait les 500.
Le CFS a recoupé ces données avec le recensement des « poursuites engagées par Monsanto contre des agriculteurs américains », établi par le registre des greffes des tribunaux fédéraux, qui, à la date de 2005, avait enregistré 90 procès.
La moyenne des indemnités obtenues par la firme s’est élevée à 412 259 dollars, avec un maximum de 3 052 800 dollars, soit un total de 15 253 602 dollars (dans certains cas, exceptionnels, les agriculteurs n’ont pas été condamnés). Les procédures ont entraîné la faillite de huit exploitations agricoles.

« En fait, m’explique Joseph Mendelson, ces chiffres ne représentent que la partie immergée de l’iceberg, puisqu’ils ne concernent que les rares affaires qui sont allées en justice. La grande majorité des paysans attaqués, très souvent injustement, préfèrent négocier à l’amiable, car ils ont très peur des frais que leur coûterait un procès contre Monsanto. Or, tous ces règlements à l’amiable n’apparaissent pas, car ils s’accompagnent d’une clause de confidentialité. C’est pourquoi nous n’avons pu décortiquer que les affaires qui avaient été jugées. »

Dans le rapport du CFS, on découvre que Monsanto dispose d’un budget annuel de 10 millions de dollars et d’un staff de soixante-quinze personnes pour mener ses « enquêtes ».
Sa première source d’information, c’est le numéro vert « 1-800-Roundup », que la firme a officiellement mis en ligne le 29 septembre 1998, par un communiqué de presse en bonne et due forme :

« Laissez un message sur le répondeur si vous voulez rapporter d’éventuelles violations de la loi sur les semences ou tout autre type d’information, dit ainsi la voix sur le numéro vert. Il est important d’utiliser des lignes fixes, car les téléphones portables peuvent être interceptés par de nombreuses personnes. Vous pouvez appeler anonymement, mais s’il vous plaît laissez votre nom et numéro de téléphone au cas où le suivi le nécessiterait . »

D’après Daniel Charles, la « ligne des mouchards » a reçu
1 500 appels en 1999, dont 500 ont déclenché une « enquête » . Interrogée sur cette « ligne des mouchards », soupçonnée d’« effilocher les liens sociaux qui soutiennent les communautés rurales », pour reprendre les termes mesurés du Washington Post, Karen Marshall, la porte-parole de Monsanto, s’est contentée de répondre :

« Cela fait partie de la révolution agricole, et toute révolution est douloureuse. Mais la technologie est une bonne technologie . »

FIN DE L’EXTRAIT

Suite dans le prochain post!

L’appel au secours des agriculteurs

Je viens de recevoir un mail qui m’a beaucoup touchée et que je mets en ligne en accord avec son auteur.
De fait, dans toutes mes conférences, je dis et redis que je ne jette pas la pierre aux agriculteurs qui se laissent séduire par le miroir aux alouettes que représentent les plantes transgéniques. Fille d’agriculteurs (Poitou Charentes), je sais que les paysans français et d’ailleurs sont pris dans un engrenage infernal , encouragé par les fantassins du développement productiviste qui a conduit à la perte de nombreux d’entre eux et que décrit très bien Jérémy, victime de ce processus criminel, puisque son père et grand père en sont morts…
Il est temps de dresser le bilan de l’agriculture industrielle qui a entraîné la dégradation de la qualité des produits alimentaires et la désertification des campagnes…
Le retour à l’agriculture biologique est la seule solution: pour les paysans mais aussi pour les consommateurs.

J’ai réalisé un reportage pour « Reportage » de TF1 en 1997 , intitulé « le suicide des paysans », qui a remporté le prix société au Festival international du scoop d’Angers.

Voici ce que m’écrit Jérémy:

« Je m’appelle Jérémie, j’ai 33 ans et j’ai créé une association, il y a un an, qui a pour but de faire reconnaitre la souffrance qu’on vécue et que vivent encore certaines familles d’agriculteurs. Voici l’adresse du site de l’association.

Mon grand père était cultivateur dans la région du Vaucluse et s’est donnée la mort en 1977 de même pour mon père en 2000.Je sais que mon cas n’est pas un cas isolé, ce sont des milliers de fermes qui ont été ruinées et c’est pour cette raison que j’ai créé l’association.

J’ai pris contact avec la sociologue et ethnologue française Michèle Salmona qui alerte les pouvoirs publics sur les pathologies des agriculteurs liées selon elle à la modernisation rapide « à marche forcée » de l’agriculture française depuis le milieu des années 60. Je lui avais adressé un récit de vie et elle m’a beaucoup aidé. Je m’entretiens régulièrement avec elle par téléphone.

Elle a étudié le groupe social des paysans pendant plus de quarante ans, et mis clairement en évidence les effets de double contrainte et d’injonctions paradoxales dans les rapports que vivent ces derniers avec les représentants du pouvoir et de l’Etat. En effet dans le cadre de l’incitation économique, des agents mandatés par l’Etat qu’elle appelle les « fantassins du développement » pénètrent dans le domicile même des familles des agriculteurs et les soumettent à des injonctions (ordres) paradoxales assorties de la double contrainte :

– soit ils rentrent dans le jeu de la modernisation et dans ce cas on leur donne des subventions.Mais alors ils auront à subir les lourdes contraintes ( Changement brutal du mode de production, hausse de la fatigue nerveuse, endettement, risque de faillite en cas de chute des cours…) qui sont liées à cette modernisation.

– soit ils restent en marge de la modernisation et ils deviennent des marginaux économiques et donc ils sont condamnés à disparaître à brève échéance.

L’agriculteur est alors piégé, il n’a pas la possibilité de désobéir ni de s’exprimer sur l’absurdité de la situation qu’il est en train de vivre : il n’y a pas d’alternative. L’école de Palo-Alto a justement montré que ce genre de situations dans lesquelles la personne est prisonnière d’un choix « impossible » sont à l’origine de pathologies mentales graves: névrose, schizophrénie (étymologiquement veut dire « esprit » « coupé »), psychose.

Mais ce n’est malheureusement pas tout, à la fin du plan, les « fantassins du développement » reviennent dans la famille pour contrôler les résultats obtenus. Et comme de bien entendu, dans la grande majorité des cas, ils estiment que les objectifs n’ont pas été atteints (sanctions) . Cela engendre un phénomène de culpabilisation (dépression, suicide) de la part de la famille en « incitation » économique.

Contre-ordre : Le comble de l’absurde est atteint lorsque l’incitation fonctionne « trop bien » (surproduction). Les incitateurs fantassins du développement mettent en garde les familles qu’il va falloir faire attention à restreindre la production (quotas laitiers par exemple). L’ agriculteur qui a investi (après avoir été incité) dans de nouveaux bâtiments pour accroître sa production et qui comptait sur la quantité pour pouvoir compenser la baisse des prix se voit sommé de la réduire : Il y a vraiment de quoi devenir fou !

Harcèlement (des créanciers par exemple), manipulation mentale (ordre, contre-ordre, double contrainte, sanctions) … ce qui s’est passé dans les campagnes françaises est grave et tout cela ne doit pas rester sous silence. C’est pour cela que nous demandons la tenue d’un procès. Un débat contradictoire sur ces questions est plus que nécessaire. Nos élus ont des comptes à rendre aux citoyens. Les victimes de ces politiques ont le droit de savoir ce qui s’est passé.

L’association est en train de monter un dossier pour porter plainte contre l’Etat français. (Nous ne prétendons pas détenir la vérité mais nous voulons simplement que cette action en justice puisse permettre un débat contradictoire et que l’Etat se justifie des décisions qu’il a prises ou pas prises.)

Nous essayons d’alerter des médias pour faire connaitre notre projet. Malheureusement sans succès à ce jour…

C’est pourquoi, m’est venue l’idée de m’adresser à vous.

Je souhaitais soumettre à votre attention un petit documentaire « les coulisses du développement » réalisée d’après une enquête de la sociologue Michèle Salmona
(Le film est disponible en ligne sur la page d’accueil du site http://arsfp.blogspot.com/ ) ainsi qu’un article « les champs de la détresse » disponible à cette adresse.

Voilà, je pense avoir dit l’essentiel,

merci d’avoir pris le temps de me lire,

Bien Cordialement,

Jérémie (membre fondateur de l’arsfp) »

Les PCB polluent le Rhône

Un certain nombre d’internautes ont posté sur mon blog des commentaires concernant la pollution du Rhône par les PCB.
Je confirme qu’il s’agit bien des PCB de Monsanto: jouissant d’un brevet de vingt ans, la firme a vendu des licences un peu partout dans le monde : aux Etats Unis et en Angleterre (où Monsanto possédait des usines de production de PCB), les PCB se vendaient sous le nom de « Arochlor », en France de « Pyralène », en Allemagne de « Clophen » et au Japon de « Kanechlor ».
Effectivement les PCB ont contaminé les sédiments du Rhône, et depuis l’été dernier la pêche y est interdite ainsi que dans ses affluents.
Hier, Libération a consacré un article à cette affaire.

Un poison aussi toxique que la dioxine

« Nous avons tous des PCB dans le corps, me dit le professeur David Carpenter, qui dirige l’Institut pour la santé et l’environnement à l’Université d’Albany, dans l’État de New York. Ils appartiennent à une catégorie de douze polluants chimiques très dangereux, appelés « polluants organiques persistants » (POPs), car malheureusement ils résistent aux dégradations biologiques naturelles en s’accumulant dans les tissus vivants tout au long de la chaîne alimentaire.
Les PCB ont contaminé la planète entière, de l’Arctique à l’Antarctique, et une exposition régulière peut conduire à des cancers, notamment du foie, du pancréas, des intestins, du sein, des poumons et du cerveau, à des maladies cardiovasculaires, de l’hypertension, du diabète, une réduction des défenses immunitaires, des dysfonctionnements de la thyroïde et des hormones sexuelles, des troubles de la reproduction ainsi qu’à des atteintes neurologiques graves, car certains PCB appartiennent à la famille des dioxines… »

Et de m’expliquer que les PCB sont des molécules de biphényles où un ou plusieurs des dix atomes d’hydrogène sont remplacés par des atomes de chlore. Il existe ainsi 209 combinaisons possibles, et donc 209 PCB différents — on parle de « congénères » —, dont la toxicité varie selon le degré de chloration liée à la place et au nombre d’atomes de chlore présents dans la molécule.

En écrivant ces lignes, je ne peux m’empêcher de feuilleter Le Nouvel Observateur du 23 août 2007, qui, après Le Monde, Libération ou Le Figaro a rendu compte de ce que le Dauphiné libéré a appelé un « Tchernobyl à la française » :

« Le Rhône est pollué jusqu’à la mer, écrit l’hebdomadaire. Il présente des taux de PCB de cinq à douze fois supérieurs aux normes sanitaires européennes ! Analyse après analyse, les arrêtés préfectoraux sont tombés comme des couperets : l’interdiction de consommer ses poissons, décrétée d’abord au nord de Lyon puis appliquée jusqu’aux confins de la Drôme et de l’Ardèche, a été étendue le 7 août aux départements du Vaucluse, du Gard et des Bouches-du-Rhône. Elle pourrait bientôt frapper les étangs de Camargue, alimentés par l’eau du fleuve, voire la pêche côtière en Méditerranée et celle des coquillages et crustacés du bord de mer… »

L’alerte a été donnée fortuitement par un pêcheur professionnel piégé par sa bonne foi :

« Fin 2004, on a retrouvé des oiseaux morts en amont de Lyon, explique celui-ci à mon confrère. Le temps des analyses, les services vétérinaires, par précaution, ont interdit toute consommation de la pêche. Ce n’était qu’un cas de botulisme strictement aviaire, mais plus personne ne voulait de mes poissons. J’ai demandé des analyses complètes pour prouver qu’ils étaient bons. Et là, bingo ! Ils étaient bourrés de PCB ! »

Depuis, les services de l’État s’acharnent à déterminer l’origine de la pollution qui affecterait des centaines de milliers de tonnes de sédiments du Rhône.
Comme nous l’avons vu, la vente et l’acquisition de PCB ou d’appareils en contenant sont interdites en France, depuis 1987. Un décret du 18 janvier 2001 a transcrit en droit français une directive européenne du… 16 septembre 1996 (cinq ans après !) concernant l’élimination des PCB existants, qui doivent avoir définitivement disparu au plus tard le 31 décembre 2010.

Un plan national de décontamination et d’élimination des appareils contenant des PCB a été mis en place en… 2003. D’après l’ADEME, 545 610 appareils contenant plus de cinq litres de PCB auraient été inventoriés dans l’Hexagone au 30 juin 2002 (dont 450 000 appartenant à EDF), représentant un poids de 33 462 tonnes de PCB à éliminer.

Mais pour France Nature Environnement, on est certainement loin du compte, la déclaration des appareils à traiter étant volontaire. « Notre crainte a été de voir des pollutions diffuses de PCB dans l’environnement dues à des éliminations non maîtrisées de ces déchets, avec le risque de voir leur abandon sur des friches industrielles, ou des dépôts sauvages, ou lors de simple élimination par ferraillage », écrit l’association dans sa lettre d’information de février 2007 .

« Le problème, m’avait expliqué le professeur David Carpenter, c’est que les PCB sont très difficiles à détruire. Le seul moyen, c’est de les brûler à de très hautes températures dans des incinérateurs spécialisés capables aussi de traiter la dioxine que provoque leur combustion. »

En France, deux usines sont homologuées pour conduire cette mission délicate : l’une est située à Saint-Auban, dans les Alpes-de-Haute-Provence, l’autre à Saint-Vulbas, dans l’Ain, au bord du Rhône.
Or, d’après les informations recueillies par Le Nouvel Observateur, jusqu’en 1988, celle-ci était autorisée à déverser trois kilos de résidus de PCB quotidiennement dans le fleuve (aujourd’hui, la quantité maximale est de trois grammes par jour)…
À cette source possible de contamination, s’ajoutent sans doute aussi les rejets effectués par les nombreuses entreprises utilisant le Pyralène dans le « couloir de la chimie », qui ont laissé leurs huiles aux PCB s’infiltrer dans les sols, puis dans les nappes phréatiques et les cours d’eau voisins.

« Pendant des décennies, aux États-Unis comme partout dans le monde, les pouvoirs publics ont relayé le silence organisé par Monsanto sur la toxicité des PCB, commente le professeur Carpenter, tout le monde a fermé les yeux sur les effets de ce poison aussi dangereux que la dioxine. »
Il suffit de lire le document transmis au Congrès américain, en 1996, et rédigé par le ministère de la Santé et l’EPA, pour comprendre en effet que les « implications sanitaires de l’exposition aux PCB » sont gravissimes .

Comprenant une trentaine de pages, il présente rien moins que 159 études scientifiques, menées aux États-Unis, en Europe et au Japon, qui parviennent toutes à la même conclusion : les trois sources principales de la contamination humaine par les PCB sont l’exposition directe sur le lieu de travail, le fait de vivre à proximité d’un site pollué et, surtout, la chaîne alimentaire, la consommation de poissons étant de loin la plus risquée…

De plus, tous les chercheurs ont constaté que les mères contaminées transmettaient les PCB par le lait maternel et que ceux-ci pouvaient provoquer des dommages neurologiques irréparables chez les nouveaux-nés, qui grandissent avec ce que les médecins appellent un « désordre de l’attention » et un QI nettement plus bas que la moyenne.
La toxicité dévastatrice des PCB a pu être étudiée minutieusement à cause d’un accident survenu au Japon, en 1968 : 1 300 personnes de la région de Kyushu consommèrent de l’huile de riz contaminée par des PCB, à la suite d’une fuite survenue dans un système de réfrigération. Elles furent atteintes d’une maladie appelée dans un premier temps « Yusho » (ce qui signifie « maladie dermatologique provenant de l’huile »), caractérisée par des éruptions cutanées graves, une décoloration des lèvres et des ongles et un gonflement des articulations. Quand il s’avéra que l’origine de la mystérieuse maladie était les PCB, des chercheurs entreprirent d’effectuer un suivi médical des victimes à long terme. Les résultats montrent que les enfants nés de mère contaminées pendant leur grossesse présentaient un taux de mortalité précoce et/ou un retard mental et comportemental importants ; de plus, le taux de cancer du foie était quinze fois plus élevé chez les victimes que dans la population normale, tandis que l’espérance de vie moyenne était considérablement réduite. Enfin, les PCB étaient toujours détectables dans le sang et le sébum des personnes contaminées vingt-six ans après l’accident.

Ces résultats furent confirmés par une étude portant sur 2 000 personnes de Taiwan, contaminées en 1979 dans les mêmes conditions que leurs voisins japonais (« accident de Yu-Cheng ») . Ces deux événements dramatiques expliquent l’affolement qui s’est emparé des pouvoirs publics belges, quand, en janvier 1999, éclata l’affaire des « poulets à la dioxine ». L’origine était aussi le mélange accidentel de PCB avec des huiles de cuisson, qui furent ensuite introduites dans des aliments destinés aux poulets, mais aussi aux cochons et aux vaches d’élevages intensifs.
De la litanie d’études présentées dans le document de l’EPA, j’en retiendrai deux autres particulièrement dramatiques. L’une concerne 242 enfants nés de mères (d’origine amérindienne ou femmes de pêcheurs amateurs) qui avaient consommé régulièrement des poissons du Lac Michigan, six ans avant et pendant leur grossesse : tous présentèrent une baisse de poids à la naissance et un déficit persistant de l’apprentissage cognitif.
L’autre concerne les Inuits de la Baie d’Hudson, particulièrement exposés : la contamination maximale a en effet été enregistrée, au sommet de la chaîne alimentaire, chez les mammifères marins comme les phoques, les ours polaires et les baleines — dont certaines espèces, comme les épaulards, sont menacées d’extinction par les PCB …

FIN DE L’EXTRAIT

J’informe mes lecteurs que la FRAPNA (la Fédération Rhône Alpes de protection de la nature) organise une cmapgne pour rassembler des dons afin de financer des études sur la pollution du Rhône par les PCB.

La loi d’airain des brevets

Curieusement lors du débat au parlement et au sénat la question des brevets n’a jamais été abordée. Pourtant, le fait que les semences transgéniques soient brevetées est un élément capital pour comprendre la stratégie de Monsanto et consorts.
Je rappelle que j’ai réalisé un documentaire sur le brevetage du vivant et les conséquences qu’il entraîne pour les pays en voie de développement et la biodiversité. Intitulé « Les pirates du vivant » et diffusé sur ARTE en novembre 2005, ce film a remporté cinq prix: le prix de l’investigation au FIGRA (Festival international du grand reportage et du documentaire de société-Le Touquet), le Prix Buffon au Festival du film scientifique de Paris (Paris Science) et trois prix au festival international du film de l’environnement de Bourges.
www.alerte-verte.com/
Avant d’expliquer plus en détails quels changements dramatiques les semences transgéniques brevetées entraînent dans les campagnes, je retranscris la partie de mon livre qui raconte pourquoi l’interdiction de breveter le vivant est violée depuis l’avènement des OGM.

EXTRAIT:

L’arme des brevets

« L’un de mes plus grands soucis, c’est ce que réserve la biotechnologie à l’agriculture familiale, déclarait Dan Glickman, le 13 juillet 1999, lors de ce fameux discours qui irrita tant ses collègues du Commerce extérieur américain. La question de savoir qui possède quoi alimente déjà des débats très épineux. On voit des firmes poursuivre en justice d’autres firmes pour des problèmes de brevet, même quand elles fusionnent. Les agriculteurs sont dressés contre leurs voisins dans le but de protéger les droits de propriété intellectuelle des multinationales. […] Les contrats passés avec les agriculteurs doivent être justes et ne pas les transformer en de simples serfs sur leurs terres. »

En prononçant ces mots très iconoclastes, le secrétaire à l’Agriculture de Bill Clinton touchait à l’un des sujets qui sont au cœur de l’opposition aux OGM : celui des brevets.

« Nous avons toujours dénoncé le double langage des firmes de la biotechnologie, m’explique Michael Hansen, l’expert de l’Union des consommateurs. D’un côté, elles disent qu’il n’y a pas besoin de tester les plantes transgéniques, parce qu’elles sont strictement similaires à leurs homologues conventionnels ; de l’autre, elles demandent des brevets, au motif que les OGM représentent une création unique. Il faut savoir : soit le soja Roundup ready est identique au soja conventionnel, soit il ne l’est pas ! Il ne peut pas être les deux à la fois au gré des intérêts de Monsanto ! »

En fait, jusqu’à la fin des années 1970, il eût été inconcevable de déposer une demande de brevet sur une variété végétale. Y compris aux États-Unis où la loi sur les brevets de 1951 stipulait clairement que ceux-ci concernaient exclusivement les machines et les procédés industriels, mais en aucun cas les organismes vivants, et donc les plantes. À l’origine, en effet, le brevet représente un outil de politique publique qui vise à stimuler les innovations techniques en accordant à l’inventeur un monopole de fabrication et de vente de son produit, pour une durée de vingt ans.

« Les critères d’attribution des brevets sont normalement très stricts, commente Paul Gepts, un chercheur du département de biologie moléculaire qui me reçoit dans son bureau de l’université Davis (Californie), en juillet 2004. Ils sont au nombre de trois : la nouveauté du produit — c’est-à-dire le fait que le produit n’existait pas avant sa création par l’inventeur —, l’inventivité dans sa conception et le potentiel industriel de son utilisation. Jusqu’en 1980, le législateur avait exclu les organismes vivants du champ des brevets, parce qu’il estimait qu’en aucun cas ils ne pouvaient satisfaire le premier critère : même si l’homme intervient sur leur développement, les organismes vivants existent avant son action et, de plus, ils peuvent se reproduire tout seuls. »

Avec l’avènement des sélectionneurs, s’était posée la question des variétés végétales « améliorées » par la technique que j’ai déjà décrite de la « sélection généalogique » (voir supra, chapitre 7).
Soucieuses de récupérer leurs investissements, les entreprises semencières avaient obtenu que soit attribué à « leurs variétés » ce qu’on appelle un « certificat d’obtention végétale », leur permettant de vendre des licences d’exploitation aux négociants ou d’inclure une sorte de « taxe » dans le prix de leurs semences.
Mais ce « certificat d’obtention végétale » (appelé « Plant Variety Protection » aux États-Unis) n’était qu’un cousin très éloigné du brevet, puisqu’il n’interdisait pas aux paysans de garder une partie de leur récolte pour ensemencer leurs champs l’année d’après, ni aux chercheurs, comme Paul Gepts, ou aux sélectionneurs d’utiliser la variété concernée pour en créer de nouvelles. C’est ce qu’on appelle l’« exception du fermier et du chercheur ».

Tout a changé en 1980. Cette année-là, la Cour suprême des États-Unis a rendu un jugement lourd de conséquences, en déclarant brevetable un microorganisme transgénique.
L’histoire avait débuté huit ans plus tôt, lorsqu’Ananda Mohan Chakrabarty, un généticien travaillant pour General Electric, avait déposé une demande de brevet pour une bactérie qu’il avait manipulée pour qu’elle puisse dévorer les résidus d’hydrocarbures.
L’Office des brevets de Washington avait logiquement rejeté la demande, conformément à la loi de 1951. Chakrabarty avait fait appel et obtenu gain de cause auprès de la Cour suprême, qui avait déclaré :
« Tout ce qui sous le soleil a été touché par l’homme, peut être breveté. »

Cette étonnante décision avait ouvert la voie à ce que d’aucuns appellent la « privatisation du vivant » : en effet, dès 1982, s’appuyant sur la jurisprudence américaine, l’Office européen des brevets de Munich accordait des brevets sur des microorganismes, puis sur des plantes (1985), des animaux (1988) et des embryons humains (2000).
Théoriquement, ces brevets ne sont accordés que si l’organisme vivant a été manipulé par les techniques du génie génétique ; mais, dans les faits, cette évolution va bien au-delà des seuls OGM.
Actuellement, des brevets sont accordés pour des plantes non transgéniques, notamment celles qui présentent des vertus médicinales, en violation totale des lois existantes :

« Depuis l’avènement de la biotechnologie, on assiste à une dérive du système du droit commun des brevets, m’a expliqué ainsi en février 2005 Christoph Then, le représentant de Greenpeace à Munich. Pour obtenir un brevet, il n’est plus nécessaire de présenter une véritable invention, mais bien souvent il suffit d’une simple découverte : on découvre la fonction thérapeutique d’une plante, comme par exemple le margousier indien, on la décrit et on l’isole de son contexte naturel, et on demande à la breveter. Ce qui est déterminant, c’est que la description soit effectuée dans un laboratoire, et on ne tient pas compte du fait que la plante et ses vertus soient connues depuis des milliers d’années ailleurs . »

Aujourd’hui, l’Office des brevets de Washington accorde chaque année plus de 70 000 brevets, dont environ 20 % concernent des organismes vivants. J’ai dû batailler longtemps avant d’obtenir un rendez-vous avec un représentant de cette énorme institution, qui dépend du secrétariat au Commerce américain et emploie 7 000 agents. Véritable citadelle installée dans la banlieue de Washington, l’Office des brevets est un lieu stratégique pour une firme comme Monsanto qui, entre 1983 et 2005, y a décroché 647 brevets liés à des plantes.

« L’affaire de Chakrabarty a ouvert la porte à une période très excitante, s’enthousiasme John Doll, qui travaille au département biotechnologie de l’Office et m’y reçoit en septembre 2004. Désormais, nous octroyons des brevets sur les gènes, les séquences de gènes, les plantes ou les animaux transgéniques, bref sur tous les produits issus du génie génétique.

– Mais un gène n’est pas un produit…, dis-je, un peu interloquée par le ton conquérant de mon interlocuteur.

– Certes, admet John Doll, mais dans la mesure où la firme a pu isoler le gène et en décrire la fonction, elle peut obtenir un brevet… »

FIN DE L’EXTRAIT

Résultats du premier week end au Canada

Voici l’e-mail que je viens de recevoir de nos amis de l’ONF concernant la sortie salle au Canada. Ces résultats ne concernent pas la médiathèque de Toronto où j’ai lancé le film lundi soir. Pour la petite histoire: devant l’affluence, les organisateurs du Canadian Film Board ont dû ouvrr une deuxième salle en urgence!

Bonjour,

Très bon premier week-end en salle pour Le monde selon Monsanto.

Cinéma Parallèle (Ex-Centris) 3 projos par jour, salle de 90 places : 628 entrées

Cinéma Le Clap, 2 projos par jour, salle de 55 places : 239 entrées

Cinéma AMC (version anglaise), 4 projos par jour, salle de 340 places : 254 entrées

Sherbrooke : une seule projection 450 entrées approx.

De plus, un autre cinéma (le Lido) va programmer le film à Lévis (rive sud de Québec) à partir de vendredi le 30.

Les chiffres complets de la première semaine à venir vendredi PM.

Cordialement,

François Jacques
Agent de mise en marché